Apprentis : quelle est la procédure pour que la VIP soit faite par un médecin de ville ?

Apprentis : quelle est la procédure pour que la VIP soit faite par un médecin de ville ?

19.11.2019

HSE

En théorie, un employeur qui veut embaucher un apprenti n'ayant pas besoin d'examen d'aptitude, peut faire passer la visite d'information et de prévention chez un médecin de ville. Et un service de santé au travail débordé peut se décharger de ces visites. Mais en pratique, ce n'est pas simple. Ni pour l'employeur, ni pour le service de santé au travail. En dépit du peu d'engouement des SSTI et médecins sur le terrain pour ce dispositif expérimental, la DGT en précise la marche à suivre dans une instruction.

Depuis quelques mois, des travailleurs peuvent pour la première fois passer leur visite médicale d'embauche – la désormais dénommée VIP (visite d'information et de prévention) – chez un médecin de ville, généraliste ou spécialiste. Les travailleurs bêta-testeurs de cette solution, expérimentée jusqu'à fin 2021, ce sont les apprentis, qu'ils soient mineurs ou majeurs, qu'ils travaillent dans le public ou le privé, dès lors qu'ils n'ont pas besoin d'un SIR, suivi individuel renforcé. On sait pourtant que les jeunes de moins de 25 ans ont 2,5 fois plus de risques d'être victimes d'un accident du travail et que la prévention est auprès d'eux particulièrement importante.

 

► Lire aussi : 

Les apprentis embauchés à partir du 30 avril ne seront plus obligés de voir le médecin du travail

 

Seules exceptions : ces apprentis ne doivent pas relever de l'enseignement agricole ni du secteur maritime, et ne pas être affectés à un poste à risque ou à des travaux réglementés (par exemple en cas d'exposition à des agents chimiques dangereux, pour monter des échafaudages, ou encore s'ils conduisent des charriots élévateurs). Ils doivent dans ce cas avoir un examen médical d'aptitude au lieu de la VIP.

La VIP d'embauche de l'apprenti doit avoir lieu dans les deux premiers mois pour les plus de 18 ans, et avant l'affectation au poste pour les plus jeunes.

 

Attention, la VIP lors de l'embauche est le seul rendez-vous du suivi médical de l'apprenti qui peut être réalisé par un médecin de ville.

Une visite de reprise après un arrêt de travail, par exemple, ne pourra pas rentrer dans le cadre de l'expérimentation.

 

Une instruction de la DGT  vient compléter et préciser le décret du 28 décembre 2018 et l'arrêté du 24 avril 2019.

 

Que doit faire l'employeur ?

► Pour organiser la visite

Pour l'employeur, ce n'est pas forcément plus simple de faire passer la VIP de l'apprenti qu'il veut embaucher à un médecin de ville plutôt qu'au service de santé au travail. D'abord parce qu'il doit dans tous les cas se tourner en premier lieu vers son service de santé au travail (service autonome ou interentreprises), au plus tard à la date d'embauche de l'apprenti. Il doit alors attendre 8 jours pour avoir un retour du service lui indiquant si la visite pourra ou non avoir lieu dans les temps.

 

Attention, si l'apprenti que souhaite embaucher l'employeur est le premier salarié de l'entreprise – une situation fréquente dans le BTP, notamment –, l'expérimentation de la VIP avec un médecin de ville ne le dispense pas d'adhérer à un SSTI.

Ce n'est qu'une fois qu'il aura réglé sa cotisation qu'il pourra suivre le parcours ici décrit.

 

L'employeur pourra envisager l'option du médecin de ville uniquement si la réponse est négative ou s'il n'a pas de réponse sous huit jours. Il devra alors à nouveau contacter le service de santé au travail pour l'en informer. Impossible de gagner du temps en sautant cette étape, car la VIP se fera en priorité avec un médecin de ville ayant signé une convention avec le service de santé au travail. À notre connaissance, aucune convention ne serait pour l'instant signée.

Ce n'est que s'il n'y a aucune convention ou que le médecin conventionné n'est pas disponible que l'employeur peut décider du médecin. S'il choisit le médecin traitant de l'apprenti, il doit d'abord recueillir l'accord de celui-ci ou de ses parents s'il est mineur.

► Avant la visite

Toutes les conditions sont remplies, rendez-vous est pris avec un médecin de ville pour assurer la VIP de l'apprenti. Mais pour l'employeur, les contraintes d'une telle option ne s'arrêtent pas là.

"Le médecin […] doit pouvoir réaliser la visite d’information et de prévention dans les mêmes conditions que celles qui auraient présidé à la visite assurée par le service de santé au travail." Pour ce, l'employeur doit transmettre au médecin la fiche de poste de l'apprenti, le DUER et les mesures de prévention mises en œuvre, les coordonnées du service de santé au travail et le modèle d'attestation à remplir. Il devra aussi lui fournir un exemplaire du protocole que le médecin du travail établit, depuis la réforme de 2016, afin que les infirmiers ou collaborateurs médecins du service puissent mener les VIP (protocole mentionné au L. 4624-1 du code du travail).

En cas de rendez-vous avec un médecin conventionné – ce qui ne semble pas encore exister –, c'est le service de santé au travail qui se charge d'envoyer tous ces documents.

L'employeur doit se charger de l'information de l'apprenti, à qui il remet simplement l'annexe 2 de l'instruction de la DGT, c'est-à-dire un document expliquant brièvement ce qu'est la VIP.

À l'issue de la visite, l'employeur reçoit, sous huit jours, l'attestation de suivi dûment complétée par le médecin qui a mené la VIP.

 

Rappel des 5 objectifs auxquels doit, au minimum, répondre la VIP : 

  • Interroger le salarié sur son état de santé ;
  • L'informer sur les risques éventuels auxquels l'expose son poste de travail ;
  • Le sensibiliser sur les moyens de prévention à mettre en œuvre ;
  • Identifier si son état de santé ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers le médecin du travail ;
  • L'informer sur les modalités de suivi de son état de santé par le service de santé au travail et sur la possibilité dont il dispose, à tout moment, de bénéficier d'une visite à sa demande avec le médecin du travail.
 
Que doit faire le service de santé au travail ?

La DGT insiste, dans son instruction : "en tout état de cause, le suivi de l’état de santé de l’apprenti reste de la responsabilité du service de santé au travail dont dépend l’employeur". Il incombe ainsi au service d'ouvrir le DMST (dossier médical en santé au travail) de l'apprenti et de veiller à ce qu'y figurent tous les documents nécessaires (fiche de poste, copie de l'attestation de suivi, etc.). Après la visite d'embauche, c'est le service de santé au travail qui assurera le suivi médical de l'apprenti.

► Pour organiser la visite

Lorsqu'il reçoit une demande d'un employeur adhérent – ou d'un employeur qui adhère lors de cette première demande – pour une VIP d'embauche d'apprenti, la première chose que doit faire le SSTI est de vérifier que "l'apprenti entre dans le champ d'application de l'expérimentation" et ne relève donc pas d'un suivi individuel renforcé, qui nécessite un examen d'aptitude avec le médecin du travail. Idem, précise la DGT, "dans l’hypothèse où l’apprenti est amené à occuper plusieurs postes de travail et que l’un d’eux relève d’un suivi individuel renforcé de son état de santé" : l'examen d'aptitude est alors incontournable. 

Ensuite, le SSTI a 8 jours pour répondre "par tout moyen donnant date certaine". On distingue trois cas de figure.

  • Si le service peut se charger de la visite dans les temps (avant la prise de poste ou dans les deux mois après embauche, selon les cas), il doit fixer immédiatement le rendez-vous à l'apprenti.
  • S'il peut se charger de la visite sous deux mois, mais pas dans les temps pour la prise de poste alors qu'il s'agit d'un apprenti mineur, il en informe l'employeur. Celui-ci peut décider de s'adapter, ou bien de basculer dans la procédure pour voir un médecin de ville.
  • S'il ne peut pas se charger de la visite : il en informe l'employeur et lui indique, le cas échéant, la liste des médecins de ville avec lesquels une convention a été signée.

Si le SSTI travaille avec des médecins conventionnés, il lui revient, avant la date prévue de la visite avec le médecin de ville, d'envoyer à ce dernier tous les documents nécessaires (fiche de poste, DUER, protocole, etc.) – à condition, précise la DGT, que l'employeur ait bien communiqué ces éléments à son service de santé au travail. Il n'est pas précisé comment faire dans le cas inverse ; la responsabilité en incombe alors sans doute à l'employeur, mais il appartient aussi au service de le relancer.

► Pour "accompagner" les médecins de ville qui vont se charger des visites

"En application des textes encadrant cette expérimentation, les services de santé au travail doivent conclure une convention avec un ou plusieurs médecins [de ville]", écrit le ministère du travail, qui fournit un modèle de convention en annexe de l'instruction.

 

Attention, fait remarquer la DGT, quand un service de santé au travail passe une convention avec un médecin de ville, "il ne saurait s'engager à lui adresser un nombre minimum d'apprentis".

 

En signant la convention, le SSTI doit s'engager à organiser des "actions de sensibilisation et d'accompagnement à destination du médecin signataire", tant avant la toute première VIP – pour lui en expliquer "le contenu et les modalités"  que dans les mois suivants, périodiquement. Ces actions doivent être décrites dans la convention, dont une copie doit être envoyée à la Direccte. Encore une fois, à notre connaissance, aucun SSTI n'aurait engagé une telle démarche.

 

Qui paye les 37,50 euros de la visite ?

Le tarif de la VIP réalisée par un médecin de ville a été fixé à 37,50 euros (tarif calculé au 1er mai 2019). Qui doit s'en acquitter ?

En aucun cas il ne peut revenir à l'apprenti de payer ni même d'avancer la somme.

Le médecin qui assure la visite devra adresser sa facture au service de santé au travail dont dépend l'employeur, et c'est le service qui est débiteur.

S'il s'agit d'un service autonome, le chèque est signé de l'employeur.

S'il s'agit d'un service interentreprises auprès duquel l'employeur est à jour de ses cotisation, le SSTI règle directement la note. En cas de défaut de cotisations, cela sera sans doute l'occasion d'enclencher une procédure de régularisation.

 

Secret médical et secrets de fabrication

Le médecin de ville maniera-t-il bien le secret lié aux spécificités de la médecine du travail ?

La DGT précise en note de bas de page, que le secret médical "porte sur toutes les informations reçues" par le médecin via les documents tels que la fiche de poste ou le DUER, "y compris les éventuels secrets de fabrication […] concernant les produits auxquels l'apprenti peut être exposé sur son poste de travail".

 

Indicateurs de suivi pour l'expérimentation

Le ministère du travail profite de l'instruction, adressée aux Direccte, pour lister les indicateurs chiffrés qui doivent lui être remontés afin d'évaluer cette expérimentation, en place jusqu'à fin 2021.

Au 1er septembre 2020 (puis 2021), chaque région devra ainsi pouvoir dire : combien de services de santé au travail et de médecins de ville ont conclu une convention, combien de VIP d'apprentis ont été faites par un médecin de ville / par un service de santé au travail, combien d'apprentis ont été réorientés vers le médecin du travail par le médecin de ville, etc.

 

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

Découvrir tous les contenus liés
Élodie Touret
Vous aimerez aussi