La VLEP indicative pour le cadmium est fixée à 0,004 mg/m3. Il s'agit d'une VLEP dite "pragmatique", car il n'était pas possible de décider d'un seuil assurant d'éviter les effets cancérogènes de la substance. Le ministère a fait le choix de ne pas suivre la recommandation de l'Anses, qui recommandait – il y a déjà 2 ans – une valeur plus faible. La France s'aligne en revanche sur les dernières positions du Parlement européen.
Même s'il ne s'agit que d'une valeur "indicative", cela aurait pu être une nouvelle VLEP (valeur limite d'exposition professionnelle) ambitieuse et en avance sur la réglementation européenne. Mais en tranchant pour fixer la VLEP indicative du cadmium, la DGT (direction générale du travail) a choisi la fourchette haute.
L'arrêté du 14 mai 2019, paru au Journal officiel le 23 mai, fixe une VLEP indicative sur 8 heures à 0,004 mg/m3 pour la fraction inhalable du cadmium et ses composés inorganiques. Jusqu'alors, le cadmium faisait simplement l'objet, depuis une circulaire de 1992, d'une valeur moyenne d'exposition (VME) indicative sur 8 heures de 0,05 mg/m3. Cette même valeur s'appliquait à l'oxyde de cadmium, sur 15 minutes.
L'arrêté prévoit aussi, pour la fraction alvéolaire du cadmium, une "option alternative", précise la notice, "assortie d'une surveillance biologique". Il revient dans ce cas à la médecine du travail d'organiser cette surveillance, afin de s'assurer du respect d'une valeur biologique maximale de 2 µg Cd/g de créatinine dans les urines.
La dangerosité du cadmium, produit toxique (notamment pour les reins), mutagène, reprotoxique, et cancérogène avéré (notamment pour les cancers broncho-pulmonaires), n'est pas une nouveauté. C'est d'ailleurs en 2007 que la DGT a saisi l'Afsset, devenue Anses en 2010, pour mener des travaux d'expertise afin de fixer des VLEP pour le cadmium et ses composés.
Le groupe de travail spécialement constitué a planché de 2010 à 2013, puis le rapport et la note d'expertise ont fait l'objet d'une consultation publique fin 2015. L'Anses a officiellement rendu ses conclusions en mars 2016. Il aura donc encore fallu attendre plus de 3 ans pour que le ministère tranche et signe l'arrêté qui vient de paraître.
Un arrêté qui ne reprend pas les conclusions des travaux de l'Anses et choisit de mettre la limite plus haut.
Le comité d'experts de l'Anses recommandait de fixer une VLEP sur 8 heures de 0,003 mg/m3. L'agence souligne alors dans ses conclusions que "cette valeur limite dite 'pragmatique' n'a pas été élaborée de façon à pouvoir apporter un niveau de protection défini vis à vis des effets cancérogènes".
Une VLEP est qualifiée de "pragmatique" lorsque l'on connaît et que l'on est sûr de certains effets nocifs, mais qu'il n'est pas possible de déterminer, pour ces effets, un seuil de toxicité, ni même de quantifier le risque sanitaire pour de faibles doses. C'est le cas pour les effets cancérogène du cadmium.
"À partir des données épidémiologiques disponibles, il n'a pas été possible d'évaluer correctement la relation dose-réponse pour les effets cancérogène", explique l'Anses. Impossible d'identifier un seuil de concentration de cadmium pour le cancer du poumon (ou de la prostate). Les experts ont donc choisi d'être pragmatiques et de baser leur recommandation sur un autre effet toxique de l'exposition au cadmium.
La VLEP recommandée a été définie en regardant l'atteinte de la fonction rénale, "sans pouvoir savoir, précise le rapport, savoir si cette VLEP-8h pragmatique proposée pourrait éviter d’éventuels effets cancérogènes."
Le secteur le plus concerné par des expositions au cadmium est la métallurgie, mais les travailleurs exposés œuvrent aussi à la fabrication d'équipements électriques (piles et batteries contiennent du cadmium), sont soudeurs, peintres, etc. Selon l'enquête Sumer de 2010, le nombre de salariés exposés est en forte augmentation : 27 700 salariés exposés étaient recensés en 2003, passant à 33 000 en 2010, soit une hausse de 19 %.
"Si cette hausse peut être due, dans une certaine mesure, à un meilleur repérage de ce produit, une partie importante s’explique également par l’essor de la fabrication de batteries (téléphone mobile, ordinateurs portables, etc.) composées notamment de cadmium", expliquent en 2015 Marine Cavet et Sarah Memmi de la Dares avec Martine Léonard, médecin inspecteur du travail.
Au niveau européen, le cadmium fait partie des agents CMR dans le viseur de la Commission. Depuis 2016, Bruxelles propose, lot par lot, de définir de nouvelles valeurs limites d'expositions, dans le cadre de la révision de la directive de 1990 sur l’exposition à des agents cancérigènes ou mutagènes au travail. Le cadmium – et ses composés inorganiques – fait partie du 3e lot, soumis il y a un an.
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La Commission proposait alors de fixer la VLEP à 0,001 mg/m3. Au Parlement européen, la commission des affaires sociales a d'abord assouplit le texte, en prévoyant de laisser le choix aux États membres entre une VLEP de 0,001 mg/m³ et une VLEP à 0,004 mg/m³.
Dans la dernière version, adoptée le 27 mars, les députés estiment "qu'il est à prévoir qu’il sera difficile de respecter une valeur limite de 0,001 mg/m3 à court terme". Ils optent pour une période de transition de huit ans, au cours de laquelle devrait s'appliquer une valeur limite de 0,004 mg/m3. C'est le choix qu'a fait la France.
En France, les VLEP sont fixées par arrêté par le ministère du travail ; elles sont contraignantes ou indicatives. Les VLEP contraignantes s'appliquent aux produits chimiques les plus dangereux et pour lesquels l'exposition peut être mesurée par des méthodes validées. Elles sont listées à l'article R. 4412-149 du code du travail. Les VLEP indicatives s'appliquent à des produits chimiques dangereux, mais pour lesquels l'exposition ne peut être mesurée que par des méthodes partiellement validées. Elles sont listées par l'arrêté du 30 juin 2004 modifié. Une VLEP sur 8 heures signifie que l'exposition devra être mesurée ou calculée par rapport à une période de référence de 8 heures, en établissant une moyenne pondérée dans le temps. |
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