La gauche est peu loquace sur le compte pénibilité. Benoît Hamon, reste flou mais entend "le renforcer". À droite, on veut le supprimer et passer au cas par cas, sur avis médical. Quant à Emmanuel Macron, chagriné par l'aspect "doloriste" ; il garde l'idée du dispositif mais renvoie à une négociation dans les branches.
Il "n'aime pas le terme". Trop "doloriste". Pour Emmanuel Macron, la pénibilité "induit que le travail est une douleur" et cela "ne correspond pas à ce dont nous avons besoin parce que le travail c'est l'émancipation, c'est ce qui vous donne une place", a-t-il prêché cette semaine devant le Medef. On pourrait lui rappeller, comme l'ont presque aussitôt fait les réseaux sociaux, l'étymologie de "travailler". Le mot vient du latin "tripaliare", ce qui signifie littéralement "tourmenter, torturer avec le 'trepalium'", un instrument de torture, ou plus exactement un appareil à ferrer les bœufs. Mais refermons le dictionnaire et prenons le code du travail. Le candidat d'"En Marche !" entend supprimer, ou du moins "suspendre" le compte pénibilité, tout en affirmant être "favorable à la philosophie [du C3P], parce que c'est juste". Sa solution face à des "critères pas applicables en l'état" ? Renvoyer au "dialogue social par branches, qui en définira les modalités pour un premier temps". "S'il y a de l'obstruction des organisations patronales, je regarderai branche par branche", avait-il promit devant la CFDT quelques jours plus tôt, évoquant une réforme des retraites avec un "système de bonus-malus" pour prendre en compte les travaux les plus pénibles.
Marine Le Pen et Jacques Cheminade, le candidat de "Solidarité et progrès" eurosceptique et souverainiste, partagent la même vision. Ils veulent que la pénibilité soit constatée par un avis médical individualisé. Puisque le C3P est selon elle "inapplicable dans sa forme actuelle", la candidate du Front national le remplacerait par "un nouveau dispositif reposant sur une évaluation personnalisée grâce à une médecine du travail qui sera reconstituée". Une "majoration des annuités de retraite" compenserait ainsi "la pénibilité constatée". Jacques Cheminade est plus précis, prévoyant des "situations de pénibilité" établies par les médecins du travail, "assistés par les inspecteurs", "au cas par cas et sur la base de leur expérience, sans une surcharge de critères qui entraîne les contestations". Auparavant, une "commission tripartite État/salariés/employeurs" aura déterminé, métier par métier, ceux qui "justifient un départ anticipé" à la retraite, "en fonction de l'espérance de vie qui leur est attachée".
HSE
Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement.
François Fillon rejoint les positions de ses deux adversaires, mais il reste flou, sur ce sujet qu'il connaît pourtant bien, puisque c'est son gouvernement qui a défini les 10 facteurs de pénibilité, avec des seuils d'exposition, lors de la réforme des retraites de 2010. Un départ à la retraite anticipé à 60 ans avait alors été rendu possible pour ceux exposés aux facteurs de pénibilité et justifiant d'une IPP (incapacité permanente partielle), sous certaines conditions. N'ayant réussi à englober que très peu de bénéficiaires, l'échec de ce dispositif – décrié côté syndical comme étant "trop restrictif", "médicalisé" et "anecdotique" (voir notre article) – a poussé à la création du compte pénibilité fin 2013. Aujourd'hui, au-delà de la suppression du C3P, l'ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy reste dans des formules vagues et semble vouloir revenir en arrière. Dans son programme, il superpose pénibilité, inaptitude et incapacité. François Fillon affirme vouloir "traiter la pénibilité par l'amélioration des conditions de travail, une politique de prévention plus ambitieuse et une prise en compte de la situation réelle des salariés notamment à travers un examen médical individuel, permettant une meilleure reconnaissance de l’incapacité au travail et de l’inaptitude".
Et du côté de la gauche ? On y est finalement peu loquace sur cette mesure emblématique de la réforme des retraites de François Hollande, qui n'aura eu de cesse d'alimenter d'autres projets de loi pour glisser des mesures de simplification. Nathalie Arthaud, qui court pour Lutte ouvrière, répète que "la pénibilité ne date pas d'hier" et dénonce la dureté des conditions de travail d'aujourd'hui, mais aucun dispositif de prise en compte n'est concrètement entrevu dans son programme. "C'est du pipeau complet", avait déclaré Philippe Poutou, candidat du NPA, lors de la réforme des retraites, à propos du compte pénibilité. Pour lui, la seule façon de tenir compte de la pénibilité, c'est de prévoir des départs à la retraite anticipés à 55 ans, et de réduire le temps de travail des travaux pénibles, une position aussi défendue par Jean-Luc Mélenchon (voir notre article). C'était entre lui et Benoît Hamon une des divergences de points de vue qui ont empêché leur rapprochement. "Le compte pénibilité est une escroquerie" clame Jean-Luc Mélenchon, n'y voyant pas toujours pas des départ à la retraite anticipés suffisants. Benoît Hamon est donc le seul candidat à vouloir "renforcer le compte pénibilité", "pour que chacun puisse bénéficier d’une même durée de retraite en bonne santé". Mais il ne donne pas davantage corps à cette prise en compte.
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