Référentiels pénibilité : des branches continuent d'intégrer les dix facteurs

Référentiels pénibilité : des branches continuent d'intégrer les dix facteurs

21.02.2019

HSE

Des branches se dotent d'un référentiel dit "pénibilité". Certaines profitent de cette opportunité pour faire un état des lieux global du travail réel et proposer des mesures de prévention, y compris pour les quatre facteurs de risques professionnels qui ne sont plus à déclarer sur le compte professionnel de prévention.

Oser ou ne pas oser. Telle est la question que se posent désormais les branches qui élaborent leur référentiel dit "pénibilité". La Fédération nationale des travaux publics a répondu par la négative. Son référentiel, qui vient d'être homologué, n'étudie pas, par exemple, l'exposition aux manutentions manuelles de charges ou aux postures pénibles. La branche se conforme donc strictement à l'objectif légal du document. D'autres ont choisi d'aller plus loin, quitte à mettre un coup de projecteur sur la pénibilité de certains métiers.

Elaborés par les organisations professionnelles des branches, les référentiels aident les employeurs à déclarer l'exposition de leurs salariés aux facteurs de risque, anciennement dénommés facteurs de pénibilité. Ils sont opposables : en cas de contentieux, l'employeur qui les applique ne peut pas être pénalisé. Les branches ne sont plus tenues d'y intégrer les quatre facteurs supprimés du désormais compte professionnel de prévention par les ordonnances Macron de 2017, c'est-à-dire les agents chimiques dangereux, la manutention manuelle de charges, les postures pénibles et les vibrations mécaniques. Reste obligatoire l'étude de l'exposition aux températures extrêmes, au bruit, aux gestes répétitifs, au travail en milieu hyperbare, de nuit ou en équipes successives alternantes.

Ceux publiés avant la réforme sont "mis à jour" mais "tous maintiennent l'analyse des dix critères", explique Amandine Arsac, chargée de mission pénibilité au sein du bureau de la politique et des acteurs de la prévention à la Direction générale du travail, à l'occasion d'un bilan d'étape du troisième Plan santé au travail.

"Jusqu'au bout"

Et les plus récents ? Bernard Cottet nous informe que toutes les branches pour lesquelles son cabinet Didacthem a été sollicité, qu'elles aient entamé la démarche avant ou après la réforme, ont choisi de traiter les dix facteurs. "Allons jusqu'au bout", se sont-elles dit, rapporte-t-il. D'après lui, les secteurs qui se limitent aux six facteurs "ont tort". Plusieurs arguments vont dans le sens de l'ambition. Toutes les entreprises de plus de 50 salariés qui ont plus de 25 % de salariés exposés à l'un des six facteurs ou un indice de sinistralité d'au moins 0,25 doivent quand même négocier un accord sur les dix facteurs. Le référentiel peut les aider. 

 

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Ensuite, le document "donne une base de travail pour mettre des actions de prévention", pense Bernard Cottet. Le référentiel peut lister des mesures pour diminuer la pénibilité et ainsi servir d'outil de communication. C'est pour cette raison que les charcutiers de détail ont gardé les dix critères : "notre démarche était plus profonde, nous voulions avoir des actions de prévention", témoigne Isabelle Ouedraogo, secrétaire fédérale CFDT à la Fédération générale de l'agroalimentaire, à l'occasion du bilan d'étape du troisième Plan santé au travail. 

Travail réel 

On observe la même idée chez la branche des métiers de l’esthétique. "L’approche binaire d’exposition ou non aux facteurs de pénibilité au travail ne permet pas d’identifier clairement toutes les nuances des situations effectivement rencontrées [...] Dans certaines situations, les seuils d’exposition, que cela soit en intensité et/ou en durée, ne sont pas dépassés mais doivent malgré tout faire l’objet d’une vigilance au titre des actions de prévention", lit-on dans le référentiel réalisé avec le cabinet Avenir solutions, qui a gardé l'ancienne dénomination "référentiel de l'exposition à la pénibilité au travail". 

 

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Ici, pour chacun des 23 métiers étudiés, les facteurs sont notés sur trois niveaux : vert si l'exposition est absente ou peu significative, orange si elle est moyenne, et rouge si le seuil est dépassé. Même en cas d'exposition moyenne, des mesures de prévention sont recommandées. C'est parfois le cas pour le travail répétitif, par exemple. La fixation légale du seuil est très stricte : l'activité doit être sous cadence contrainte pour être reconnue comme répétitive. Mais la branche fait remarquer qu'"il n'en reste pas moins qu'une surexposition à des gestes répétés, conjuguée aux possibles contraintes posturales, peut voir émerger des TMS pouvant être reconnus comme maladie professionnelle". 

Un état d'esprit qui permet de parler du travail réel. "Cet exercice a eu le mérite de mieux objectiver. On sait maintenant quels travaux sont pénibles au sens propre du terme", nous expliquait Hélène Godin, DRH de l'UNA, l'union d'employeurs pour l'aide à domicile, l'an dernier. Le référentiel de son secteur a le mérite d'établir un "état des lieux objectif qui fasse consensus comme base de travail pour une négociation de branche sur la QVT", ajoutait de son côté Loïc Le Noc, secrétaire fédéral CFDT Santé sociaux.

Echantillon représentatif

À cette date, un peu plus d'1,8 million de salariés sont potentiellement couverts par des référentiels pénibilité homologués. La DGT, pour homologuer le document, en plus de vérifier s'il est bien conforme à la loi, se penche sur le respect de critères qui ont émergé au fur et à mesure des discussions de branches, du travail des cabinets de conseil et des débats du Coct (Conseil d'orientation des conditions de travail), consulté pour l'homologation, informe Amandine Arsac. Par exemple, la DGT regarde si la démarche de la branche a été paritaire, ou si les partenaires sociaux ont au moins été informés des diagnostics réalisés. L'administration s'assure aussi que l'échantillon d'entreprises observées pour réaliser les calculs est représentatif de la structure de la branche. Les tâches et activités étudiées doivent être conformes à la nomenclature reconnue au sein de la branche, précise aussi Amandine Arsac. 

 

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HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Pauline Chambost
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