À compter du 1er octobre 2025, les travailleurs affectés à un poste "pouvant nécessiter une autorisation de conduite ou une habilitation électrique" ne feront plus partie de ceux bénéficiant d'un suivi individuel renforcé par le service de santé au travail. Une nouvelle attestation devra être délivrée par les médecins du travail, qui revient à décider d'une aptitude médicale à une fonction, ce qui est "tout à fait contraire à nos pratiques", s'inquiète la syndicaliste et médecin du travail Anne-Michèle Chartier.
Le décret n° 2025-355 du 18 avril 2025 fait sortir du suivi individuel renforcé (SIR) les salariés qui travaillent sur un poste nécessitant une autorisation de conduite (selon l'article R4323-56 du code du travail) ou une habilitation électrique (article R4544-10 du code du travail). "Il s’agit de deux catégories de visites présentant un intérêt médical jugé limité par les professionnels de santé", nous répondait en mars le ministère du travail, interrogé sur ce décret, alors en préparation. À la place du SIR, le SPST devra, pour certains postes, délivrer au travailleur une "attestation" justifiant l'absence de contre-indications médicales.
HSE
Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement.
Dans l'exposé des motifs du texte publié, le gouvernement explique que cette modification "vise à optimiser les ressources médicales et à les redéployer sur le suivi des salariés affectés à des postes présentant un risque particulier, ainsi que sur les actions de prévention primaire vers lesquelles les missions des SPST (services de prévention et de santé au travail) ont été orientées par la réforme [de 2021]".
Le SIR a été introduit par la réforme de la santé au travail de 2016, qui a supprimé l'avis d'aptitude généralisé et créé la VIP (visite d'information et de prévention), et un de ses principaux décrets d'application, celui du 27 décembre 2016.
Il avait alors été prévu que le SIR – qui inclut un examen médical d'aptitude à l'embauche, et une visite médicale au maximum tous les 4 ans avec une visite intermédiaire au bout de 2 ans, qui peut être faite par l'infirmière en santé au travail – concerne les travailleurs sur des postes à risque. C'est le cas pour ceux exposant à l'amiante, au plomb, à des agents CMR (cancérogènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction) ou des agents biologiques, au risque hyperbare, ou encore au risque de chute de hauteur lors des opérations de montage et de démontage d'échafaudages. Pour ces travailleurs-là, rien ne change. Idem pour les jeunes de moins de 18 ans affectés à des "travaux interdits susceptibles de dérogations", qui doivent être vus tous les ans par le médecin.
Essentiellement afin de maintenir pour eux un examen médical d'aptitude, la réforme avait intégré au SIR les travailleurs titulaires d'une autorisation de conduite (un Caces, généralement) pour des équipements de travail mobiles ou servant au levage de charges – grue de chargement, chariot gerbeur, plates-formes élévatrices mobiles de personnes (Pemp), etc. – ainsi que les travailleurs effectuant des travaux sous tension, et donc titulaires d'une habilitation électrique. Ce sont ces deux catégories qui n'en bénéficieront plus.
Le décret paru la semaine dernière introduit une nouvelle "attestation" – dont le modèle devra être défini par un arrêté. Pour qu'une autorisation de conduite soit valide, il faudra, à compter du 1er octobre 2025, qu'elle soit couplée à une "attestation" délivrée par le médecin du travail "à l'issue d'un examen médical qu'il réalise", indiquant que le travailleur "ne présente pas de contre-indications médicales à la conduite du ou des équipements dont la conduite est autorisée".
Pour les travailleurs qui doivent avoir une habilitation électrique, le décret ne prévoit cette attestation "d'absence de contre-indications médicales" que pour les travaux sous tension (article R. 4544-11) et pour les "opérations au voisinage de pièces nues sous tension". Ce qui représente la très grande majorité des accidents du travail d'origine électriques : ils sont essentiellement dus à un contact direct avec une pièce conductrice sous tension.
Tant pour compléter son autorisation de conduite que son habilitation électrique, le travailleur présentera l'attestation, valable 5 ans, à son employeur, "qui en conserve une copie pendant toute sa durée de validité". Le médecin du travail verse une copie de l'attestation au DMST (dossier médical en santé au travail). S'il refuse de la délivrer, l'employeur ou le salarié peuvent se tourner vers le CPH (conseil des prud'hommes) pour contester.
À titre transitoire, pour les travailleurs qui auront besoin de la nouvelle attestation, il est prévu que les avis d'aptitude délivrés au titre du SIR tiennent lieu, pendant 5 ans à compter de leur délivrance, de l'attestation.
"Pour ces travailleurs, nous délivrons actuellement un avis d'aptitude au poste de travail, alors que là, il s'agirait de décréter une aptitude à une fonction. C'est tout à fait contraire à nos pratiques", s'inquiète Anne-Michèle Chartier, médecin du travail et déléguée nationale CFE-CGC en charte de la santé au travail.
Elle s'interroge : "Concrètement, comment fait-on par exemple, si l'on voit dans quelques mois un cariste qui a fait récemment un infarctus, et à qui on avait délivré une aptitude au poste de travail, laquelle aptitude devient avec le nouveau décret, l'équivalent de l'attestation, valable 5 ans, sans possibilité de la retirer entre temps ?".
Une réflexion serait en cours pour un éventuel recours contre ce décret.
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