Au 1er janvier 2019, le styrène fera l'objet d'une valeur limite d'exposition professionnelle contraignante, deux fois inférieure à celle qui n'est aujourd'hui qu'indicative et n'a pas évolué depuis 1985. Une période transitoire est prévue à partir du 1er janvier prochain : les nouveaux niveaux d'exposition seront indicatifs.
La toxicité du styrène, ce liquide visqueux, légèrement jaunâtre et particulièrement volatil et odorant très utilisé dans la plasturgie, n’est pas nouvelle. Dans l’état actuel de la recherche, il reste indispensable au processus de réticulation, qui permet de durcir la matière avec une action thermique, tout en ayant les caractéristiques d’un solvant. Des propriétés qui le rendent particulièrement difficile à substituer. Il n’empêche que le styrène, en pénétrant dans l’organisme par les voies respiratoires et par contact cutané, est à la fois coupable de toxicités aigües (irritation des muqueuses) et chroniques. Il agit sur le système nerveux central, provoquant céphalées, vertiges, fatigue, pertes de mémoire, désordres digestifs… Sans compter que c’est un cancérogène possible (groupe 2B) et un ototoxique : il détériore des cellules qui servent à l’audition (voir notre article). Tout ceci est assez bien connu depuis de nombreuses années.
Depuis 1985, le styrène fait l’objet en France d’une valeur moyenne d’exposition sur 8 heures, fixée par une circulaire de la DGT à 215 mg/m3 d’air. En 2010, l’Anses recommande une prévention beaucoup plus stricte – sachant qu’à ce moment-là, l’Allemagne avait par exemple déjà fixé une VLEP (valeur limite d’exposition professionnelle) pour 8 heures de 86 mg/m3. L’agence estime qu’il faut fixer au styrène une VLEP sur 8 heures de 100 mg/m3, soit deux fois moins élevée que la valeur en vigueur, assortie d’une VLEP de court terme (15 minutes) de 200 mg/m3 pour éviter les pics d’exposition, tout en soulignant le risque d’exposition cutanée (voir notre article). L’an dernier, l’Anses a ajouté la nécessité de souligner aussi l’ototoxicité. Ce sera chose faite… bientôt. Deux textes, un arrêté et un décret, ont été publiés jeudi 24 mars 2016 au Journal officiel.
À partir du 1er janvier 2017, et durant deux ans, l’employeur sera incité à respecter une VLEP indicative reprenant ces valeurs : 100 mg/m3 d’air (soit 23,3 ppm) pour l’exposition sur 8 heures, et 200 mg/m3 d’air (soit 46,6 ppm) pour l’exposition de court terme. En faisant son entrée au tableau relevant de l’article R. 4412-150 du code du travail qui prévoit que l’exécutif peut fixer des VLEP "indicatives, constituant des objectifs de prévention", le styrène est paré de deux mentions spéciales : "peau" indique la possibilité d’une pénétration cutanée importante, et "bruit" marque la "possibilité d’une atteinte auditive en cas de co-exposition au bruit". C’est la première fois que cette seconde mention est ajoutée.
Cela laissera deux ans aux employeurs de trouver une parade au styrène, car à partir du 1er janvier 2019, ces deux VLEP seront contraignantes. La substance basculera alors au tableau de l’article R. 4412-149 d’ores et déjà mis à jour par le décret qui vient d’être publié. Les concentrations dans "l’atmosphère des lieux de travail" – "dans la zone de respiration des travailleurs" – devront être en-deçà des VLEP. En 2013, le conseil national de l’industrie suggérait une série de "mesures de simplification" au ministre de l’Industrie – alors Arnaud Montebourg. Les industriels demandaient de rester à la VLEP actuelle, plaidant notamment pour l’industrie nautique, forte utilisatrice du styrène comme solvant réactif pour fabriquer les résines polyester. "Pour les constructeurs nautiques ayant un environnement de travail très proche du précédent seuil de VLEP, le respect de ce nouveau seuil pourrait nécessiter un lourd investissement en termes d’équipements collectifs ou des changements profonds de procédés d’organisation et de méthodes de mise en œuvre", assuraient-ils, ajoutant la menace de la fermeture d’usines ou de la délocalisation de la production "vers des pays aux réglementations plus souples". La DGT, maintenant sa volonté de mettre en œuvre les recommandations de l’Anses, avait cependant accepté de reporter la contrainte à 2019.
La branche AT-MP de la CnamTS (caisse nationale d’assurance-maladie des travailleurs salariés) a fait de la prévention à l’exposition au styrène une de ses priorités lors de la signature de sa COG (convention d’objectifs et de gestion) 2014-2017. Le réseau prévention des Carsat a ainsi décidé d’accompagner les entreprises mettant en œuvre du polyester stratifié. Depuis l’an dernier, après une campagne de mesures en 2013 et un état des lieux via des questionnaires en 2014 (voir les résultats), elles sont passées à une phase d’intervention dans les entreprises. Cela va de la formation des travailleurs au risque chimique durant quelques heures, à des démarches de "traitement" des phases les plus polluantes lors de la mise en œuvre du styrène.
Si cela coince sur la substitution, réduire le risque à la source est en revanche possible, par exemple en privilégiant dans la plasturgie des techniques de fabrication avec un moule fermé, ce qui a par ailleurs le mérite de faire baisser les coûts liés à l’extraction de l’air et de traitement des effluents. Si le moule ouvert est incontournable, du moins lors de certaines phases, il faudra privilégier les résines FTS (faible teneur en styrène). Quant aux opérations lors desquelles il n’est pas possible d’éviter l’exposition du travailleur, il faut le protéger, par des EPI (équipements de protection individuelle), mais surtout et d’abord par des équipements de protection collectifs : cabines ventilées performantes, solutions de captage efficaces… Les Carsat peuvent apporter un soutien technique et financier.
La VLEP 8 heures indique la limite pour la concentration d’un agent chimique, dans l’air de la zone de respiration d’un travailleur, au cours d’une journée de travail de 8 heures. La valeur est une moyenne de cette concentration, pondérée en fonction du temps. Dans l’état actuel des connaissances en toxicologie, médecine ou épidémiologie, la VLEP 8 heures est censé protéger des effets sur la santé à moyen et long terme les travailleurs qui sont exposés régulièrement à l’agent chimique. Et ce durant toute une vie de travail. |
La VLEP à court terme est une valeur limite pour une exposition mesurée sur une période de référence de 15 minutes, pendant le pic d’exposition. Elle doit protéger les travailleurs des effets toxiques immédiats ou à court terme tels qu’une irritation, dus à des pics d’exposition. |
HSE
Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement.
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