Rétention : les associations peuvent faire constater les atteintes aux droits par huissier

26.09.2022

Droit public

Pour la Cour de cassation, les associations ayant pour objet de défendre les droits des étrangers peuvent, au titre de l'article 145 du code de procédure civile, demander en référé la désignation d'un huissier afin de faire constater des atteintes aux droits des personnes retenues.

Dans un arrêt du 14 septembre 2022, non publié, la Cour de cassation censure l’arrêt d’une cour d’appel ayant débouté des organisations de défense des étrangers qui demandaient en référé qu’un huissier soit désigné afin de faire constater les conditions de mise à disposition des postes téléphonique dans un centre de rétention. Pour se faire la Cour affirme clairement « qu'un constat d'huissier de justice [...], qui peut être produit, par une personne retenue, devant le juge des libertés et de la détention garant de ses droits, au soutien d'un moyen tiré d'une atteinte à l'exercice effectif de son droit de communiquer, peut être sollicité par une association de défense des droits des étrangers retenus ».

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

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Rejet de la demande d’un constat d’huissier devant les juridictions du fond

En l’espèce, trois associations, l'association des avocats pour la défense du droit des étrangers (l'ADDE), la Cimade et le Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti), et le syndicat des avocats de France, avaient saisi le président d’un tribunal de grande instance (désormais tribunal judiciaire) sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, afin que soit ordonné un constat d'huissier inopiné sur les conditions de mise à disposition de postes téléphoniques dans un centre de rétention administrative.

Remarque : l’article 145 du code de procédure civile dispose que « s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référés ».

Leur requête avait été rejetée aussi bien par le président du tribunal que par la cour d’appel laquelle, dans son arrêt, avait retenu « qu'un procès-verbal de constat d'huissier de justice établissant les conditions d'utilisation des publiphones dans un centre de rétention administrative à un instant donné ne pourrait pas être utilisé ad futurum, de façon efficace, à l'occasion de procédures particulières concernant les retenus devant le juge des libertés et de la détention pour la défense de leurs droits propres ».

Obligation pour le juge de vérifier si la mesure ordonnée est nécessaire à l'exercice du droit à la preuve du requérant

Cassant l’arrêt de la cour d’appel, la Cour de cassation, rappelle qu’au sens de l’article 145 du code procédure civile, « constituent des mesures légalement admissibles les mesures d'instruction circonscrites dans le temps et dans leur objet et proportionnées à l'objectif poursuivi ».

Comme elle le souligne en rappelant sa propre jurisprudence, saisi d'une contestation, il appartient donc au juge « de vérifier si la mesure ordonnée est nécessaire à l'exercice du droit à la preuve du requérant et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence » et cela, sans qu’il puisse être « exigé que le demandeur établisse le bien-fondé de l'action en vue de laquelle la mesure d'instruction est sollicitée ».

Ainsi, pour la Cour de cassation un constat d'huissier de justice, sur l’accès aux postes téléphoniques, notamment, mais plus largement sur les conditions matérielles d’exercice des droits, qui peut être produit, par une personne retenue, devant le juge des libertés et de la détention garant de ses droits, au soutien d'un moyen tiré d'une atteinte à l'exercice effectif de son droit de communiquer, peut donc être sollicité par une association de défense des droits des étrangers retenus.

Christophe Pouly, Avocat
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