Une instruction précise le régime des « dispositifs de préparation au retour »

19.05.2022

Droit public

Dans une instruction du 9 mai 2022, le ministre de l'intérieur précise les modalités d'emploi des dispositifs de préparation au retour (DPAR). L'objectif affiché reste l'éloignement effectif de la personne hébergée, qu'il soit volontaire ou forcé.

Faisant le constat que le dispositif de préparation au retour (DPAR) n’est pas utilisé de manière adaptée, optimale et homogène, une instruction du 9 mai 2022 du ministre de l’intérieur rappelle leur doctrine d’emploi.
 

Droit public

Le droit public se définit comme la branche du droit s'intéressant au fonctionnement et à l’organisation de l’Etat (droit constitutionnel notamment), de l’administration (droit administratif), des personnes morales de droit public mais aussi, aux rapports entretenus entre ces derniers et les personnes privées.

Découvrir tous les contenus liés

Il y détaille le public qui doit y être hébergé en premier lieu et celui pouvant être accueilli en fonction des circonstances, les conditions de cet hébergement ainsi que les relations que doivent entretenir les préfectures avec l’Office français pour l’immigration et l’intégration (Ofii).

Remarque : régulièrement mentionnés dans les schémas d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés (SNADAR) les DPAR ont été mis en place, à la suite de la crise migratoire de 2015, par une circulaire interministérielle du 22 juillet 2015 (Circ. NOR : INTK1517235J, 22 juill. 2015). L’instruction du 9 mai 2022 précise qu’elle s’inscrit à la suite de précédentes instructions (non publiées) datées des 18 janvier et 31 mars 2021 (Instr., 31 mars 2022, NOR : INTV2108042J), qui ont fixé le régime des dispositifs pour la première fois. L’instruction du 9 mai 2022 vient compléter ces textes.

L’instruction souligne que le parc d’hébergement en DPAR a doublé en un an (1 051 places fin 2020 contre 2 063 places fin 2021), les places étant réparties au sein de 32 DPAR dont quatre en région parisienne.

Publics susceptibles d’être hébergés dans le dispositif

Comme le rappelle l’instruction du 9 mai 2022, les DPAR accueillent prioritairement les étrangers éligibles à l'aide au retour volontaire :

  • qui ont manifesté leur volonté d'en bénéficier auprès de l'Ofii ;

  • qui sont susceptibles d'y adhérer.

Remarque : l’objectif est ici clairement affiché : la « mixité des publics vise à convaincre ceux qui n'ont pas encore souscrit à l'[aide au retour volontaire] de le faire, grâce au contact d'étrangers volontaires au retour ». A ce titre également, les agents des directions territoriales de l'Ofii tiennent des permanences hebdomadaires au sein des DPAR pour rechercher l'adhésion des étrangers.

A titre exceptionnel, et sur accord préalable de la direction générale des étrangers en France (DGEF), les étrangers en situation irrégulière qui ne demandent pas cette aide et sont sans domicile peuvent également être pris en charge.

Enfin, en cas de saturation du dispositif national d'accueil (DNA), les DPAR peuvent recevoir les personnes qui sont saisies par des opérations de démantèlement de campements ou de mise à l’abri. Dans ce cas, le pilotage se fait directement par la DGEF. Après examen de leur situation, les personnes concernées, qui n’ont pas vocation à rester se maintenir dans le DPAR, sont orientées vers des structures adaptées.

Rappel de la nécessité de prendre une mesure d’éloignement

Dans son instruction, le ministre de l’intérieur constate que, jusqu’alors, parmi les étrangers accueillis dans le dispositif, certains retournaient dans leur pays d'origine « sans avoir fait l'objet d'une mesure d'éloignement ».

Or il rappelle que, volontaires au retour, susceptibles de l'être, ou non volontaires, « tous les étrangers hébergés doivent faire l'objet d'une mesure d'éloignement exécutoire, présenter des perspectives raisonnables d'éloignement et être physiquement en état de voyager ».

Par conséquent, si un étranger demande à l’Ofii l’aide au retour volontaire avant même d’avoir fait l’objet d’une telle mesure, l’Office doit se rapprocher de la préfecture pour qu’une obligation de quitter le territoire soit prise.

Passage du caractère volontaire du retour à l’éloignement forcé

De fait, selon la philosophie qui sous-tend le dispositif, toute personne admise dans le DPAR doit être éloignée et la contrainte doit prendre le relais du caractère volontaire si l’étranger venait à changer d’avis.

Remarque : l’instruction insiste encore ici sur le fait que l’autorité administrative doit s’assurer, préalablement à l’admission dans le dispositif, de la possibilité de mettre en œuvre un éloignement contraint.

Aussi, selon le ministre, il convient d’engager une procédure de retour forcé si l’étranger qui a été admis dans le dispositif de préparation au retour :

  • se désiste de sa demande d’aide au retour volontaire ;

  • ne demande pas cette aide pas dans les quinze jours qui suivent son admission ;

  • fait obstruction à la délivrance des documents d’identité et de voyage.

Changement des modalités d’assignation à résidence

Dans son instruction, le ministre de l’intérieur souligne que les retours d'expérience des préfectures et des directions territoriales de l'Ofii ont démontré que la pratique (prévue par les instructions antérieures) consistant à prendre de manière systématique un arrêté d'assignation à résidence lorsque l'étranger est volontaire au retour ou susceptible de l'être pouvait s'avérer « contre-productive ».

Désormais, c’est donc seulement le « changement de situation » (du caractère volontaire du retour au caractère contraint de l’éloignement, v. plus haut) qui doit être matérialisé par la notification d'un arrêté d'assignation à résidence au sein du DPAR.

Remarque : en cas de manquement de l'étranger à ses obligations résultant de l'arrêté d'assignation à résidence, le préfet peut recourir à la visite domiciliaire, prévue à l'article L. 733-8 du Ceseda.

Procédure d’admission dans le dispositif

Une fois qu’il a identifié un étranger susceptible d'adhérer à l'aide au retour volontaire, le préfet décide de son admission dans le dispositif, après avis de la direction territoriale de l’Ofii.

Remarque : le ministre estime que les publics éligibles « sont à rechercher, en priorité, parmi les demandeurs d'asile déboutés et les familles en situation irrégulière, notamment lorsqu'elles sont accompagnées de mineurs ».

De son côté, l’Ofii informe le préfet des demandes qu’il reçoit tendant au bénéfice de l’aide au retour volontaire formulée par les personnes suivies dans le cadre du dispositif national d’accueil (c’est-à-dire principalement les demandeurs d’asile déboutés), afin de vérifier, notamment, qu’une mesure d’éloignement a bien été prise.

Un contrat d’hébergement est alors présenté à la signature de la personne concernée.

Mise en place d’un contrat d’hébergement

A la demande des gestionnaires des centres et « afin de préciser les droits et obligations de l'étranger » et les prestations de l'opérateur, un contrat d'hébergement (dont le modèle est joint en annexe) a en effet été mis en place et doit désormais être signé lors de l'admission de l’étranger.

Ce contrat précise :

  • qu’en cas de projet de retour aidé les démarches administratives en lien avec l’Ofii doivent être engagées ;

  • que l'adhésion au retour aidé, si l'aide n’a pas été demandée au préalable, doit être, sous peine de mise en œuvre d’un éloignement forcé, être recueillie dans un délai de quinze jours.

Il détaille également :

  • les modalités à respecter de la part de l’étranger (respect du règlement, entretien des parties privées et communes, participation aux activités d’animation et d’information, information du gestionnaire en cas de départ du DPAR, respect des obligations liées à l’assignation à résidence éventuellement prononcée) ;

  • les situations ayant pour conséquence la fin de prise en charge (départ effectif du territoire, abandon volontaire de l’hébergement, comportement violent ou manquement grave au règlement).

Fin de la prise en charge

Enfin, au titre de la fin de la prise en charge, l’instruction précise que :

  • la durée d'hébergement ne peut dépasser quatre-vingt-dix jours. Au-delà, une perspective d'éloignement, « à brève échéance, grâce à l'obtention d'un laissez-passer consulaire valide ou d'un routing », est nécessaire ;

  • si le retour volontaire ou contraint ne peut aboutir, l'étranger doit, dans un délai de quinze jours, faire l'objet d'une décision de fin de prise en charge et quitter le DPAR ;

Remarque : en cas de présence indue au-delà de ce délai, l'expulsion des lieux ne peut intervenir que sur le fondement d'une décision de justice.

  • si l’étranger quitte le dispositif alors qu’il est sous le coup d’une assignation à résidence, « le risque de fuite est caractérisé », ce qui peut justifier le placement en rétention administrative.

Christophe Pouly, Avocat
Vous aimerez aussi

Nos engagements