Marché carbone européen : la restitution des quotas non utilisés peut être exigée

Marché carbone européen : la restitution des quotas non utilisés peut être exigée

16.03.2017

HSE

En 2012, ArcelorMittal a perçu au Luxembourg des quotas d'émissions pour une installation qui avait cessé de fonctionner, ce qu'il avait omis de mentionner. L'État exige leur restitution ; ArcelorMittal estime que c'est une expropriation. La CJUE vient de trancher en faveur du Luxembourg.

ArcelorMittal vient de perdre son recours devant la CJUE (cour de justice de l'Union européenne) et devra ainsi restituer ses quotas d’émission de gaz à effet de serre non utilisés au Luxembourg, sans que le pays ait à verser d'indemnités à l'industriel. Il ne s'agit pas là d'une "expropriation". Ainsi vient de trancher la CJUE dans le cadre d'un renvoi préjudiciel, pour une affaire opposant ArcelorMittal au Luxembourg, où la Cour constitutionnelle a demandé à la CJUE "si la directive 2003/87 [directive créant le marché carbone européen] doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une disposition nationale qui permet aux autorités compétentes d’exiger la restitution, sans indemnité, des quotas d’émission délivrés, mais non utilisés par un exploitant". 

Installation à l'arrêt

Pour la période 2008-2012, le gouvernement luxembourgeois a alloué 405 365 quotas d’émission au sidérurgiste, dont 81 073 quotas en 2012 pour l'installation de Schifflange, lesquels sont attribués le 22 février 2012. Or cette installation a suspendu, en novembre 2011, ses activités, pour une durée indéterminée. Le 23 avril 2012, ArcelorMittal demande même au ministre de l'Environnement de suspendre les contrôles environnementaux à Schifflange. Un an plus tard, en juin 2013, le gouvernement décide, via un arrêté, de réduire le total des quotas d’émissions alloués à cette société pour la période 2008-2012, et de lui demander de restituer, sans indemnité, 80 922 quotas. Le 8 juillet 2013, ArcelorMittal introduit un recours gracieux contre cet arrêté ; c'est le début de l'affaire que la CJUE vient de trancher. 

Quotas or not quotas

Dans un premier temps, le tribunal administratif du Luxembourg, a jugé qu'une "restitution, sans indemnité, des quotas litigieux correspondrait, par ses effets, à une expropriation illégale". Les magistrats estimaient que ces quotas litigieux faisaient partie du patrimoine d'ArcelorMittal, puisqu'ils avaient été délivrés et inscrits au registre national. À sa suite, la Cour constitutionnelle va décider de surseoir à statuer pour porter la question à la CJUE. Elle lui demande si la législation nationale prévoyant d’exiger la restitution, sans indemnité totale ou partielle, des quotas délivrés mais non utilisés est conforme à la directive européenne, et si, dans ce cas, ces quotas doivent toujours être considérés comme des quotas. 

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Quotas indûments délivrés

"La directive 2003/87 doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à une législation nationale qui permet à l’autorité compétente d’exiger la restitution sans indemnité, totale ou partielle, de quotas non utilisés qui ont été indûment délivrés à un exploitant, en conséquence de la violation par ce dernier de l’obligation d’informer en temps voulu l’autorité compétente de la cessation de l’exploitation d’une installation", répond la CJUE. Elle renvoie à l'article 7 de la directive, qui indique bien que l'exploitant doit informer l'autorité compétente de "tous changements prévus en ce qui concerne la nature, le fonctionnement ou une extension de l’installation, susceptibles de nécessiter une actualisation de l’autorisation d’émettre des gaz à effet de serre". Arcelor Mittal n'aurait pas dû attendre plusieurs mois pour informer le ministère de l'arrêt de Schifflange. 

Pas d'expropriation de quotas qui n'en sont pas

La CJUE va dans le sens du gouvernement luxembourgeois et de la Commission européenne, qui estiment que lorsque les quotas sont délivrés, en février 2012, ils l'ont été uniquement parce que l'exploitant a "omis" de préciser avant cette date que son installation ne tournait plus. À partir du moment où l'installation a cessé ces activités - la CJUE renvoie sur ce point à la juridiction nationale le soin de vérifier si la "suspension" d'activité de Schifflange est une "cessation des activités" - l'État est tout a fait en droit de lui demander de restituer les quotas, sans indemnité. Et il n'est même pas question de parler "d'expropriation d’un bien qui ferait déjà partie intégrante du patrimoine de l’exploitant", puisque ces "quotas" litigieux ne sont pas des "quotas d'émission" au sens de la directive européenne. Demander la restitution revient ainsi, pour l'État, à décider du "retrait de l’acte allouant des quotas, en raison du non-respect des conditions fixées par la directive 2003/87".

Élodie Touret
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