Inscription automatique aux ordres des infirmiers et des pédicures-podologues : une étape décisive

24.07.2018

Droit public

Afin de favoriser l'inscription des infirmiers et des pédicures-podologues salariés au tableau de leurs ordres professionnels respectifs, un décret précise les conditions dans lesquelles cette inscription peut être réalisée de façon automatique, à l'aide de listes obligatoirement transmises par leurs employeurs.

Un décret du 10 juillet 2018 relatif à l’établissement des listes nominatives des infirmiers et des pédicures-podologues salariés en vue de leur inscription au tableau de l’ordre est paru.
 
Il est ainsi mis en place un dispositif similaire à celui, préexistant, des masseurs-kinésithérapeutes. De légères modifications sont d’ailleurs opérées concernant ces derniers.
 
L’obligation de communiquer les listes des infirmiers et des pédicures-podologues salariés pèse sur tout employeur, public comme privé, quel que soit le type de structure. Elle concerne tous les infirmiers et pédicures-podologues salariés, c’est-à-dire à la fois ceux recrutés après la publication du décret et ceux qui, déjà employés, ne sont pas encore inscrits au tableau.
 
Le principe en est prévu aux articles L. 4311-15 (pour les infirmiers) et L. 4322-2 (pour les pédicures-podologues) du code de la santé publique. Le décret vient préciser la périodicité et les modalités de cette communication, les informations devant accompagner l’identité des salariés et la procédure qui doit s’ensuivre.
Transmission des listes
Les listes devront être transmises périodiquement, au plus tard le 15 du premier mois de chaque trimestre civil, à dater au plus tard du 1er octobre 2018.
 
La communication se fera par voie électronique, auprès du conseil national de l’ordre professionnel, à une adresse électronique communiquée par celui-ci et dans des conditions garantissant la confidentialité des données.
 
Ces listes sont composées des données d’identification suivantes :
– les noms et prénoms du professionnel concerné ;
– la dernière adresse personnelle de correspondance du professionnel détenue par l’établissement ou la structure ;
– la date et le lieu de naissance du professionnel ;
– l’intitulé, la date et le lieu d’obtention du titre de formation ou de l’autorisation d’exercice délivré au professionnel ;
– l’adresse électronique à laquelle le professionnel souhaite être joint par l’ordre pour la transmission des informations complémentaires qui permettront son inscription et pour répondre aux exigences de l’article L. 4001-2 du code de la santé publique, c’est-à-dire pour leur permettre d'être informés des messages de sécurité diffusés par les autorités sanitaires.
 
La première transmission de ces données d’identification fait l’objet d’une information préalable du professionnel concerné par son employeur.
Inscription provisoire pour régulariser les non-inscrits
Le conseil national transmet ensuite les données au conseil départemental ou interdépartemental de l’ordre, pour lui permettre de procéder à l’inscription provisoire de ceux qui ne seraient pas encore inscrits au tableau. Le professionnel concerné est informé de son inscription provisoire et le conseil départemental ou interdépartemental lui communique la liste des pièces à fournir dans un délai de 4 mois en vue de son inscription définitive. Si les pièces requises ne sont pas fournies dans ce délai, le conseil départemental ou interdépartemental informe l’intéressé que faute pour lui de les adresser dans le délai d’un mois, son inscription provisoire prendra fin. Son employeur en est également informé.
 
Passé ce nouveau délai, l’inscription provisoire prend effectivement fin si l’intéressé ne s’est pas exécuté. Cela signifie qu’il se trouve en situation d’exercice illégal, conformément aux articles L. 4311-15 et L. 4322-2 du code de la santé publique (« nul ne peut exercer la profession […] s'il n'a pas satisfait à l'obligation prévue au premier alinéa et s'il n'est pas inscrit au tableau de l'ordre […] ».
 
À la réception des pièces dans le délai requis, le conseil départemental ou interdépartemental procède à l���instruction du dossier et statue sur l’inscription au tableau du professionnel concerné. Il lui notifie, ainsi qu’à son employeur, sa décision.
 
Le décret précise que les données ainsi collectées sont conservées pendant la durée de l’inscription provisoire. Le professionnel concerné dispose d’un droit d’accès et de rectification.
Étapes de la procédure détaillées par une note d'information
La note d’information DGOS/RH2/2018/169 du 10 juillet 2018 accompagnant le décret détaille les différentes étapes de la procédure.
 
S’agissant des masseurs-kinésithérapeutes, le décret ajoute aux listes d’informations transmises par les employeurs, l’adresse électronique du professionnel et précise l’échéance de transmission, au plus tard le 15 du premier mois de chaque trimestre civil. En cohérence avec la procédure applicable aux infirmiers et pédicures-podologues salariés, il détermine également le format de tableau pour la transmission des listes de masseurs-kinésithérapeutes salariés, à télécharger sur le site de l’ordre.
Un dispositif approuvé par l'Ordre des infirmiers
Ce dispositif était plébiscité par le Conseil national de l’Ordre des infirmiers qui, dans un arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 26 octobre 2017 (n° 408042), avait obtenu la condamnation du Premier ministre à prendre dans un délai de six mois, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, le présent décret.
 
En effet, comme le rappelle le Conseil national de l’Ordre des infirmiers dans sa présentation du décret (https://www.ordre-infirmiers.fr/actu/inscription-a-lordre-decret-liste-nominative.html), au 1er juillet 2018, seuls 256 897 infirmiers étaient inscrits au tableau de l'Ordre sur un total de 660 611 infirmiers en exercice (Drees). Parmi eux, 141 047 infirmiers salariés étaient inscrits à l'Ordre sur un total de 434 302 infirmiers salariés hospitaliers.
Poursuite pour exercice illégal faute d'inscription ?
Le décret ne précise pas si ces auxiliaires médicaux salariés pourront être poursuivis pour exercice illégal de leur profession. En théorie, oui (voir Cass. crim, 2 mai 2018, n° 17-83.289). En pratique, de telles poursuites seraient particulièrement fastidieuses et impopulaires. Ce qui est certain, en revanche, est qu’ils devront s’acquitter de la cotisation ordinale, d’un montant de 30 euros pour les infirmiers salariés (contre 75 euros pour les infirmiers libéraux ou à exercice mixte) et de 330 euros pour les pédicures-podologues.
 L'inscription aux ordres désormais obligatoire
L’Ordre des infirmiers et celui des pédicures-podologues sont ainsi les vainqueurs de l’étape, après une lente et chaotique ascension. Issus des élections professionnelles de 2006 (pour les pédicures-podologues) et de 2008 (pour les infirmiers), ces ordres auront dû attendre près de dix ans pour que de telles mesures soient prises. Nous sommes aujourd’hui loin de la proposition de loi de M. Yves BUR, soutenue par la Ministre de la santé Roselyne BACHELOT, tendant à supprimer l’obligation d’inscription à l’Ordre pour les infirmiers salariés (n° 2363, enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 février 2010).

 

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Maïalen Contis, Docteur en droit, avocat au barreau de Toulouse
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