Risque incendie : une prévention globale, de la conception des locaux à l'accueil des pompiers (1/2)

Risque incendie : une prévention globale, de la conception des locaux à l'accueil des pompiers (1/2)

16.01.2019

HSE

Ne pas oublier sous-traitants et intérimaires, renouveler les formations, entretenir le matériel... Comme pour les autres risques, prévenir l'incendie suppose une démarche globale et appréhendée le plus en amont possible.

"Le risque incendie est entré dans les mœurs donc il n'est plus considéré comme un risque majeur [...] il pâtit d'un défaut de prévention", estime Régis Cousin, président de la FFMI (fédération française des métiers de l'incendie). Malgré les progrès, encore 200 salariés sont blessés chaque année dans un incendie sur leur lieu de travail, rapporte Stéphane Pimbert, directeur général de l'INRS. La prévention doit être pensée le plus en amont possible, dès la conception du site, insiste-t-il lors d'une journée technique organisée par la fédération et l'institut le 11 décembre 2018.

"Certaines structures tiennent moins de quinze minutes au feu", se désole Benoît Sallé, de l'INRS. L'architecture et le mode de construction peuvent permettre de mieux résister au feu, limiter sa propagation, mais aussi favoriser l'évacuation le cas échéant (avec des espaces sécurisés, des couloirs assez larges pour se déplacer...). Problème : les architectes ne sont pas du tout formés au risque incendie, reconnaît Michel Garcin, architecte expert de la question. De manière plus générale, le risque incendie doit être vu comme les autres risques professionnels : il impose des mesures techniques et organisationnelles.

 

Des actions de prévention permettent d'éviter qu'un feu ne se déclenche, d'autres de limiter sa propagation et d'autres encore d'assurer l'évacuation ou la mise en sécurité. Le dernier point est évoqué dans un second article : 

► Risque incendie : une prévention globale, de la conception des locaux à l'accueil des pompiers (2/2)

 

Entretien des matériaux

Des normes de construction sur la résistance au feu et le désenfumage sont fixées par le code du travail (une ordonnance du 30 octobre 2018 ouvre la voie à des dérogations). L'implantation des bâtiments peut éviter que le feu ne se propage trop vite. Tous les établissements doivent comporter les dégagements nécessaires permettant une évacuation rapide dans les conditions de sécurité maximale (portes, couloirs, circulations, escaliers, rampes).  "Plus on intervient tard, plus ce qui deviennent des contraintes coûtent chers", constate Philippe Cabaz, du bureau d'étude Cyrus industrie.

Produits de construction, toiture, câbles électriques... certains matériaux permettent aussi de limiter la propagation du feu par les planchers, les traversées, les portes, le système de ventilation ou encore les façades. Malheureusement, même lorsqu'ils sont choisis, ils ne sont pas toujours bien utilisés et suffisamment entretenus, remarque Sébastien Boninsegna, d'Efectis, entreprise d'inspection et certification feu. Il cite le cas de murs coupe feux non porteurs qui au fil des travaux reçoivent finalement de grosses charges, et des matériaux pour lesquels les conditions d'application (temps de séchage, épaisseur...) ne sont pas respectées faute de temps sur le chantier. 

Risque chimique 

Place à l'évaluation du risque. Le feu prend de la rencontre d'un combustible, d'un comburant et d'une source d'inflammation. C'est ce qu'on appelle le triangle du feu. Supprimer l'une des trois composantes peut participer à la prévention du risque incendie. Benoît Sallé donne quelques exemples pour le combustible : le supprimer quand c'est possible, agir sur le stockage des produits et leur manipulation, limiter les quantités, jouer sur la rotation des stocks ou encore vérifier la compatibilité des produits.

Cela suppose d'inventorier tous les produits utilisés, fabriqués et émis, d'identifier leur localité, leur quantité et leurs caractéristiques. Une démarche qui s'approche de celle à adopter pour le risque chimique, en somme. Lire la FDS (fiche de données et sécurité) des produits chimiques est donc essentiel. Faut-il encore qu'elle soit bien rédigée. Thierry Chambolle est presque sûr que l'incendie qui a ravagé son entreprise, Proludic, est parti d'un solvant dont la FDS était incomplète. Il témoignait lors du même colloque.

Il est plus compliqué d'agir sur le comburant. On peut, certes, réduire la teneur en oxygène, par l’introduction d’un gaz inerte, pour rendre l'atmosphère ininflammable, mais attention au risque d'anoxie. Les entreprises qui commercialisent cette pratique assurent qu'elle est pertinente pour les entrepôts, où il n'y a personne. Mais "Les machines ne fonctionnent jamais seules", modère Benoît Sallé. Refroidissement des matériels, diminution de la température de surface des éléments chauffants et le contrôle annuel des installations électriques permettent de jouer sur les sources d'inflammation. 

                  

Entreprises extérieures

L'employeur ne doit pas oublier les salariés d'entreprises extérieures et intérimaires, qui doivent connaître le fonctionnement de l'entreprise (où sont stockés les produits toxiques, quels gestes sont à éviter en présence de substances inflammables...). S'ils réalisent des travaux par points chauds (soudures, ébarbages...), ils doivent détenir un permis feu, dont l'initiative revient à l'entreprise utilisatrice.

De manière plus générale, pour Sébastien Triopon, de la Carsat Nord Picardie, les entreprises extérieures doivent clairement être associées à la prévention du risque incendie, et ce, à plusieurs étapes. Dès le lancement de l'appel d'offres, le cahier des charges devrait informer des risques de l'installation et des contraintes de sécurité qui seront imposées. Ensuite, à la réception des offres, mieux vaut choisir l'entreprise qui propose un mode opératoire qui limite les points chauds. Petite limite de l'exercice : ces précisions ne figurent pas toujours, par crainte de la concurrence. Le risque est évolutif (utilisation de nouveaux produits par exemple), l'entreprise utilisatrice doit bien en informer les intérimaires et salariés extérieurs. 

Extinction

Le code du travail fixe des règles en matière de matériels de détection, d'alarme, et d'extinction. Les systèmes d'extinction agissent par refroidissement, par étouffement, par isolement... L'outil le plus répandu est le sprinkler "solution simple, fiable, performante et éprouvée", décrit Gilles Mangialenti du Gifex (Groupement des fabricants installateurs de systèmes d'extinction automatiques fixes), mais n'offre pas de détection précoce. L'enjeu est de taille parce que l'incendie est "pernicieux, rappelle Benoît Sallé il peut couver des heures voire des mois... mais quand il est là, sa montée est exponentielle".

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Pauline Chambost
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