Si certaines Carsat tentent de les mobiliser à cette disposition du code du travail, peu d’entreprises ont aujourd’hui fait le choix de désigner et former des salariés compétents en santé-sécurité au travail. Des spécialistes HSE ont dernièrement exprimé leur incrédulité quant aux compétences SST de salariés qui ne sont formés que pendant 3 jours, selon le référentiel en vigueur.
Tout employeur, quelle que soit la taille et le secteur d’activité de son entreprise, doit théoriquement désigner depuis le 1er juillet 2012 au moins un salarié "compétent pour s'occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l'entreprise" (L.4644-1 du code du travail). Conscient que les entreprises ne disposent pas nécessairement des compétences en interne, le législateur a prévu qu’elles puissent recourir à des IPRP externes (notamment via le service de santé au travail), aux services de prévention des Carsat et à l'INRS, ou encore à l'OPPBTP et à l'Anact.
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Complémentaires
La désignation d’un SDC (salarié désigné compétent), soumise à l’avis du CSE, n’exonère pas l’employeur de sa responsabilité en matière de sécurité et de prévention des risques. Le SDC a pour mission d’assister l’employeur en matière de SST. Il peut par exemple suivre les données santé-sécurité, contribuer à l’analyse des accidents, aider à rédiger un plan de prévention ou participer à l’évaluation des risques professionnels.
Il travaille avec les représentants du personnel, mais son rôle est différent : le SDC participe à la politique de prévention définie par l’employeur, alors que les membres du CSE contribuent à la prévention en représentant les salariés. Pour exercer leurs missions, les SDC peuvent bénéficier, à leur demande, d’une formation de trois jours, organisée par des organismes de formation habilités ou plus rarement par les Carsat.
Carsat mobilisées
Le dispositif s’adresse davantage aux PME qu’aux grandes entreprises qui ont des services de prévention et de sécurité. Soucieuses de promouvoir la culture de prévention dans les entreprises, des Carsat se mobilisent pour faire connaître ces nouveaux acteurs de prévention. En Rhône-Alpes, une brochure explicative éditée fin 2018 est ainsi le fruit d'une collaboration entre les principaux acteurs institutionnels régionaux de la prévention.
En Bourgogne Franche Comté, lorsque la Carsat signe une convention avec une entreprise, elle exige la désignation d’un ou plusieurs salariés compétents. Même logique pour la Carsat Nord Picardie : les attendus en prévention du programme Mobiprev2 – qui cible les entreprises ayant un fort taux de sinistralité – recommandent en premier lieu de désigner et la former un SDC. "Nous finançons à hauteur de 50 % les investissements des entreprises liées à la formation des salariés compétents", précise Sébastien Verdonck, pilote du programme Mobiprev, au cours d'un colloque sur la culture sécurité organisé par Eurogip le 21 mars 2019.
Formations
L’INRS et l’assurance maladie ont habilité une trentaine d’organismes sur toute la France pour dispenser les formations SDC. Mais celles-ci rencontrent peu de succès auprès des entreprises, soit parce qu’elles méconnaissent le dispositif, soit parce qu’elles préfèrent faire appel à des IPRP extérieurs. "J’interviens dans les entreprises de Bourgogne Franche Comté. Dans 90 % des cas, les entreprises n’ont pas désigné de salarié compétent en SST", observe Yannick Moulin du cabinet de conseil et de formation Cammae. L’an dernier, Cammae a cependant pu organiser cinq sessions de formations SDC pour l’ensemble des entreprises de la région. "Il est plus intéressant d’avoir les ressources en prévention dans l’entreprise plutôt que de faire appel ponctuellement à un IPRP extérieur", continue-t-il.
En Île-de-France, les organismes de formation habilités ont encore plus de mal à sensibiliser les entreprises. "La Cramif ne communique pas sur ce dispositif, notre dernière formation SDC date de plus de six mois", regrette Mathieu Baudis de Formalei. L’organisme Axos en région parisienne a tout simplement retiré de son catalogue la formation SDC en raison de l’absence de demandes. Dans les Bouches-du-Rhône, le cabinet Emergis peine aussi à remplir ses formations SDC. "Habilitée depuis plus de deux ans, je n’ai pu organiser que deux sessions de formations", précise Caroline Jullien d’Emergis.
L’incrédulité de spécialistes HSE
Découvrant un poster de promotion des salariés compétents par les acteurs institutionnels de la santé au travail, William Dab, professeur titulaire de la chaire d’hygiène et sécurité du Cnam, s’est fendu d’un billet critique. "Il est très inquiétant que l’ensemble des acteurs régionaux en santé au travail puisse cautionner un tel décalage entre les besoins et les moyens en accréditant l’idée qu’on devient préventeur en trois jours", écrit ce spécialiste. Un point de vue qui a alimenté des échanges entre préventeurs sur les réseaux sociaux. Certains rejoignant les critiques de William Dab, alors que d’autres voient dans ce dispositif un moyen de favoriser une culture de prévention partagée au sein des entreprises.
HSE
Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement.
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