Le compostage de proximité est mieux encadré juridiquement

Le compostage de proximité est mieux encadré juridiquement

24.05.2018

HSE

Un arrêté publié fin avril fixe à une tonne par semaine le seuil au-dessous duquel des personnes morales ou physiques peuvent valoriser leurs biodéchets dans un composteur dit de proximité… À des conditions précises, mais beaucoup moins contraignantes que dans une installation de traitement de déchets.

Le texte était attendu. En particulier dans le monde de la restauration collective qui avait toutes les cartes en main pour gérer ses biodéchets, mais pas forcément pour les valoriser localement. La publication le 24 avril d’un arrêté portant notamment sur le compostage de proximité rend la chose plus simple. Du moins pour les structures qui produisent chaque semaine moins d’une tonne de déchets dits "de cuisine et de table" (DCT).

Ce seuil met fin à un flou juridique qui n’avait pas été estompé par la circulaire sur le sujet publiée fin 2012 et qui obligeait parfois à faire le grand écart entre des recommandations plutôt souples adressées aux propriétaires d’installations individuelles et les règles on ne peut plus strictes s’appliquant aux exploitant de centres de valorisation de déchets organiques.

Un texte débattu

De fait, si le compostage de proximité est déjà en plein développement, "ce texte va permettre de rassurer les nombreux porteurs de projets locaux", se félicite-t-on chez Zero waste France. En espérant que les industriels du secteur qui "ont parfois tenté de limiter son développement", toujours selon l’association, acceptent la sentence. Au-delà du fait que chaque tonne compostée sans eux est une tonne qui n’entre pas dans leur comptabilité, bon nombre de professionnels craignent que des entreprises peu scrupuleuses cherchent à s’engouffrer dans les brèches ouvertes par l’arrêté pour contourner certaines obligations auxquelles eux doivent se conformer.

Ils font notamment référence à l’obtention d’agréments sanitaires, l’enregistrement de l’installation ou l’application de dispositions spécifiques pour accueillir des sous-produits animaux de catégorie 3 et produits dérivés auxquels appartiennent les restes de repas et pour lesquels les composteurs de proximité sont désormais officiellement exemptés. Le contournement consisterait par exemple à ce qu'une même entreprise de valorisation multiplie les points de compostage de proximité – de façon à n'être soumise qu'à cette réglementation, moins contraignante – alors qu'elle traite au global des volumes importants. 

Exploitant, un rôle clé

Si une note d’accompagnement est attendue d’ici cet été pour éviter les abus et éclaircir encore les choses, le texte acte de fait que "le meilleur compostage est fait au plus proche de la production de déchets et par le producteur lui-même", se félicite Jean-Jacques Fasquel, maître-composteur, consultant-formateur et auteur de l’ouvrage Composter en ville (1). Pour entrer dans le périmètre de l’arrêté, la valorisation doit être "réalisée sur place", mais elle peut regrouper des gisements de plusieurs producteurs de biodéchets.

Côté gestion, un "exploitant" doit être nommé pour garantir le respect de règles garantissant entre autre l’absence de risque de contamination des cuisines et des personnes qui apportent les déchets. Très concrètement, cette tâche est généralement confiée à un salarié ou au bénévole formé par le professionnel qui contribue à la mise en place de l’installation et avec lequel il est intéressant de travailler une année entière. "L’idéal est qu’on soit là à des moments clés comme le premier transfert de matière ou la première récolte de compost", précise Jean-Jacques Fasquel.

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Valorisation locale

L’arrêté prévoit que l’exploitant porte "une attention particulière à la bonne montée en température du tas en cours de compostage, notamment en relevant régulièrement sa température"… Une disposition qui avait été dénoncée par Amorce lors de la consultation précédent la publication de l’arrêté. L’association de collectivités et de professionnels considère qu’imposer un appareil de mesure risque d’entraîner "des contraintes supplémentaires difficiles à mettre en œuvre sur le terrain" et que l’exploitant a d’autres manières d’apprécier la montée en température, en particulier via le contrôle visuel de la matière en décomposition.

Amorce a eu gain de cause sur un autre point. Sauf dérogation, l’usage du compost lui doit être "local", c’est-à-dire dans l’intercommunalité ou les communes limitrophes et non dans les "cantons" environnants, terme qui figurait dans la première version du texte.

TVA réduite

En matière de débouchés, le compost est toujours considéré comme un sous-produit animal de catégorie 3 et ne peut donc en aucun cas être utilisé sur des pâturages ou des terres destinées à la production de plantes fourragères destinées à l’alimentation animale. Il est confiné au jardinage ou peut être cédé à un maraîcher pour cultiver des racines. Pour "rendre la valorisation des déchets moins chère que leur élimination", la feuille de route économie circulaire du gouvernement présentée fin avril prévoit de réduire le taux de TVA à 5,5 % pour la valorisation matière (proposition 21), mesure qui "couvrira l’acquisition de solutions techniques de compostage de proximité"…. Mais qui devra être votée en loi de finances.

 

(1) Composter en ville, Rustica éditions, 128 p., avril 2018.

Olivier Descamps
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