La carence de l'État à proposer, dans les délais, au demandeur reconnu prioritaire au titre du droit au logement opposable (DALO) un logement adapté engage sa responsabilité - et donne lieu à indemnisation -, même si l'intéressé n'a pas fait usage du recours en injonction devant le juge administratif.
Lorsqu'un demandeur reconnu prioritaire dans le cadre du droit au logement opposable (DALO) par une commission de médiation ne s'est pas vu proposer une offre de logement adaptée à ses besoins, deux recours s'offrent à lui : un "recours injonction", afin que le juge ordonne au préfet son (re)logement, et un "recours indemnitaire", visant à indemniser le préjudice résultant de la carence fautive de l’État.
Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.
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Si le juge administratif considère que la responsabilité de l’État est engagée en raison de la double carence à exécuter d’une part la décision de la commission de médiation et d’autre part l’injonction du juge, le Conseil d’État vient de préciser très clairement, dans plusieurs arrêts rendus cet été, que ces deux fondements sont indépendants et non cumulatifs.
Articulation du recours injonction et du recours indemnitaire
La Haute juridiction administrative a précisé que la carence fautive de l’État à exécuter, dans le délai imparti, la décision de la commission de médiation reconnaissant un demandeur comme prioritaire et devant être (re)logé d’urgence, engage sa responsabilité, quand bien même l’intéressé n’a pas fait usage du recours en injonction devant le juge administratif (recours prévu par les dispositions de l’article L. 441-2-3-1 du CCH). L’exercice du recours injonction ne constitue pas un préalable au recours indemnitaire, la responsabilité de l’État étant déjà engagée.
Étendue de la responsabilité de l'État
La responsabilité de l'État est engagée "au titre des troubles dans les conditions d'existence résultant du maintien de la décision ayant motivé la décision de la commission". La période de responsabilité de l’État court à compter de l’expiration du délai de 3 ou 6 mois dont dispose le préfet après la décision de la commission de médiation pour faire une proposition de logement.
Ainsi, en cas de carence de l’État et dès lors que la situation qui a motivé la décision de la commission perdure, l’intéressé justifie de troubles dans ses conditions d’existence lui ouvrant droit à réparation au titre du préjudice subi.
Le Conseil d’État rappelle par ailleurs que la responsabilité de l’État est engagée à l’égard du seul demandeur et que les troubles dans ses conditions d’existence doivent être appréciés en fonction des conditions de logement qui ont perduré, de la durée de la carence de l’État et du nombre de personnes qui composent le foyer. Dans un arrêt du 28 juillet, le juge indique qu’en l’absence de relogement, le fait pour un demandeur de supporter un loyer manifestement disproportionné au regard de ses ressources doit également être pris en compte, mais que l’indemnisation du préjudice ne saurait être égale à la différence entre le montant du loyer réglé et celui qui aurait été acquitté en cas d’attribution d’un logement social (CE, 28 juill. 2017, n° 397513).
Matthieu Perdereau, Avocat