Conditions matérielles d'accueil : l'Ofii doit examiner la situation personnelle du demandeur d'asile en réexamen

20.05.2019

Droit public

L'Ofii n'est pas tenu d'accorder le bénéfice des conditions matérielles d'accueil à un demandeur d'asile en procédure de réexamen. Toutefois, il ne peut lui opposer un refus sans procéder préalablement à un examen de sa situation personnelle et de son état de vulnérabilité.

Par une ordonnance du 19 avril 2019, le juge des référés du Conseil d'État censure une décision de l'Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) refusant l'attribution du bénéfice des conditions matérielles d'accueil à un demandeur d'asile en procédure de réexamen.
Après avoir précisé que le retour en France à la suite d'un transfert « Dublin » n'est pas assimilable à une fraude, il rappelle que, si la loi en autorise le refus dans ces circonstances, elle ne dispense pas l'Office d'examiner la situation personnelle du demandeur et d'apprécier son état de vulnérabilité.
Remarque : aux termes du 2° de l'article L. 744-8 du Ceseda,  « outre les cas, mentionnés à l'article L. 744-7, dans lesquels il est immédiatement mis fin de plein droit au bénéfice des conditions matérielles d'accueil, le bénéfice de celles-ci peut être [...] refusé si le demandeur présente une demande de réexamen de sa demande d'asile ou s'il n'a pas sollicité l'asile, sans motif légitime, dans le délai prévu au 3° du III de l'article L. 723-2 ».  
L'introduction d'une demande d'asile après un retour de transfert n’est pas une fraude mais une demande de réexamen 
A titre liminaire, le Conseil d'État rappelle que le fait d'introduire une demande d'asile au retour d'un transfert « Dublin » effectivement exécuté (en l'espèce, dix semaines auparavant) ne peut être assimilé à une fraude au sens de l'article D. 744-36 du Ceseda, et justifier, de ce seul fait, un refus d'octroi des conditions matérielles d'accueil.
Pour le juge, une demande d'asile introduite dans un tel contexte est assimilable à une demande de réexamen, au sens de l'article L. 723-15 du Ceseda. Or, dans l’hypothèse où cette demande aurait été présentée tardivement sans motif légitime, l'article L. 744-8 du même code autorise l'Ofii à refuser le bénéfice des conditions matérielles d'accueil. 
Toutefois, le Conseil d’État estime que tel n’a pas été le cas en l’espèce.
Pas de refus des conditions matérielles d’accueil sans examen de la situation personnelle 
L'Ofii n'est pas en situation de compétence liée en matière de refus du bénéfice des conditions matérielles d’accueil à un demandeur d’asile. En effet, le 2° de l'article L. 744-8 précise que le bénéfice des conditions matérielles d'accueil « peut » être refusé.
Pour le Conseil d'État, cela signifie que ces dispositions ne dispensent pas l'Office de procéder à un examen préalable de la situation de la requérante afin de prendre en compte, notamment, sa vulnérabilité.
Or, en l’espèce, le juge estime que la vulnérabilité était établie, dès lors que la requérante, de nationalité nigériane, est entrée initialement en Italie « avec l'aide d'un réseau de prostitution à la menace duquel elle essaie de se soustraire en revenant en France » et tente de « sortir de la prostitution à laquelle elle a été contrainte de se livrer ». Affirmations que, précise le juge des référés du Conseil d’État, l’Ofii n’a pas contestées.
L’Office n'ayant pas pris en considération ces éléments qui, aux yeux du juge, sont déterminants, le refus d'octroi des conditions matérielles d'accueil est entaché d'une illégalité manifeste.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Christophe Pouly, avocat
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