Cinq questions sur le test antigénique en entreprise

Cinq questions sur le test antigénique en entreprise

15.11.2020

HSE

Outil de prévention secondaire s'il est réalisé régulièrement, de prévention tertiaire si on le dégaine en cas de cluster, à quoi sert le test antigénique en entreprise ? Comment s'y prendre ? Avec l'aide de quels professionnels ? À quelles conditions ?

Pendant longtemps, les autorités sanitaires ont déconseillé les campagnes de dépistage du SARS-CoV-2 en entreprise. Elles ont changé de discours il y a quelques jours, sans doute parce que la crainte d'un engorgement des laboratoires d'analyse s'atténue avec l'arrivée des tests antigéniques. 

► Qu'est-ce que le test antigénique ? 

Comme le test PCR, le test antigénique consiste en un prélèvement par voie nasale avec un écouvillon. Un prélèvement moins invasif sera peut-être possible prochainement. Son avantage : le résultat, indicatif, est disponible en 15 à 30 minutes, notamment parce qu'il est plus facile à lire. Les mesures d'isolement en cas de positivité peuvent donc être prises plus rapidement. Le test antigénique permet de détecter les protéines que produit le virus : les antigènes. Il cherche à déterminer si la personne est infectée au moment du test. Il se distingue en cela du test sérologique, qui cherche à savoir si le patient a été porteur du virus. 

Les tests antigéniques sont moins sensibles que les tests PCR, c'est-à-dire que leur capacité à repérer le virus en très petite quantité est plus faible. Leur efficacité varie d'un test à l'autre. La HAS (Haute autorité de santé) recommande, dans une publication du 8 octobre 2020, de n'utiliser que ceux à la sensibilité d'au moins 80 % et à la spécificité (la capacité à définir qu'il s'agit bien du virus SARS-CoV-2) d'au moins 99 %. 

► Dans quels cas une campagne de tests en entreprise est-elle pertinente ?

La HAS reconnait l’intérêt de l’utilisation des tests antigéniques dans le cadre d’opérations de dépistage à large échelle ciblant des populations "au sein desquelles le risque d'infection est plus important qu’en population générale". Elle précise que "cela peut recouvrir des populations qui vivent, étudient ou travaillent dans des lieux confinés qui favorisent la transmission du virus à un grand nombre de personnes". Et de donner en exemples les universités et les abattoirs. "L’objectif est de débusquer les clusters", indique la HAS.

Laurent Eecke, directeur de deux SSTI (services de santé au travail interentreprises) en Dordogne et en Corrèze, opine. "Cela relève de la prévention secondaire : en amont, avant que le problème ne soit là, il peut être rassurant d'ajouter une politique de testing à toutes les autres mesures de prévention", pense-t-il.

Mais il insiste : cette idée est surtout pertinente dans les milieux de travail confinés où les gestes barrières ne peuvent pas être respectés. Aussi, "pour être tranquille, il faudrait le faire tous les sept jours". Apparemment, certaines entreprises s'y astreignent. Medicalib, qui propose d'organiser des dépistages en entreprise, nous donne l'exemple d'une "grande enseigne de distribution" qui mobilise régulièrement, pour cela, une vingtaine d'infirmiers sur ses sites "partout en France". 

Certains employeurs pourraient être tentés d'utiliser cet outil si un cas de covid-19 est relevé dans les effectifs, voire si l'entreprise abrite un cluster. Cela ne relèverait que de la prévention tertiaire. De plus, en cas de cluster, l'employeur doit, de toute façon, contacter l'Agence régionale de santé avec qui il devra, a priori, collaborer pour identifier des personnes ayant été en contact avec la personne malade et organiser une campagne de dépistage que les autorités piloteront.

 

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► Comment s'y prendre concrètement ? 

Le ministère de la santé donne une liste des tests antigéniques. C'est à l'entreprise qui choisit de faire la campagne de tests de s'équiper. Ensuite, le prélèvement ne peut être réalisé que par certains professionnels (médecin, infirmier, kiné...) formés. Des entreprises privées proposent leurs services pour réaliser les prélèvements. Medicalib en fait partie. Son cofondateur Nicolas Baudelot témoigne : "Nous recevons de plus en plus de demandes, une vingtaine par jour en ce moment. Nous sommes contactés par des entreprises de toutes tailles". 

Quid du rôle du service de santé au travail ? "Il n'y a plus d’ambiguïté, l'administration a été claire : la soft law nous dit qu'on peut y aller", estime Laurent Eecke qui renvoie au protocole sanitaire. Pour le moment, bien qu'ils se tiennent prêts - le personnel est formé depuis le printemps -,  les deux services qu'il dirige n'ont réalisé aucune campagne.

"Nous ne sommes pas testeurs réels mais nous pilotons". Ses services ont été sollicités pour conseiller l'organisation de telles campagnes. L'occasion pour les médecins du travail de juger de la pertinence de l'opération et d'analyser ses modalités. "J'ai en tête, par exemple, un employeur qui prévoyait de ne tester que les salariés d'une aile de son bâtiment, alors que le médecin lui a fait remarquer qu'il y avait des interactions entre les deux ailes et donc qu'il fallait mieux tester les effectifs des deux parties". Du côté de Medicalib, on nous indique que le protocole sanitaire d'intervention est toujours validé par la médecine du travail. En revanche, plus rien au moment des résultats. 

Attention, l'employeur ne peut que proposer ce test aux salariés volontaires, il ne peut pas l'imposer. 

► Qui paye et combien ? 

Cette action (fourniture des tests et réalisation du prélèvement, donc) doit intégralement être financée par l'employeur, indique le ministère du travail dans le protocole daté du 29 octobre. Les tests s'achètent environ 8 euros. Il faut à cela ajouter l'acte de prélèvement. 

La région Sud (anciennement Paca) équipe gratuitement en tests antigéniques les TPE qui le souhaitent, à certaines conditions (où le taux d'incidence est très élevé et si un salarié est positif ou cas contact avéré).

Au delà de l'équipement, l'action du prélèvement peut, a priori, être prise en charge par le SSTI. "On peut considérer cela comme une action en milieu de travail, elle peut donc être comprise dans la cotisation", défend Laurent Eecke. 

► Que faire ensuite ? 
Le secret médical doit être préservé. Ainsi, "aucun résultat ne peut être communiqué à l’employeur ou à ses préposés", prévient le gouvernement dans le protocole sanitaire. Sur son site, l'Assurance maladie explique qu'un document de traçabilité écrit du résultat du test (qu’il soit positif ou négatif) est complété par le professionnel de santé et remis au patient. La Cnam indique la démarche à suivre (selon la doctrine en vigueur le 9 novembre) en cas de résultat positif : le malade doit s’isoler immédiatement, il doit ensuite contacter son médecin traitant. L'investigation des personnes contact est ensuite lancée. 

 

Les tests sérologiques ne sont pas concernés
"S’agissant des tests sérologiques, les indications définies par les autorités sanitaires à ce stade ne permettent pas d’envisager des campagnes de tests sérologiques par les entreprises", lit-on dans les versions du 29 octobre et 13 novembre du protocole sanitaire. Les tests sérologiques ne permettent pas de dépister une personne infectée, mais uniquement de savoir si elle a déjà été infectée. Or, on sait maintenant que l'on peut être malade plusieurs fois (rechute ou réinfection selon les cas). 

 

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Pauline Chambost
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