Abrogation des conventions collectives territoriales de la métallurgie : la voie de la révision-extinction est validée

Abrogation des conventions collectives territoriales de la métallurgie : la voie de la révision-extinction est validée

05.10.2023

Convention collective

Par avenant de révision-extinction, les partenaires sociaux peuvent valablement mettre fin à l'application d'une convention collective de branche. À condition toutefois, exige la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 4 octobre dans le cadre de la restructuration de la branche professionnelle de la métallurgie, que cette extinction ne conduise pas à un vide conventionnel.

Selon les propres mots de la Cour de cassation, l'arrêt rendu ce mercredi, relatif à l'abrogation des dispositions de la convention collective territoriale des industries métallurgiques de Savoie, est un arrêt "important". En premier lieu parce que ce dernier ouvre au patronat et aux syndicats une nouvelle voie juridique pour mettre fin aux dispositions d'une convention collective à durée indéterminée. Mais aussi en ce qu'il sécurise l'entrée en vigueur le 1er janvier prochain de la nouvelle convention collective nationale de la métallurgie.

Abrogation des CC territoriales et application de la CCN unique de la métallurgie : la méthode en question

Pour rappel, depuis la conclusion de la nouvelle CCN de la métallurgie le 7 février 2022, 70 des 76 conventions collectives territoriales et sectorielle de la métallurgie ont fait l’objet, par avenant, d’une abrogation à compter du 1er janvier 2024 (date retenue pour l’entrée en vigueur de la CCN unique). S’agissant en particulier des industries métallurgiques de Savoie, l’UIMM, la CFDT, FO et la CFE-CGC ont conclu le 9 février 2022 un avenant de "révision-extinction" de l’ensemble des dispositions conclues dans le cadre de la CC territoriale du 29 décembre 1975 étendue.

La CGT saisit alors la justice afin d’obtenir l’annulation de cet avenant d’abrogation de la CC territoriale. Le syndicat minoritaire et non signataire soutient que la disparition d'une convention collective est légalement limitée à deux seuls cas : sa dénonciation ou sa mise en cause. Par un arrêt du 24 novembre 2022, la cour d’appel de Chambéry donne d'abord raison à la CGT. "Aucune disposition du code du travail ne prévoit que la révision peut porter sur la disparition ou l'abrogation totale d'un accord collectif, retiennent les juges. Il en résulte que la procédure de révision est relative aux modifications des conventions collectives ou des accords collectifs et non de leur extinction". L'UIMM se pourvoit immédiatement en cassation.

Convention collective

Négociée par les organisations syndicales et les organisations patronales, une convention collective de travail (cct) contient des règles particulières de droit du travail (période d’essai, salaires minima, conditions de travail, modalités de rupture du contrat de travail, prévoyance, etc.). Elle peut être applicable à tout un secteur activité ou être négociée au sein d’une entreprise ou d’un établissement.

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La voie de l'avenant de révision-extinction validée, sous condition

Dès lors, est-il possible d'admettre la voie négociée d'un avenant de révision-extinction pour mettre fin à une convention collective de branche ? De l'aveu même de la Cour de cassation, "il est certain que le législateur n'a envisagé explicitement l'extinction d'un accord collectif à durée indéterminée que par la voie de la dénonciation ou celle de sa mise en cause". Néanmoins, au regard notamment de la valeur constitutionnelle reconnue à la liberté contractuelle en matière de négociation collective, la Haute Cour répond positivement à cette question inédite : "Les partenaires sociaux sont en droit de conclure (...) un avenant de révision d'un accord collectif de branche à durée indéterminée mettant fin à cet accord, dès lors que cette extinction prend effet à compter de l'entrée en vigueur d'un autre accord collectif dont le champ d'application couvre dans son intégralité le champ professionnel et géographique de l'accord abrogé par l'avenant de révision".

La voie juridique empruntée par les partenaires sociaux de la très grande majorité des conventions collectives territoriales de la métallurgie est ainsi validée, mais aussitôt encadrée : "Il n'est pas envisageable qu'un avenant de révision abroge un accord collectif sans dispositif conventionnel de remplacement, prévient la Cour de cassation dans son rapport. Une révision-extinction conduisant à un vide conventionnel conduirait à éluder les garanties légales prévues en cas de dénonciation, particulièrement le mécanisme de survie temporaire de l'accord dénoncé et de garantie individuelle de rémunération pour les salariés". Sur ce dernier point, la Cour de cassation entend répondre directement aux craintes exprimées par la CGT dans le cadre de ce contentieux.

Une jurisprudence sur-mesure en vue de l'entrée en vigueur de la nouvelle CCN de la métallurgie

Statuant au fond et sans renvoi, les magistrats valident l'avenant de révision-extinction de la CC territoriale de la Savoie, dont l'entrée en vigueur est identique à celle de la nouvelle CCN de la métallurgie et ne laissera donc aucun vide conventionnel au 1er janvier 2024. Les partenaires sociaux de la métallurgie ayant pris soin de rédiger à l'identique tous les avenants de révision-extinction territoriaux, cette jurisprudence apparaît conforter la validité de ces derniers et mettre fin à tout débat encore en cours localement.

A un peu moins de trois mois de l'entrée en vigueur de la nouvelle CCN de la métallurgie, cet arrêt tombe à point nommé pour l'UIMM qui n'aura donc pas à engager en urgence des procédures de dénonciation des nombreuses CC territoriales au sein de la branche.

Julien François
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