Création des titres de séjour pour « recherche d’emploi ou création d’entreprise » et « jeune au pair », durcissement des conditions d’octroi de certains titres, nouveau cas d’admission exceptionnelle au séjour... les nombreuses dispositions de la loi du 10 septembre 2018 relatives au séjour (voir
bull. 281-1, p. 9 et s.) sont désormais en vigueur et s’appliquent aux demandes de titres postérieures au 1
er mars 2019.
Remarque : plusieurs de ces mesures ne nécessitaient pas de texte d’application, notamment celles relatives au séjour des personnes victimes de violences ou durcissant les conditions de délivrance de la carte « vie privée et familiale » aux parents d’enfants français (C. étrangers, art. L. 313-10, 4°). La circulaire du 28 février 2019 précise que les modalités d’application de ce dernier dispositif (en particulier les dispositions relatives à la filiation) feront l’objet d’une instruction du ministère de la justice.
Accueil des « talents » étrangers
Autorisation provisoire de séjour
Pour l’ensemble des cartes « passeport talent », l’article R. 313-41 modifié par le décret n° 2019-141 du 27 février 2019 prévoit la délivrance systématique d’une autorisation provisoire de séjour d’une durée maximale de six mois dans l’attente de la délivrance du titre par la préfecture. L’objectif est ici de faciliter la mobilité des publics « à haut potentiel », dont le séjour a fait l’objet d’une décision favorable des autorités diplomatiques ou consulaires (Circ., 28 févr. 2019, NOR : INTV1906328J).
Remarque : toujours selon la circulaire du 28 février, le dispositif a toutefois un « caractère transitoire en attendant le déploiement de télé-procédures pour les demandeurs de titre de séjour ».
Entreprises « innovantes »
Le décret n° 2019-152 du 28 février 2019 fixe pour sa part les critères permettant de qualifier les entreprises dites « innovantes ». Selon la circulaire du 28 février 2019, une fois reconnue par le ministre de l’économie, l’entreprise se verra délivrer une attestation qui pourra être fournie au candidat afin qu’il puisse bénéficier de l’extension de la carte de séjour pluriannuelle « passeport talent » prévu par la loi (C. étrangers, art. L. 313-20, 1°). Aux termes du nouvel article D. 313-45-1 du Ceseda, sont visées les entreprises ayant bénéficié :
- d’un des soutiens publics à l’innovation (prévu par l’arrêté NOR : ECOI1906051A du 28 février 2019) ;
- de financements de l’innovation par une personne morale ou un fonds d’investissement alternatif (prévu par l’arrêté NOR : ECOI1906053A du 28 février 2019) ;
- ou d’un accompagnement par une structure dédiée aux entreprises innovantes.
Carte de séjour temporaire « recherche d’emploi ou création d’entreprise »
Les modalités d’octroi de la nouvelle carte de séjour temporaire « recherche d’emploi ou création d’entreprise », désormais accessible aux étudiants diplômés et aux chercheurs, sont calquées sur celles jusqu’alors applicables à l’autorisation provisoire de séjour pour étudiants diplômés, que cette carte remplace (C. étrangers, art. R. 313-11-1 à R. 313-11-4). Il est désormais expressément exigé de l’étranger qu’il justifie d’une assurance-maladie.
Remarque : les anciens étudiants diplômés doivent acquitter une taxe de renouvellement de titre de 30 € (C. étrangers, art. D. 311-18-1).
Par ailleurs, alors que la loi prévoit que l’étranger diplômé qui a quitté la France à l’issue de ses études peut bénéficier de ce titre de séjour dans un délai maximal de quatre ans à compter de l’obtention de son diplôme (C. étrangers, art. L. 313-8, IV), l’article R. 313-11-3 précise la liste des justificatifs à fournir (précédente carte de séjour, diplôme obtenu, assurance-maladie, ressources suffisantes à son séjour et, le cas échéant tout justificatif de son projet de création d’entreprise). L’intéressé devra également acquitter une taxe de première délivrance de titre de 60 € (C. étrangers, art. D. 311-18-1).
Carte de séjour temporaire « jeune au pair »
Les pièces à produire afin d’obtenir la nouvelle carte de séjour temporaire « jeune au pair » (ou un visa de long séjour valant titre de séjour) sont également fixées par l’article. R. 313-12 du Ceseda. Il s’agit de la convention établie entre le jeune et la famille, des documents attestant de la connaissance de la langue française ou du niveau scolaire de l’intéressé, et de la justification d’une assurance-maladie.
Les modèles types de convention et d’annexe, accompagnés d’une notice explicative, sont par ailleurs établis par l’arrêté NOR : INTV1905909A du 4 mars 2019. Ils prévoient notamment l’organisation des activités et des tâches effectuées par le jeune, les modalités de rupture anticipée, les engagements et obligations des signataires. La convention précise également les modalités de repos hebdomadaire (qui garantissent au moins un jour de repos chaque semaine) et la somme minimale versée chaque mois au jeune au pair à titre d’argent de poche (fixée à 320 €).
La taxe à verser au moment de la délivrance du titre est de 60 €, 30 € pour les renouvellements (C. étrangers, art. D. 311-18-1).
Mobilité des étudiants et chercheurs
Les étudiants et chercheurs (ainsi que les membres de la famille pour ces derniers) déjà admis au séjour dans un autre État membre et inscrits dans un programme de mobilité prévu par la directive (UE) 2006/801 du 11 mai 2016 peuvent séjourner en France, après notification par l’établissement d’accueil en France de l’étranger du projet de mobilité au ministre chargé de l’immigration dans les conditions prévues par les arrêtés NOR : INTV1905892A (étudiants) et NOR : INTV1905899A (chercheurs) du 1er mars 2019.
Remarque : ces arrêtés prévoient notamment le moment de la notification, les pièces devant l’accompagner et le délai (trente jours) au-delà duquel un refus ne peut plus être opposé.
Le ministre peut toutefois refuser la mobilité de l’étranger ou la retirer pour l’un des motifs figurant respectivement aux articles R. 313-7-1, s’agissant des étudiants, ou R. 313-54, s’agissant des chercheurs (défaut de documents de voyages, d’assurance-maladie, de ressources, menace à l’ordre public, détournement de l’objet du séjour, etc.).
Raccourcissement du délai d’examen
En raison de la réforme, le délai au-delà duquel, à défaut de décision expresse du préfet, la demande de titre de séjour est considérée comme rejetée (quatre mois en règle générale) est raccourci et passe à quatre-vingt-dix jours pour :
- les cartes de séjour temporaire ou pluriannuelle « étudiant » et « étudiant programme de mobilité » (C. étrangers, art. R. 313-7 et R. 313-75-3) ;
- la carte de séjour temporaire « stagiaire » (C. étrangers, art. R. 313-10-2) ;
- la carte de séjour temporaire « recherche d’emploi ou création d’entreprise » (C. étrangers, art. R. 313-11-4) ;
- la carte de séjour temporaire « jeunes au pair » (C. étrangers, art. R. 313-12).
Ce délai est par ailleurs ramené à soixante jours pour les cartes de séjour pluriannuelle « passeport talent chercheur » ou « passeport talent chercheur – programme de mobilité » (C. étrangers, art. R. 313-53).
Carte de séjour temporaire « visiteur »
La loi du 10 septembre 2018 a durci les conditions d’octroi de la carte « visiteur ». L’article R. 313-6 du Ceseda précise donc que le montant des ressources exigé doit être au moins égal au SMIC net annuel, indépendamment des prestations familiales, du RSA et des allocations de chômage du régime de solidarité.
Remarque : toutefois, lorsque les ressources du demandeur ne sont pas suffisantes, une décision favorable peut être prise si le demandeur justifie être propriétaire de son logement ou en jouir à titre gratuit.
L’étranger doit aussi justifier de la possession d’une assurance-maladie couvrant la durée de son séjour (C. étrangers, art. R. 313-6, 3°).
Admission exceptionnelle au séjour
Un nouveau cas d’admission exceptionnelle au séjour concerne l’étranger accueilli par un organisme d’accueil communautaire et d’activités solidaires (communautés Emmaüs, par exemple) visé à l’article L. 265-1 du code de l’action sociale et des familles, dès lors qu'il justifie de trois années d’activité ininterrompue au sein de cet organisme, du caractère réel et sérieux de cette activité et de ses perspectives d’intégration (C. étrangers, art. L. 313-14-1).
L’article R. 313-25 du Ceseda prévoit que, parmi les pièces que l’étranger doit fournir à l’appui de sa demande de régularisation figure un rapport établi par le responsable de l’organisme d’accueil, portant notamment sur la nature des missions effectuées et leur volume horaire et « les perspectives d’intégration de l’intéressé au regard notamment du niveau de langue, des compétences acquises et le cas échéant, de son projet professionnel ainsi que des éléments tirés de la vie privée et familiale ».
Remarque : la circulaire du 28 février 2019 apporte d’importantes précisions sur la façon dont les préfets pourront user de leur pouvoir d’appréciation et insiste d’emblée sur le fait que « c’est principalement le respect des règles de vie au sein de la communauté qui permettra d’apprécier la situation du demandeur au regard des critères légaux ».
Étrangers malades
L’étranger qui présente une demande de titre de séjour pour raisons de santé sur le fondement de l’article L. 313-11, 11° doit fournir un certificat médical établi par son médecin traitant ou un médecin praticien hospitalier.
Au titre de l’article R. 313-23 modifié, l’étranger dispose désormais d’un délai d’un mois « à compter de l’enregistrement de sa demande en préfecture » pour transmettre à l’Ofii le certificat médical.
Remarque : jusqu’à présent l’arrêté du 27 décembre 2016 prévoyait que le certificat médical, « dûment renseigné et accompagné de tous les documents utiles », était transmis sans délai, par le demandeur, « par tout moyen permettant d’assurer la confidentialité de son contenu », au service médical de l’Ofii.
Si l'étranger est demandeur d’asile, la circulaire du 28 février 2019 précise que la « demande sera regardée comme déposée dans le délai lorsque le certificat médical sera parvenu à l’Ofii dans un délai de trois mois après l’enregistrement de la demande d’asile » (v. p. 3).
Remarque : les dispositions de la loi du 10 septembre 2018 relatives à l’échange d’information entre l’Ofii et les professionnels de santé et la motivation des refus de séjour en cas d’avis contraire de l’Ofii (voir
bull. 281-1, p. 16) ne font l’objet d’aucune précision réglementaire.
Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.
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