Le ralentissement de l’économie et plus encore l’effondrement inédit du transport routier avec les mesures de confinement génèrent une baisse sensible de la pollution de l’air. Une bonne nouvelle, mais aussi un terrain d’expérimentation pour mieux comprendre l’origine des particules. Et modéliser pour demain des hypothèses de réduction à la source de certaines émissions.
De l’Inde où l’on voit à nouveau les sommets de l’Himalaya aux capitales européennes, le monde respire à nouveau. Au-delà de ses conséquences dramatiques, le covid-19 génère une amélioration de la qualité de l’air qui n’a rien d’anodine tant on discute depuis un mois de l’impact que la pollution pourrait avoir sur la vigueur de la crise sanitaire. S’il est indéniable qu’une "exposition chronique est susceptible de fragiliser le système respiratoire et donc de faciliter l’apparition de pathologies […], aucun lien de cause à effet n’a été démontré à ce stade entre pollution de l’air et du virus", estime le président du Conseil national de l’air Jean-Luc Fugit, qui en appelle à la poursuite des recherches. En attendant, cette respiration est la bienvenue. Et ce d’autant plus qu’elle devrait avoir des effets insoupçonnés sur notre capacité à modéliser les politiques publiques que nous pourrions être tentés de mettre en œuvre après la crise.
En France, c’est la conclusion à laquelle est arrivé l’Ineris (institut national de l’environnement et des risques) grâce à son système de prévision Prév’air. Utilisé pour prédire et cartographier les concentrations de polluants, l’outil existe depuis 2003. Il n’avait pourtant jamais été soumis à un tel choc, "inédit par son ampleur et sa durée", note Laurence Rouil, responsable de pôle à la direction des risques chroniques de l’institut. Le ralentissement soudain de l’économie et la suppression d’une bonne partie du trafic routier sont une occasion unique de tester et de peaufiner en conditions réelles les modèles de prévision.
Souhaitant partager ses résultats, l’Ineris a par ailleurs développé un nouveau service web permettant de visualiser quotidiennement les effets du confinement sur les concentrations de dioxyde d’azote (en chute libre) et de particules. Conçu pour la France, il vient d’être étendu à l’Europe entière pour le compte du service de surveillance de l'atmosphère Copernicus.
HSE
Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement.
Dans les deux cas, l’utilisateur peut étudier le "cas de référence", c’est-à-dire la prévision de pollution qu’il y aurait en temps normal. Puis le scénario "confinement" pour lequel l’Ineris a fait une série d’hypothèses : baisse de 70 % des déplacements routiers des particuliers, de 20 % pour le trafic commercial, de 90 % pour le non routier (trains, avions) et de 30 % pour l’activité industrielles. A contrario, le chauffage résidentiel est considéré 20 % au-dessus de la normale. L’application présente enfin les différences entre les deux modélisations.
Depuis quelques jours, un troisième outil offre à chacun la possibilité de définir lui-même son scénario de réduction d’émissions. De quoi permettre aux décideurs locaux de modifier les hypothèses de l’institut suivant ce qu’ils pensent être la réalité du jour. Mais aussi de regarder ce qui pourrait se passer demain si l’on appliquait des politiques publiques qui, sans être aussi radicales que le covid-19, réduiraient drastiquement certaines émissions de polluants.
Dans l’immédiat, le modèle de l’Ineris confirme sans surprise ce que l’on pressentait. Depuis la mi-mars, les concentrations d’oxydes d’azote (Nox) ont diminué de moitié, voire de 70 % dans certaines villes. "Nous avons comparé nos prévisions avec et sans les effets du confinement. Dès l’annonce de la fermeture des écoles, on voit que les deux courbes divergent, explique Augustin Colette, à la tête de l’unité de modélisation atmosphérique de l’institut. Le signal est exacerbé en milieu urbain, mais le phénomène est réel pour l’ensemble du territoire".
L’hiver ayant joué les prolongations fin mars, le chauffage individuel a en revanche limité l’érosion de la pollution aux particules fines. Alors que bon nombre de déchèteries ont fermé leurs portes, le brûlage des végétaux à l’air libre a peut-être aussi joué un rôle. "On commence à percevoir une diminution", signale toutefois Laurence Rouil. Et pas seulement parce que météo est plus clémente en avril.
Parmi les particules, on trouve au printemps beaucoup de nitrates d’ammonium qui se forment en combinant des oxydes d’azote et de l’ammoniac issu des épandages agricoles. Outre son effet direct, la diminution du trafic routier pourrait donc contribuer à réduire l’impact de la fertilisation des champs. L’hypothèse reste à vérifier en analysant non plus la quantité de particules fines mais leur composition. Patience. Les observatoires régionaux et le LCSQA (Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air) y travaillent. Réponse dans quelques semaines.
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