Responsabilité médicale : le médecin doit informer sur les risques de l'accouchement

18.07.2016

Droit public

Bien que l'accouchement soit un événement naturel, les médecins ne sont pas dispensés de leur obligation d'information.

Lors d’un accouchement entrepris par voie basse, l’apparition d’anomalies du rythme cardiaque en lien avec une rupture utérine rend nécessaire la réalisation en urgence d’une césarienne. L’enfant naît avec de graves lésions cérébrales en rapport direct avec la rupture utérine.
 
Les parents forment une demande en indemnisation provisionnelle qui est rejetée par le juge des référés. En appel, les juges retiennent  un défaut d’information sur le risque de rupture utérine inhérent à un accouchement par voie basse quand un précédent accouchement a donné lieu à une césarienne (ce qui était le cas en l’espèce), ayant fait perdre une chance d’éviter cette rupture en demandant qu’une césarienne soit programmée.
 
Le pourvoi formé par le centre hospitalier est rejeté. Le Conseil d’Etat énonce tout d’abord que : « la circonstance que l'accouchement par voie basse constitue  un événement naturel et non un acte médical ne dispense pas les médecins de l’obligation de porter, le cas échéant, à la connaissance de la femme enceinte les risques qu’il est susceptible de présenter (...) et les moyens de les prévenir ; qu’en particulier, en présence d’une pathologie de la mère ou de l’enfant à naître ou d’antécédents médicaux entraînant un risque connu en cas d’accouchement par voie basse, l’intéressée doit être informée de ce risque ainsi que de la possibilité de procéder à une césarienne et des risques inhérents à une telle intervention ». La Haute juridiction relève ensuite qu’en l’occurrence le premier accouchement de la patiente s'était fait par césarienne et que, selon l’expert, en pareil cas, l’accouchement par voie basse comporte un risque connu de rupture utérine, qu’un tel accident s’il survient peut avoir de très graves conséquences pour l’enfant et qu’une césarienne réalisée en urgence ne permet pas son extraction dans les plus brefs délais. En conséquence, les juges ont décidé à bon droit que le défaut d’information  avait été à l’origine d’une perte de chance d’éviter le dommage.
 
L’intérêt de cette décision est double. D’une part, le Conseil d’Etat infirme la position de la cour d’appel de Lyon qui avait jugé que l’obligation d’information ne s’applique pas dans le cas d’un accouchement (CA Lyon, 19 avr. 2012, n° 11LY00850) et assigne donc un large domaine à l’obligation d’information. En effet, l’article L. 1111-2 du code de la sant�� publique vise les différentes investigations, traitements ou actions de prévention proposés. Or l’accouchement n’entre pas a priori dans l’une ou l’autre de ces catégories. C’est donc une conception large des « actes médicaux » qui est ici consacrée en matière d’obligation d’information.
 
D’autre part, l’arrêt confirme la qualification de l’accouchement qui ne constitue pas un « acte médical », mais un « acte naturel ». Or cette qualification est importante pour déterminer le domaine d’intervention de la solidarité nationale. En principe, le bénéfice de celle-ci est réservé aux victimes de dommages imputables à des actes médicaux. Il sera donc intéressant de savoir si cette  qualification de l’accouchement fait obstacle, en cas d’aléa thérapeutique, à une éventuelle intervention de la solidarité nationale.

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Catherine Caillé, Maître de conférences à la faculté de droit et des sciences économiques de Tours
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