Les entreprises se sont emparées des accords de performance collective

Les entreprises se sont emparées des accords de performance collective

21.06.2019

Convention collective

Le cabinet Sextant Expertise a analysé une soixantaine d'accords de performance collective. Les directions, comme les organisations syndicales, signent aujourd'hui sans trop de difficultés de tels accords qui permettent aux entreprises d'anticiper leurs besoins de manière sécurisée. Un cadre juridique souple et rassurant qui explique le succès de ces nouveaux accords emploi.

Face à l'inefficacité des précédents accords sur l'emploi (accords de maintien dans l'emploi, accords de préservation et de développement de l'emploi,...), le gouvernement a franchi un pas supplémentaire, dans le cadre des ordonnances Travail, avec les accords de performance collective. Ces derniers ont un périmètre assez large puisqu'ils peuvent être conclus pour répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l'entreprise ou en vue de préserver ou de développer l'emploi. Surtout, ils permettent de passer outre l'accord des salariés. Ceux qui refusent de se voir appliquer l'accord peuvent être licenciés pour un motif sui generis et non plus pour un motif économique.

Il est difficile d'avoir des données précises sur ces accords car les entreprises n'ont pas l'obligation de les verser dans la base publique des accords, ces derniers étant susceptibles de comporter des informations sensibles. Certaines entreprises - rares - jouent toutefois la transparence.

Le cabinet Sextant Expertise, qui accompagne les élus, s'est procuré 62 accords non publiés. Il en a tiré des premiers éléments d'analyse.

Des accords qui séduisent les entreprises

Si la montée en charge des accords de performance collective est progressive, il semblerait qu'elle ait désormais trouvé son rythme de croisière. Ainsi, si 38 % des accords étudiés ont été conclus en 2018, ils sont 60 % à l'avoir été en 2019 [jusqu'au mois d'avril]. Des résultats qui ne surprennent pas Christian Pellet, président de Sextant Expertise. "Le succès des accords de performance collective ne m'étonne pas. Ils vont beaucoup plus loin que les tentatives préexistantes, ils sont simples, sécurisés, flexibles. Ces accords permettent aux entreprises de s'adapter et de gérer les transformations d'entreprise, de poser les enjeux à froid et de trouver des solutions par la négociation. C'est un outil efficace qui est ainsi mis à la disposition des entreprises, leur permettant d'anticiper de manière sécurisée. Je suis convaincu que le mouvement va se poursuivre".

Des accords bien souvent unanimes

Cette montée en puissance ne pourrait pas avoir lieu sans la participation des organisations syndicales. 61 % de ces accords ont ainsi été signés par des délégués syndicaux. 82 % des accords sont même conclus à l'unanimité. Il est intéressant de noter que toutes les organisations syndicales signent des APC. "Ces accords sont massivement signés par le organisations syndicales, même la CGT. Il n'y a pas de position dogmatique sur le sujet. Les entreprises arrivent à les motiver pour les mettre autour de la table", constate Christian Pellet. Reste à savoir si les organisations syndicales vont poursuivre dans cette voie et signer des accords qui ne prévoient majoritairement pas de contreparties, rien ne les y obligeant. "Les organisations syndicales pourraient relever leur niveau d'exigence", augure le président de Sextant Expertise. De tels accords pourraient également changer la nature des relations entre les organisations syndicales et les salariés. "Les salariés découvrent que les organisations syndicales peuvent négocier des accords qui remettent en cause leur contrat de travail ; les syndicats doivent donc être dans une relation de proximité avec eux".

32 % de ces accords sont conclus selon des méthodes dérogatoires, ce qui n'est pas un détail selon Christian Pellet. "Le nombre d'accords signés dans les petites entreprises prouve que les conseils des TPE se sont appropriés le dispositif".

Une utilisation thématique des accords

De par leur champ très vaste, les accords de performance collective permettent de répondre à de multiples besoins des entreprises. Ces dernières font toutefois rarement le choix de traiter de nombreux sujets au sein d'un même accord, même si la loi les y autorise (durée du travail, rémunération, mobilité). "Le thème majoritairement impacté, à savoir le temps de travail, reflète bien l'idée du recours à l'APC dans le cadre de la nécessité d'adapter le fonctionnement de l'entreprise", souligne Christian Pellet. Dans trois-quarts des cas, les APC sont conclus à durée indéterminée et ne prévoient pas de clause de retour à meilleure fortune. En revanche, quatre accords sur 10 prévoient une clause de revoyure.

Photographie des accords de performance collective

Au sein de l'échantillon des accords analysés dans l'enquête, 37 % concernent des entreprises avec un effectif inférieur à 50 salariés et 31 % des entreprises de 250 salariés et plus. Tous les secteurs économiques sont concernés avec une surpondération de l'industrie (26 %), du commerce, des transports, de l'hébergement et de la restauration (43 % au total). Les APC sont majoritairement conclus dans le Nord-Ouest de la France en lien avec l'implantation prépondérante des entreprises sur cette zone.

 

 

Convention collective

Négociée par les organisations syndicales et les organisations patronales, une convention collective de travail (cct) contient des règles particulières de droit du travail (période d’essai, salaires minima, conditions de travail, modalités de rupture du contrat de travail, prévoyance, etc.). Elle peut être applicable à tout un secteur activité ou être négociée au sein d’une entreprise ou d’un établissement.

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Florence Mehrez
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