La loi de finances pour 2023 exonère de droits d’enregistrement les actes de reconnaissance devant notaire établis dans le cadre d'une procédure de procréation médicalement assistée (PMA) avec tiers donneur.
La loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 (art. 26) modifie et complète l’article 847 bis du code général des impôts concernant les tarifs d’actes divers. Depuis la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 (art. 6 (V), applicable au 4 août), ce texte prévoit (1°) une exonération des droits d'enregistrement (125 €) pour les actes visés à l'article 342-10 du code civil et à l'article L. 2141-6 du code de la santé publique. Pour mémoire, l’article 342-10 du code civil créé par la loi n°2021-1017 du 2 août 2021 prévoit que les couples ou la femme non mariée qui recourent à une assistance médicale nécessitant l'intervention d'un tiers donneur doivent donner préalablement leur consentement à un notaire. Celui-ci a pour mission de les informer « des conséquences de leur acte au regard de la filiation ainsi que des conditions dans lesquelles l'enfant pourra, s'il le souhaite, accéder à sa majorité aux données non identifiantes et à l'identité de ce tiers donneur ». L’article L. 2141-6 du code de la santé publique prévoit une exigence similaire pour l’accueil d’embryon.
Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.
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Extension de l’exonération prévue par la loi du 2 août 2021
La loi de finances pour 2023 ajoute un 2° à l’article 847 bis du code général des impôts pour étendre l’exonération, à compter du 1er janvier 2023, aux actes de reconnaissance établis dans le cadre des articles 342-9 à 342-13 du code civil, c’est-à-dire dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur. En effet, si le consentement donné à la PMA produit certains effets (interdiction de toute action aux fins d’établissement ou de contestation de la filiation), il ne suffit pas à établir la filiation. Selon les situations, l’établissement de la filiation peut nécessiter une reconnaissance, spécialement de la part de l’homme dès lors que le couple n’est pas marié et que l’enfant n’est donc pas couvert par la présomption de paternité (C. civ., art. 312). Pour la mère, l’indication de son nom dans l’acte de naissance suffit (C. civ., art. 311-25). Plus particulièrement, lorsque l’assistance médicale à la procréation est sollicitée par un couple de femmes, l’article 342-11 du code civil prévoit que lors du recueil du consentement par le notaire (par acte séparé), le couple de femmes doit reconnaître préalablement et conjointement l’enfant. Ce sont ces différentes reconnaissances notariées qui se trouvent donc désormais exonérées de droits d’enregistrement (mais non la reconnaissance de droit commun – C. civ., art. 316 – qui peut être faite éventuellement devant notaire).
L’exonération est également étendue, à l’occasion de cette réécriture de l’article 847 bis CGI, à la reconnaissance pouvant intervenir « dans les conditions prévues au IV de l’article 6 de la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique ». Cette disposition a instauré une mesure transitoire (pour trois ans à compter de la publication de la loi) pour permettre aux couples de femmes ayant eu recours à une PMA avec donneur à l’étranger avant la publication de la loi du 2 août 2021, d’effectuer une reconnaissance conjointe devant notaire (de façon spécifique, l’inscription en marge de l’acte de naissance de l’enfant se fait alors sur instruction du procureur de la République).
Ce dispositif d’exonération ne figurait pas dans le projet de loi initial. Il a été ajouté en première lecture devant l’Assemblée Nationale (PLF 2023, AN n° 26, art. 3 octodecies, 4 nov. 2023) et les termes n’en ont pas été modifiés par le Sénat. Cela faisait partie dès la première lecture des points d’accord entre les deux chambres.
Derrière l’ambition affichée de lever toute entrave financière à la PMA pour les couples de femmes, c’est de façon plus générale, une faveur accordée à la PMA avec tiers donneur qui s’exprime ainsi sous une forme politico fiscale. Sur le fond, on pourrait discuter de l’opportunité de cet affichage par rapport à la PMA sans tiers donneur.
Les émoluments du notaire subsistent
L’exonération de droits d’enregistrement ne dispense pas pour autant du paiement des émoluments qui peuvent être perçus par le notaire, d’une part et selon les situations, au titre du recueil du consentement dans le cadre d’une PMA avec donneur (émolument fixe de 75,46 € HT et TVA à 20%, acte règlementé, C. com., art. A 444-84, mod. arrêté 9 décembre 2021 - art. 1), d’autre part au titre de la reconnaissance, que ce soit celle de droit commun de l’article 316 du code civil, ou la reconnaissance préalable de l’article 342-11 du même code (C. com., art. 444-84-1; émolument fixe de 75,46 € HT soit 90,552 € TTC; Arrêté du 9 décembre 2021 modifiant les tarifs règlementés des notaires pour l’application de l’article 6 de la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique et pour la reconnaissance de paternité ou de maternité prévue à l’article 316 du code civil, JO, 23 déc.).
Jean-Jacques Lemouland, professeur des universités, CERFAPS (EA 4600 Université de Bordeaux)