Vaccination Covid-19  : les services de santé au travail voudraient vacciner davantage

Vaccination Covid-19 : les services de santé au travail voudraient vacciner davantage

05.05.2021

HSE

Autorisés à vacciner pour participer à la lutte contre la propagation du Covid-19, les services de santé au travail ont accepté volontiers de se mobiliser. Bilan, pour l'heure : la vaccination n'est pas un grand succès, mais il faut dire que les services ont rencontré plusieurs difficultés. Retours d'expériences.

Une vaccination "infinitésimale, plus symbolique qu’autre chose" au CMSM, service parisien de santé au travail interentreprises. "Très peu de demandes" à l’AISMT13. C’est un peu mieux à l’AHI33, avec plus de 600 doses injectées (au 16 avril 2021), mais avec 30 000 adhérents (ce qui représente 300 000 salariés), une centaine de médecins du travail, dont deux coordonnateurs, et une cinquantaine d'infirmiers, le service serait aussi l’un des plus grands de France.

Ce n’est pas faute d’avoir communiqué, pourtant. Tous les services de santé au travail interentreprises interrogés ont mis en place des campagnes de communication, via les employeurs. Certains ont aussi fait passer le message dans les médias. La possibilité de se faire vacciner par la médecine du travail est également rappelée aux salariés pendant les consultations.

Bref, dès qu'ils ont été autorisés à le faire, le 25 février 2021, les services se sont mobilisés pour participer à l’effort de vaccination. Mais tous regrettent de ne pas pouvoir vacciner davantage pour l'instant : "c’est dommage, parce qu’on voit que les gens sont satisfaits de nos centres. C'est plus personnel que les grands vaccinodromes", souligne Aurélia Mallet, médecin coordonnateur de l'AHI33. Carlos Goncalves, directeur du CMSM, confirme : "ceux qui sont venus se faire vacciner nous témoignent d’une grande gratitude".

 

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"Conditions d’éligibilité confuses"

Le point commun entre les différents services ? La faible proportion de personnes éligibles parmi les salariés des entreprises adhérentes. Ils sont 17 000, sur les 160 000 au total, à l’AISMT13, et représentent "un faible pourcentage" des 90 000 salariés suivis par l’AIST84. Pour Carlos Goncalves, le problème vient aussi des "règles d'éligibilité confuses et de leur évolution : elles freinent les employeurs, qui relaient nos informations"

Résultat : les services ont peu de demandes. À l'Acist23, une campagne a été lancée mais les médecins du travail n'ont même pas eu suffisamment de demandes pour ouvrir un flacon (qui contient une dizaine de doses). D'autant que pour Isabelle Hochart, directrice de l'AISMT13, "le salarié vulnérable n’a souvent pas attendu le médecin du travail pour se faire vacciner".

Le fait que l’AstraZeneca – seul vaccin disponible pour les services de santé au travail jusqu’à l'arrivée du Jansenn – soit médicalement réservé aux plus de 55 ans complique la gestion des éventuels reliquats de dosesDes doses restantes ont pu être reçues par des salariés inscrits sur liste d'attente, ou proposées à des salariés non soignants du service. Avec, souvent, la difficulté de trouver des plus de 55 ans.

Difficultés d’approvisionnement

Autre difficulté : l'obtention des doses. En théorie, le médecin du travail se rapproche d’une pharmacie pour commander les doses et se faire livrer. En pratique, "on commande des flacons mais les doses ne nous sont pas livrées", indique Isabelle Hochart. Il est d’ailleurs arrivé, une fois, que le service refuse une demande de vaccination faute de dose disponible. Le son de cloche est identique à l’AIST84 : "des doses qui auraient dû nous être fournies ne l'ont pas été, donc il a fallu annuler certains salariés qui avaient pris rendez-vous", reconnaît Lola Jehlen, responsable communication.

À l’AIST22, la vaccination n’avait d'ailleurs toujours pas pu commencer, au 26 avril. Elle devait débuter le jeudi précédent, mais ils n’ont pas reçu les doses commandées.

Des doses, l’AHI33 en a eu, en revanche. Aurélia Mallet ne rapporte pas de problème particulier au niveau de l’approvisionnement, bien qu’il fluctue de semaine en semaine : dès le départ, ils ont eu un gros lot de flacons d’AstraZeneca parce qu’ils ont beaucoup de médecins. En revanche, c’est l’obtention de doses de Moderna qui a posé problème. Le service a pu proposer ce vaccin à ses entreprises adhérentes du secteur médico-social. 240 primo-vaccinations de Moderna ont été réalisées en deux semaines. Problème : quand les médecins ont passé commande pour les semaines suivantes, l’ARS leur a indiqué qu’elle n’avait plus de doses de Moderna à leur fournir. L’AHI33 a dû annuler 180 salariés qui s’étaient inscrits pour ce vaccin. "On est hyper mobilisés mais on est un peu frustrés parce qu'on nous a coupé l'herbe sous le pied", regrette Aurélia Mallet. 

À noter : l'AHI33 a, le vendredi 30 avril, précisé sur son site que le Moderna pouvait à nouveau être proposé aux personnes éligibles. De son côté, le Gouvernement a annoncé mercredi 5 mai vouloir renforcer la vaccination en entreprise. 100 000 doses d'AstraZeneca devraient être fournies courant mai et l'approvisionnement devrait se faire par un circuit simplifié.

 

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Saga AstraZeneca

À l’AHI33, comme dans les autres services, il reste l’AstraZeneca. Mais "on est victimes de la pub du vaccin", explique Aurélia Mallet. Elle évoque la "réticence des salariés reçus en vaccination, d’autant que certains peuvent avoir accès à un autre vaccin dans un autre circuit".

Au CMSM, seulement deux vacations ont été organisées depuis le début (soit une vingtaine de personnes en tout), et "on a du mal à en remplir une nouvelle", indique Carlos Goncalves, ajoutant que "des personnes s'inscrivent et rappelles pour dire qu'elles ont trouvé autre chose".

L’AIST84, également confrontée à ces réticences, a misé sur une communication mutualisée au niveau régional avec Présanse Paca-Corse. "On a réalisé, avec les autres chargés de communication de la région, qu'on avait les mêmes problématiques : les gens sont à peu près au courant, ils nous contactent et quand on leur dit qu'on vaccine avec de l'AstraZeneca, ils font machine arrière", développe Lola Jehlen. 

Néanmoins, les services interrogés sont unanimes : l'important, pour eux, est de participer à l'effort collectif. Un salarié vacciné est déjà un pas de plus vers une vaccination massive de la population.

Et dans un service autonome, ça se passe comment ?

Chez Schneider Electric, la vaccination a commencé le 9 mars. Une campagne de communication a été mise en place et est actualisée en fonction de l'évolution des conditions d'éligibilité. Les médecins du travail ont commandé les doses d'AstraZeneca avant de prévoir les rendez-vous de vaccination, et ne se sont donc pas trouvés à court.

Ils ont eu beaucoup de sollicitations, "mais pas forcément dans les créneaux d'âge qui font partie de la cible", indique Céline Locquet, médecin du travail au sein du groupe. Les premiers temps, certains salariés en dessous de l'âge requis ont pu être vaccinés avec des doses restantes, mais "dès que la HAS a annoncé que le vaccin était contre-indiqué en dessous de 55 ans, on a arrêté", précise-t-elle.

Le médecin n'a pas trop ressenti de méfiance des salariés envers AstraZeneca, et compte très peu d'annulations de rendez-vous. "Certains salariés ont pu exprimer leurs doutes le jour de la vaccination, mais les doutes ont très vite été dissipés", explique-t-elle.

Les désistements ont surtout eu lieu dans le bassin grenoblois, où la campagne a tardé à se mettre en route – les vaccins sont arrivés fin mars : comme les vaccinodromes étaient déjà ouverts, les salariés n'ont pas attendu la médecine du travail.

Globalement, "quand les gens viennent, ils sont satisfaits : il n'y a pas d'attente comme dans les vaccinodromes et davantage de proximité", conclut Céline Locquet. Au total, 200 salariés ont pour l'instant été vaccinés, sur une cible potentielle de 1400.

 

HSE

Hygiène, sécurité et environnement (HSE) est un domaine d’expertise ayant pour vocation le contrôle et la prévention des risques professionnels ainsi que la prise en compte des impacts sur l’environnement de l’activité humaine. L’HSE se divise donc en deux grands domaines : l’hygiène et la sécurité au travail (autrement appelées Santé, Sécurité au travail ou SST) et l’environnement. 

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Olivia Fuentes
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