Dans un objectif d’amélioration constante des droits et des conditions d’activité des livreurs indépendants, leurs représentants et ceux des plateformes ont signé le 7 mai un accord visant à lutter contre toute forme de discrimination. Homologué le 26 juillet, il prévoit tant des mesures de prévention que d’accompagnement des victimes.
En un peu plus d’un an, c’est le quatrième accord conclu et homologué dans le secteur de la livraison. Après s’être attaqués à la question d’une garantie minimale de revenus et à celle des modalités de rupture des relations commerciales notamment, les acteurs du dialogue social ont cette fois travaillé sur les discriminations, un "sujet de société" qui appelle "à des actions qu'il est indispensable de mener". La volonté des signataires est double : d’une part "prévenir, sensibiliser, et lutter contre toutes les formes de discriminations sur les plateformes de mise en relation", d’autre part "impliquer l’ensemble des utilisateurs des plateformes et leurs représentants à cet enjeu, qu’il s’agisse des livreurs indépendants, des restaurateurs, des commerçants mais également des destinataires des livraisons, afin d'œuvrer vers une prise de conscience et l'implication de chacun". Conclu pour une durée indéterminée, le texte prendra effet trois mois après la publication au Journal officiel de la décision d’homologation de l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (Arpe), soit le 31 octobre prochain.
Un observatoire des discriminations pour faire un état des lieux
Après avoir rappelé les contours de la notion de discrimination et le cadre législatif qui y est attaché, l’accord acte la création d’un observatoire des discriminations. En effet, "les signataires considèrent que, pour prendre les dispositions les plus adaptées dans la lutte contre toutes les formes de discriminations, ils doivent disposer d’un état des lieux factuel et actualisé". Cet observatoire prendra la forme d’un temps dédié, chaque année, à l'examen des situations de discriminations, un point spécifique étant en ce sens fixé à l’ordre du jour d’une des réunions de la commission de négociation. Pour leur examen, les membres de la commission s’appuieront sur les résultats d’une enquête menée annuellement par les plateformes auprès des livreurs et ils pourront adapter le cas échéant les actions menées au niveau du secteur.
Négociée par les organisations syndicales et les organisations patronales, une convention collective de travail (cct) contient des règles particulières de droit du travail (période d’essai, salaires minima, conditions de travail, modalités de rupture du contrat de travail, prévoyance, etc.). Elle peut être applicable à tout un secteur activité ou être négociée au sein d’une entreprise ou d’un établissement.
Découvrir tous les contenus liés
En amont des discriminations, des mesures de prévention et de sensibilisation
Sur le volet préventif, les plateformes s’engagent à concevoir/diffuser auprès de leurs utilisateurs (livreurs indépendants, restaurateurs, commerçants destinataires des livraisons) et de leurs salariés en contact avec eux "un guide d’accompagnement sur les propos, actes et comportements constitutifs d’une discrimination et les moyens de les prévenir ou d’y réagir". De même, elles leurs communiqueront, ainsi qu’à leurs sous-traitants, les principaux engagements prévus par l’accord, les organisations représentatives des livreurs devant faire de même auprès de leurs adhérents.
Par ailleurs, parce "qu’une démarche efficace de lutte contre toutes les formes de discriminations doit inclure l'ensemble des utilisateurs de plateforme", les signataires élaboreront une charte d’engagements réciproques reprenant les principes de l’accord et les déclinant pour les restaurateurs et les commerçants. Dans le mois qui suit l’établissement d’un projet de charte, ils inviteront les représentants des restaurateurs, des commerçants et des consommateurs à une réunion commune destinée à leur proposer la charte.
Lorsque des discriminations adviennent, un dispositif de signalement sera disponible
Afin que les livreurs puissent signaler des faits de discrimination, les plateformes devront mettre en place, via la section dédiée à l’assistance de leur application, "un dispositif d’alerte facilement accessible". Pour le rendre effectif, elles s’engagent à débuter l’examen des signalements reçus dans les 36 heures en prenant contact avec le livreur auteur de l’alerte et transmettront aux autorités compétentes toute information nécessaire au bon déroulé de l’enquête. Il est également précisé que le livreur qui fait un signalement ne pourra faire l'objet d'une quelconque pénalité à ce titre et que la plateforme ne peut pas suspendre ou mettre fin à sa relation commerciale avec lui.
En aval, un soutien aux victimes et une possibilité de dédommagement
S’il est avéré qu’un livreur est victime de discrimination, la plateforme "déploie ses meilleurs efforts pour être à son écoute et prendre en compte son signalement". Si le livreur le sollicite, elle l’oriente vers des acteurs spécialisés (associations, etc.) susceptibles de lui apporter un soutien psychologique et/ou un accompagnement dans ses démarches.
Du côté des auteurs de discrimination, les plateformes devront prendre "les mesures appropriées", pouvant aller jusqu’à la rupture des relations contractuelles. Enfin, un dédommagement pourra être versé au livreur qui a fait un signalement mais dont le compte a été suspendu car dans le cadre de la même commande un autre utilisateur avait informé la plateforme d’un incident. Dès lors qu’à l’issue de l’examen de la situation la plateforme ne procède pas à la rupture des relations contractuelles avec le livreur, celui-ci pourra percevoir un montant égal, pour chaque jour de suspension du compte dans la limite de 30 jours, à la moyenne journalière de ses revenus d’activité perçus au cours des 12 semaines précédant la suspension. Il reviendra à chaque plateforme de déterminer :
- les modalités de calcul de la durée de suspension pour laquelle le dédommagement est dû ;
- le délai maximal au cours duquel le livreur indépendant peut effectuer une demande de compensation ;
- le délai de versement de la compensation.