"La revitalisation doit être l’affaire de l’entreprise pas de l’Etat"

"La revitalisation doit être l’affaire de l’entreprise pas de l’Etat"

02.12.2016

Gestion du personnel

Mener à bien un PSE c’est aussi prévoir dès le début les conditions de l’après, selon Michel Ghetti, président-directeur général de France Industrie & Emploi (FIE). A condition, toutefois, d'impliquer davantage l'entreprise le plus en amont possible. Le décret modifiant l’obligation de revitalisation changera-t-il la donne ?

Le décret du 28 octobre revoit l’obligation de revitalisation des bassins d’emploi des entreprises de 1 000 salariés et plus qui procèdent à des licenciements économiques d’ampleur. Concrètement, quelle sera la portée de ce texte?

La première avancée concerne la possibilité de signer une convention-cadre nationale de revitalisation lorsque les suppressions d’emplois touchent plusieurs sites implantés dans des départements différents. L’employeur n’a donc plus à négocier avec chaque préfet plusieurs plans de revitalisation lorsqu’il ferme plusieurs sites. Il pourra désormais se concentrer sur les territoires les plus sinistrés et négocier une convention-cadre avec la DGEFP, ce qui est plus simple.

Nous avions déjà utilisé ce procédé, par dérogation, dit alors de "déterritorialisation", pour les plans sociaux d’American Express Voyages, en 2013, et de Téléperformance, en 2010, qui fermaient une quinzaine de sites. Avec, in fine, des résultats très satisfaisants.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Les entreprises pourront également prendre en compte, dans les conventions de revitalisation conclues entre l’Etat et les entreprises, les actions qu’elles avaient engagées deux ans auparavant dans le cadre d’une démarche volontaire. Une proposition que vous aviez préconisée lors de votre audition à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale…

L’anticipation est, de fait, primordiale. La revitalisation doit se mettre en place en amont de l’annonce d’un PSE, sans que l’employeur puisse risquer le délit d’entrave. C’est ce souci d’anticipation qui doit guider tous ceux qui, aujourd’hui, se trouvent confrontés à l’exigence d’un PSE.

La recherche d’entrepreneurs est une activité de moyen terme. Mais, dans les faits, toutefois, le timing pourrait être encore réduit. Selon le texte, le préfet a six mois pour informer l’entreprise de son assujettissement à l’obligation de revitalisation, après la notification du projet de licenciement. L’employeur a alors deux possibilités : soit verser une contribution au Trésor public. Celle-ci ne pouvant être inférieure à deux fois la valeur mensuelle du Smic par emploi supprimé. Soit signer une convention de revitalisation et travailler avec des structures spécialisées pour rechercher des repreneurs. Dans ce dernier cas, il faudra compter un mois supplémentaire pour que l’entreprise transmette le bilan des actions engagées en amont dans le cadre des démarches volontaires… Il s’agit d’une perte de temps  importante avant de se mettre au travail. Il y a là un décalage important entre l’esprit du décret et la démarche des Direccte. Le temps de la revitalisation n’est pas celui de la reconversion.

Comment faudrait-il procéder?

Il faut davantage impliquer l’entreprise, son réseau, son savoir-faire le plus en amont possible. L’administration a tendance à ne pas laisser agir les groupes qui ont pourtant les moyens de mettre en œuvre les actions de revitalisation nécessaires. Après la fermeture du fabricant suédois de roulements à billes SKF à Fontenay-le-Comte, en Vendée, qui a entraîné la suppression de 500 emplois, autant ont été recréés.

D’autant que ces démarches sont importantes en termes d’images. Or, le plus souvent elles se contentent de payer la taxe. Ce dispositif exonère donc les entreprises de toutes responsabilités en transférant l’argent privé vers le public. C’est une vision administrative qui prédomine.

Certes, le contrôle des Direccte et des préfets est nécessaire. Mais l’expérience montre pourtant que chaque fois que l’entreprise s’implique, les résultats sont meilleurs.

Quelles sont les principales actions de revitalisation?

Il y a trois types d’actions pour recréer des emplois de compensation. Tout d’abord, les actions structurantes permettent de consolider un tissu industriel. Il peut s’agir, par exemple, de conforter la recherche, dans une filière déterminée, en lien avec les activités du bassin d’emploi.

Les plans d’actions endogènes, ensuite, visent à détecter des emplois dormants dans une petite entreprise du bassin d’emploi concerné. Les agences de développement public financent beaucoup ce type de projets. Mais cela crée plus d’effets d’aubaine que d’emplois même si c’est le choix préféré des administrations et des collectivités !

Enfin, les plans exogènes visent l’implantation d’entreprises extérieures via des partenariats tissés avec des entreprises d’autres régions ou d’autres pays. Le projet moyen représente 15 à 17 emplois. Or, contrairement à nos voisins allemands ou italiens, par exemple, la France a peu développé cette d’approche. L’exogène est négligé car les Français sont inexpérimentés ou maladroits en matière de marketing territorial opérationnel, hors la seule promotion d’image.

Anne Bariet
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