Certificat de nationalité française : annulation partielle du décret réformant les modalités d'instruction et de recours

24.01.2024

Droit public

Le Conseil d'État ayant annulé deux dispositions du décret relatif au certificat de nationalité le pouvoir réglementaire devra modifier le code de procédure civile pour prévoir une solution de substitution à la communication du greffe par voie électronique et rendre obligatoire l'information du demandeur en cas de prorogation du délai d'instruction.

Par une décision du 17 janvier 2024, non publiée, le Conseil d’État annule partiellement le décret n° 2022-899 du 17 juin 2022 relatif au certificat de nationalité française.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

Découvrir tous les contenus liés

Si les dispositions contestées sont assez largement validées par la Haute juridiction, celles de l’article 1045-1 du code procédure civile, en ce qu’elles ne prévoient pas de solution de substitution à la communication des demandes et décisions de l’administration par courrier électronique, et en ce qu’elles ne prévoient pas d’information du demandeur en cas de première (ou deuxième) prorogation du délai d’instruction de sa demande, sont, elles, annulées.

Remarque : le décret n° 2022-899 du 17 juin 2022 a notamment précisé les modalités d’instruction de la demande de certificat de nationalité française et substitué un recours contentieux devant le tribunal judiciaire au recours hiérarchique qui existait devant le ministre de la justice. Ses dispositions étaient contestées par le Gisti, le Conseil national des barreaux, l’association ADDE et le Syndicat des avocats de France.

Annulation du décret pour défaut de solution de substitution à la communication par voie électronique

Dans sa décision, le Conseil d’État souligne en premier lieu que l’article 1045-1 du code de procédure civile, tel qu’introduit par le décret du 17 juin 2022, prévoit que la demande de certificat de nationalité « doit être accompagnée de l'indication d'une adresse électronique » à laquelle sont adressés les communications du greffe, le récépissé constatant la réception de toutes les pièces nécessaires à l'instruction ainsi que la notification du refus de délivrance du certificat.

Constatant que rien n’empêchait de choisir la voie électronique pour ces différentes communications, il juge toutefois qu’il incombait au pouvoir réglementaire de prévoir également « les dispositions nécessaires pour que les personnes qui ne disposent pas d'un accès aux outils numériques ou qui rencontrent des difficultés dans leur maniement puissent bénéficier d'une solution de substitution afin de mener à bien la procédure d'examen de leurs demandes de certificat de nationalité française et de pouvoir recevoir, dans ce cadre, les envois de l'administration ».

En l’absence de telles dispositions, le décret « fait obstacle à l’accès normal des usagers au service public et porte atteinte à l’exercice effectif de leurs droits par les personnes concernées ».

Annulation du décret pour défaut d’information en cas de prorogation du délai d’instruction

Deuxième disposition annulée : le troisième alinéa de l’article 1045-1 du code de procédure civile, en ce qu’il ne prévoit pas que la décision de prorogation du délai d'instruction par le directeur du greffe fasse l'objet d'une information au demandeur.

En effet, aux termes de ces dispositions, « le récépissé mentionne qu'une décision sera rendue dans un délai de six mois. Pour les besoins de l'instruction, le directeur des services de greffe judiciaires peut proroger ce délai au maximum deux fois pour la même durée ». Ces mêmes dispositions prévoient que « l'absence de décision à l'issue de ces délais vaut rejet de la demande ».

Or, pour le Conseil d’État, « il en résulte que le demandeur d'un certificat de nationalité n'est pas mis à même de déterminer, au terme du délai de six mois indiqué par le récépissé, si l'absence d'information de l'administration à son égard doit être regardée comme un refus implicite de sa demande, lequel fait alors courir le délai de recours contentieux de six mois, ou comme une prorogation implicite du délai d'instruction de celle-ci ».

En l’absence de telles précisions, le décret méconnaît le principe de sécurité juridique ainsi que l'objectif à valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la norme.

Validation des autres dispositions contestées

Les trois requêtes enregistrées visaient également à l’annulation pour excès de pouvoir de nombreuses autres dispositions du décret du 17 juin 2022. Elles sont toutes rejetées.

On notera ici seulement qu’à l’occasion de l’examen du motif tiré de l’atteinte au droit à un recours juridictionnel du fait que les dispositions du décret seraient « susceptibles de faire courir un délai de forclusion à partir d'une date qui ne serait pas celle de la réception effective du refus de certificat de nationalité, le Conseil d’État précise que, « en l'absence de texte en disposant autrement, la date à laquelle le demandeur est réputé avoir reçu la notification d'un refus de certificat de nationalité est celle à laquelle il la consulte à son adresse électronique, date qu'il incombe, le cas échéant, à l'administration d'établir en cas de contestation ».

Arnaud AUBARET, Dictionnaire permanent droit des étrangers
Vous aimerez aussi

Nos engagements