Dans l'industrie, les chaufferies bois sont à la peine

Dans l'industrie, les chaufferies bois sont à la peine

30.08.2016

HSE

L’érosion du prix des énergies fossiles ne pousse pas les industriels à chercher des alternatives. Le niveau d’aide apporté par l’Ademe, le manque de candidats à ses appels à projets, la satisfaction de ceux qui exploitent des installations et les évolutions fiscales devraient pourtant inciter à donner sa chance au bois.

C’est le type de chiffres que l’on a tout intérêt à présenter au milieu de l’été. Début août, le huitième appel à projet BCIAT (biomasse chaleur industrie agriculture et tertiaire) a couronné dix entreprises. En misant sur le bois, elles devraient économiser 49 000 tonnes équivalent-pétrole (TEP) par an, dont la moitié pour le seul papetier Saica Paper. Sauf que l’objectif affiché il y a un an lors de la publication du cahier des charges était de 125 000 TEP. Dans la filière bois, c’est la soupe à la grimace, même si "on ne s’en sort pas si mal compte tenu du contexte", positive Marie April, ingénieure au service bioressources de l’Ademe. Ce contexte, au-delà de la morosité économique, c’est bien sûr l’effondrement du prix des énergies fossiles. Oubliés les beaux discours post-COP21. Quand il s’agit de mettre la main au porte-monnaie, "les industriels regardent la rentabilité de leurs investissements à très court terme". "Avec un pétrole à 40 dollars le baril, il est difficile de défendre un projet bois devant son comité de direction", souligne Bruno de Monclin, président du comité interprofessionnel du bois énergie (Cibe).

Mauvais calcul

Alors qu’un nouvel appel à projets se profile, n’y a-t-il pas une opportunité à saisir pour les entreprises adeptes du contre-pied ? Pour les séduire, l’Ademe n’a pas hésité en 2016 à augmenter ses taux d’aides et à contribuer à des investissements jusqu’alors hors du champ des subventions… Une tendance qui devrait se poursuivre en 2017, même si les règles européennes fixent des seuils à ne pas dépasser (jusqu’à 45 % dans les grandes entreprises). À cela s’ajoutent les avantages traditionnels de la biomasse qui n’est pas soumise aux chocs de prix du gaz ou du fioul. Pour les industriels qui ne participent pas au marché des quotas de CO2, l’évolution de la contribution climat-énergie (le petit nom de la taxe carbone à la française) devrait en outre assez vite dégrader la compétitivité des énergies fossiles. Son montant était de 22 euros par tonne de CO2 en 2016. Elle va passer à 30,5 euros en 2017, 39 euros en 2018, 56 euros en 2020, 100 euros en 2030… Des chiffres à vite intégrer dans ses calculs d’amortissement !

Les précédents lauréats BCIAT comprennent vite qu’ils n’ont pas fait le mauvais choix et qu’ils ont intérêt à miser sur le bois à chaque fois qu’une de leur installation montre des signes de fatigue

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Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Des technologies pertinentes

Les professionnels du bois comptent parallèlement sur les expériences réussies pour relancer la machine. À l’instar d’Airbus qui a présenté cette année son troisième projet, de Nestlé qui a inauguré en juillet sa quatrième chaufferie biomasse ou de Sanofi, les précédents lauréats BCIAT comprennent vite qu’ils n’ont pas fait le mauvais choix et qu’ils ont intérêt à miser sur le bois à chaque fois qu’une de leur installation montre des signes de fatigue. "Eau chaude, vapeur… Le panel d’usages est très varié. Les technologies existantes s’adaptent à la plupart des process", rappelle Marie April. "Ce sont sur ces arguments que l’on doit maintenant convaincre."

Stimuler l’offre

En matière de combustible, les porteurs de projet ont aussi davantage de liberté qu’auparavant. Certes, des plans d’approvisionnement doivent être présentés à des cellules biomasse régionales qui garantissent leur cohérence et vérifient qu’ils sont tenus dans la durée (faute de quoi les subventions ne sont plus versées). Mais le critère de 50 % de plaquettes forestières a été abandonné. De même que la notion de distance maximale à parcourir. "Le gaz ou le charbon font des milliers de kilomètres. Le bois doit devenir un combustible comme un autre", justifie Bruno de Monclin. Si la demande est moins contrainte, l’Ademe garde à l’esprit l’idée de promouvoir les circuits courts, notamment avec l’appel à manifestation d’intérêt Dynamic Bois dont l’objet est de financer les mesures qui permettent d’aller chercher les gisements disponibles en forêts, mais inexploités pour des raisons techniques ou économiques.

Diversification

La surreprésentation parmi les lauréats de sociétés travaillant elles-mêmes dans le monde du bois montre l’intérêt à davantage valoriser les sous-produits industriels. Les propriétaires de chaufferie ont aussi désormais la possibilité de brûler de la biomasse de récupération, notamment avec la sortie de statut de déchets du bois d’emballage. "On aimerait aller plus loin", note le président du Cibe, "par exemple en valorisant le bois de démolition, même s’il y a évidemment un travail de caractérisation à réaliser pour ne pas faire n’importe quoi. En tout, il y a encore 6 MT de bois perdu". Marie April, elle, rappelle l’enjeu : "apporter de la souplesse sans perdre de vue l’objectif de performance environnementale".

Olivier Descamps
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