Loi économie circulaire : le plastique, plus si fantastique

Loi économie circulaire : le plastique, plus si fantastique

24.02.2020

HSE

Quatrième volet de notre série sur la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. Les parlementaires y ont acté l’interdiction progressive et l’utilisation réglementée de nombreux produits à base de matière plastique. Leur fin de vie va elle aussi être surveillée de plus près.

C’est ce qu’on appelle en prendre pour son grade. Symbole de la société du pétrole et du jetable, le plastique a été montré du doigt de façon récurrente lors des débats parlementaires qui ont abouti au vote de la loi économie circulaire. Plusieurs objectifs ont été assignés aux industriels qui ont recours au matériau. Même chose pour les filières qui gèrent la fin de vie des produits qui en incorporent. En aval, le recyclage devra tendre vers 100 % des gisements d’ici le 1er janvier 2025 (article 5). En amont, il faudra entre autres choses envisager "la fin de la mise sur le marché d’emballages en plastique à usage unique d’ici à 2040" (article 7). Cette cible fera l’objet avant 2022 d’une stratégie nationale pour la réduction, la réutilisation, le réemploi et le recyclage.

Présentée comme trop lointaine par bon nombre de commentateurs, la date de 2040 va demander aux industriels de se pencher rapidement sur les produits qu’ils fabriquent, qu’ils commercialisent, voire qu’ils utilisent… Et pas question de noyer le poisson. "Si certains essaient de contourner la loi avec des diversions grotesques, ils seront évidemment rattrapés par l’État qui les sanctionnera", prévient la secrétaire d’État à la transition écologique et solidaire Brune Poirson, en réaction aux fabricants qui essaient de pérenniser leur activité ou d’écouler leur stock en ajoutant la mention "réutilisable" un peu facilement. L’article 77 prévoit entre autres des amendes administratives pouvant aller jusqu’à 15 000 euros pour les contrevenants.

Interdictions en série pour les fabricants…

Des échéances sont fixées selon le type de produits. Les gobelets, verres et assiettes jetables sont interdits depuis le 1er janvier. Les pailles, couverts, piques à steak, couvercles à verre et autres bâtonnets mélangeurs pour boissons le seront en 2021 (ce qui constitue en réalité un recul d’un an par rapport à ce que prévoyait la loi agriculture et alimentation du 30 octobre 2018). À la même échéance, il sera interdit de vendre des produits fabriqués à base de plastique oxodégradable, des récipients à polystyrène expansé ou des confettis en plastique. En 2022, il faudra se passer de la résine dans les sachets de thé, dans les emballages de fruits et légumes frais non transformés et autour des publications de presse et de publicité (article 78). Il deviendra impossible par ailleurs d’apposer des étiquettes non compostables sur les fruits et légumes (article 80).

… et pour les usagers

Parallèlement, impossible de distribuer gratuitement des bouteilles en plastique dans les locaux à usage professionnel et dans les ERP (établissements recevant du public) à partir de 2021… sauf impératif de santé publique ou impossibilité technique de faire autrement. L’année suivante, la mise à disposition gratuite de jouets en plastique des menus enfants sera bannie (article 81). Les ERP devront proposer des fontaines à eau raccordées au réseau et les entreprises de portage quotidien de repas utiliseront des couverts et des récipients réemployables. À partir de 2023, ce sera autour des établissements de restauration de s’y mettre. En 2025 enfin, il faudra abandonner les contenants alimentaires de cuisson, de réchauffage et de services dans une partie des centres hospitaliers (en pédiatrie, en obstétrique, en maternité…).

Future consigne ?

Concernant les bouteilles à usage unique, pas encore d’interdit, mais un impératif : diviser par deux le gisement d’ici à 2030 (article 66). Pour traiter la fin de vie de celles qui continueront à être utilisées, le taux de collecte pour recyclage visera 77 % en 2025 et 90 % en 2029… Un dispositif de consigne pourra être imposé si l’on n’en suit pas le chemin. Après de longs débats, le compromis trouvé confie à l’Ademe le soin de rendre d’ici l’automne un rapport sur les taux de performance actuelles ainsi qu’une trajectoire permettant d’atteindre les cibles définies pour 2025 et 2029. Cet exercice devra être réévalué chaque année en distinguant les flux captés chez les ménages, dans l’espace public et dans les entreprises. À partir des résultats présentés 2023, le gouvernement décidera ou non de proposer un dispositif de consigne pour recyclage et réemploi (selon des conditions âprement discutées). En attendant, seuls les territoires où le sujet fait consensus pourraient expérimenter la mesure, ce qui pourrait avoir un sens en Outre-mer.

Milieux aquatiques

L’objectif de la loi est de lutter contre le gaspillage, mais aussi de réduire les impacts environnemental et sanitaire des plastiques. Pour limiter la pollution des milieux aquatiques, la loi prévoit entre autres la mise en place sur les lave-linges neufs de filtres à microfibres à partir de 2025 (article 79)… Une échéance qui a d’ores et déjà fait l’objet d’une réunion entre le gouvernement et les fabricants lundi 17 février. En parallèle, les sites de production, de manipulation et de transport de granulés devront en 2022 se doter d’équipements et de procédures pour prévenir les fuites (article 83).

Enfin, la mise en marché de substances à l’état de microplastique est prohibée dès lors que leur concentration dépasse 0,01 % (article 82), en particulier dans les "cosmétiques rincés à usage d’exfoliation ou de nettoyage", dans les dispositifs médicaux (à partir de 2024), dans les autres cosmétiques (2026), dans les détergents et produits d’entretiens (2027 mais avec des exemptions comme l’usage en site industriel). Il y a urgence. Si les déchets amenés par les fleuves sont incriminés lorsqu’on parle de pollution plastique en mer, les micro-plastiques représenteraient en réalité jusqu’à 30 % du gisement si l’on en croit l’Union internationale pour la conservation de la nature.

 

► Lire aussi

 

► Pour rappel du parcours législatif du texte, lire aussi :

Économie circulaire : les députés adoptent le projet de loi anti-gaspillage

Économie circulaire : les objectifs de lutte contre le gaspillage s’affinent

Économie circulaire : le Sénat refuse la consigne pour les bouteilles en plastique

Économie circulaire : Brune Poirson réussit son examen de passage au Sénat

 

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

Découvrir tous les contenus liés
Olivier Descamps
Vous aimerez aussi