Les apprentis embauchés à partir du 30 avril ne seront plus obligés de voir le médecin du travail

Les apprentis embauchés à partir du 30 avril ne seront plus obligés de voir le médecin du travail

07.01.2019

HSE

Même les apprentis affectés sur des postes à risque, et qui doivent bénéficier d'un suivi individuel renforcé, pourront faire leur visite d'information et de prévention, lors de leur embauche, chez un médecin de ville. Cela devra en priorité être un médecin avec lequel le service de santé au travail a signé une convention. Explication des 6 étapes de ce dispositif expérimental, qui devra prouver qu'il apporte une souplesse pour embaucher des apprentis.

La seule exception concerne les apprentis relevant de l'enseignement agricole. Pour tous les autres, dès lors que leur contrat est signé entre le 30 avril 2019 et le 21 octobre 2021, l'employeur pourra s'adresser à un médecin de ville afin d'être dans les clous concernant la visite d'information et de prévention (VIP) prévue par le code du travail lors de l'embauche (article L. 4624-1). Il y a encore quelques semaines, dans un projet de texte, l'exécutif envisageait d'exclure de ce dispositif les apprentis affectés sur des postes imposant de les faire bénéficier d'un suivi individuel renforcé.

Le décret organisant ce qui est pour l'instant une "expérimentation" durant 3 ans – introduite par la loi avenir professionnel après débats et tergiversations – est paru au Journal officiel le 30 décembre 2018.

1ère étape : se tourner vers le service de santé au travail

Le 30 avril 2019, l'employeur qui recrute un apprenti ne pourra pas immédiatement faire appel à un médecin de ville. Il lui faudra d'abord, comme aujourd'hui, saisir son service de santé au travail, au plus tard à la date d'embauche de l'apprenti, pour organiser la VIP – qui doit avoir lieu dans les deux mois après l'embauche, ou avant affectation au poste si l'apprenti a moins de 18 ans.

Ce n'est que si l'employeur n'a pas de réponse du SST (service de santé au travail) sous huit jours, ou si le service lui répond qu'il n'a pas de professionnel disponible pour mener la VIP (médecin du travail, collaborateur médecin, interne en médecin du travail, infirmier), qu'il peut passer à l'étape suivante : le médecin de ville.

2e étape : le médecin de ville qui a signé une convention avec le service de santé au travail

Si le SST ne peut assurer la VIP de l'apprenti, cette visite peut être faite par un médecin de ville. Mais attention, l'employeur ne peut pas choisir tout de suite le médecin de son choix : il doit d'abord se tourner vers le ou les médecin(s) avec le(s)quel(s) son SST a conclu une convention. La liste doit être communiquée à l'employeur par le service de santé au travail.

Si la date de mise en œuvre effective de l'expérimentation a été décalée à début mai, c'est justement pour permettre aux SST d'instaurer des partenariats avec les médecins de ville. D'autant qu'il leur est demandé de les former. Ou du moins de les "accompagner". "Cette convention prévoit les mesures utiles pour accompagner ces médecins dans la réalisation des visites d'information et de prévention des apprentis, notamment les actions de sensibilisation et de formation", est-il prévu dans le décret.

3e étape : le médecin de ville, notamment le médecin traitant de l'apprenti

Ce n'est qu'en cas d'indisponibilité du médecin de ville conventionné pour la VIP par le SST – ou si le service n'a signé aucune convention – que l'employeur peut faire appel à n'importe quel médecin de ville. Le décret souligne qu'il peut "notamment" s'agir du médecin traitant de l'apprenti, à condition que l'apprenti (ou ses parents s'il est mineur) soit d'accord avec ce choix.

4e étape : la VIP est prévue, informations à envoyer au médecin

Avant le jour de la visite chez le médecin, l'employeur doit indiquer au service de santé au travail quel est ce médecin (y compris dans le cas d'une VIP avec un médecin sous convention avec le SST), et au médecin les coordonnées du SST dont il dépend.

Il lui appartient aussi d'envoyer au médecin "la fiche de poste de l'apprenti ou tout autre document précisant les tâches confiées à l'apprenti et les conditions dans lesquelles elles sont effectuées". Quel sera le degré de précision exigé pour ces "conditions" ? Ce point peut pour l'instant prêter à interprétation.

5e étape : la visite

Le décret rappelle, sans modification par rapport à ce qui est prévu pour depuis 2017 pour tous les salariés, que la VIP a pour objet d'interroger le salarié (ou ici l'apprenti) sur son état de santé, de l'informer des risques éventuels auxquels l'expose son poste de travail, de le sensibiliser aux moyens de prévention, de voir s'il nécessite d'être orienté vers un médecin du travail, et de l'informer sur les modalités de suivi de son état de santé par le service de santé au travail, ainsi que de la possibilité pour lui de demander à tout moment une visite avec le médecin du travail.

Le décret précise d'ailleurs bien qu'après cette première VIP, c'est le service de santé au travail – et non le médecin de ville – qui assure le suivi périodique de l'état de santé de l'apprenti.

À l'issue de la visite, le médecin de ville remplit une attestation, simple document de suivi indiquant que la VIP a bien eu lieu. Il en envoie une copie à l'employeur et au service de santé au travail.

Via ce document, il peut décider de renvoyer l'apprenti devant le médecin du travail, s'il estime que "l'état de santé [de l'apprenti] ou les risques auxquels il est exposé" le nécessite. Dans ce cas, il en informe aussi tous les intéressés : apprenti, employeur, service de santé au travail

Le modèle de l'attestation reste à définir par arrêté du ministère du travail, le formulaire prévu fin 2017 pour le suivi de santé réformé ne correspondant pas au cas d'une visite avec un médecin de ville.

6e étape : payer

Si l'entreprise qui souhaite embaucher l'apprenti adhère à un SSTI (service de santé au travail interentreprises) et est à jour de ses cotisations, c'est le SSTI qui devra prendre en charge les honoraires. S'il s'agit d'un service de santé au travail autonome, l'entreprise devra directement payer le médecin de ville.

 

L'expérimentation prouvera-t-elle son intérêt ?

Le décret – et c'est un ajout par rapport au projet de texte soumis en décembre au Cnefop (conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle) – précise que l'expérimentation sera évaluée, afin de "mesurer son impact sur les modalités de réalisation de la VIP des apprentis, au moment de leur embauche".

Le nombre d'apprentis qui aujourd'hui resteraient sur la touche alors qu'ils ont trouvé un employeur, faute de pouvoir avoir leur VIP dans les temps est en effet inconnu.

Certains employeurs, notamment dans l'artisanat, déclarent que cela leur arrive régulièrement, quand les services de santé au travail assurent de leur côté qu'ils font passer en priorité toute demande de visite d'embauche d'un apprenti.

Avoir un chiffre permettra d'objectiver le débat lorsque ce posera la question de la pérennisation de l'expérimentation.

Au plus tard à la fin du 1er semestre 2021, le ministère du travail entend ainsi connaître au moins le nombre d'apprentis reçus en VIP par des médecins de ville, et parmi eux la proportion qui ont été orientés vers le médecin du travail.

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Élodie Touret
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