Si le rôle du manager de proximité est primordial pour susciter l’adhésion de son équipe, il bute sur un manque de moyens et de soutien, selon une étude dévoilée par l’Observatoire de l’engagement. Les explications de Geoffrey Carpentier, co-fondateur de ce think tank*.
L’enquête réalisée par l’Observatoire de l’engagement, début juillet, met en lumière le rôle du manager de proximité. Pourquoi avoir choisi cet angle ?
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
On interroge souvent les DRH ou les directions générales sur leur rôle dans le développement de l'engagement des collaborateurs. Mais à vrai dire, plus que les dirigeants, le manager de proximité nous semble jouer un rôle clef dans l’implication des salariés. C’est lui qui est le plus proche des collaborateurs, qui va organiser le travail et répondre aux sollicitations du terrain. L’engagement est porté par ces managers. A charge pour eux d’insuffler un état d’esprit susceptible de développer cette motivation au quotidien.
Comment y parvenir ?

Plusieurs leviers existent. Mais selon l’enquête réalisée auprès de quelque 1 000 managers de proximité, la reconnaissance au travail et une bonne ambiance sont les deux piliers clés de l'engagement. 56 % des sondés plébiscitent le premier item ; 44 % le second. Viennent ensuite l’autonomie et la responsabilisation ainsi que le développement des compétences. Ils mettent également en avant le souci du bien-être des collaborateurs, l’importance des feed-back, la prise d’initiative et le droit à l’erreur
Accordent-ils de l’importance à ce rôle ?

Il s’agit pour eux d’une responsabilité inhérente à leur fonction et ils estiment faire le job : huit managers de proximité sur dix pensent que leurs collaborateurs sont engagés. Cela ne signifie pas que les salariés qu’ils encadrent sont de bons petits soldats. L’engagement repose pour eux sur l’esprit d’initiative, l’envie de bien faire, la passion, l’enthousiasme. Ces qualités sont jugées beaucoup plus probantes que l’adhésion à la stratégie de l’entreprise, à sa culture, ses valeurs ou encore au présentéisme. Des disparités existent toutefois en fonction de la taille de l’entreprise. Les managers les mieux lotis sont ceux qui travaillent dans les PME ou les ETI. De fait, les managers de proximité employés dans les grands groupes peinent à jouer ce rôle moteur. Ainsi seuls 7 % de ces professionnels se disent capables de répondre aux attentes des salariés qu’ils encadrent dans les grandes entreprises, contre 18 % pour les autres managers.
Pourquoi cet écart ?
Parmi les hypothèses, on peut dire que les managers de proximité des grandes entreprises ont moins d’autonomie, de leviers d’action pour développer l’engagement. Ils sont peu valorisés, la multiplicité des échelons intermédiaires atténue voire rend invisibles leurs efforts. Sont-ils les véritables instigateurs de telle ou telle initiative ? Ou n’est-ce pas le N+2, le N+3 ? A l’inverse, dans les petites structures, la distance qui les sépare du dirigeant est réduite ; ils sont en prise directe avec l’état-major. Ce qui facilite la visibilité de leurs actions. Et ainsi leur légitimité.
Quels sont les moyens mis à leur disposition?
C’est là que le bât blesse. Ils ne disposent pas toujours de latitude pour reconnaître et valoriser le travail accompli. D’autant que dans les grandes entreprises, ils doivent caler leurs pratiques sur les programmes très "top-down", décidés au plus haut de la hiérarchie. Aussi leurs marges d’autonomie sont-elles assez faibles. Résultats ? A peine la moitié des managers de proximité considèrent avoir les coudées franches pour accorder une formation et 45 % pour décider de l’attribution d’une prime pour récompenser les plus performants. Par ailleurs, ils n’ont pas toutes les cartes en main pour choisir librement d’une mobilité d’un collaborateur voire d’une mission temporaire. Enfin, seuls 39 % peuvent diligenter une enquête interne pour mesurer et piloter l’engagement des salariés.
Quelles sont les autres difficultés auxquelles ils sont confrontés ?

Outre l’absence de moyens, ils se heurtent à la résistance au changement, certains collaborateurs ne souhaitent pas que leur N+1 bouleverse les habitudes, mette en place des pratiques différentes. Les réfractaires ne sont pas forcément les plus âgés ; il s’agit d’un état d’esprit. Tout l’enjeu étant alors d’accompagner ces transformations en impliquant l’ensemble de l’équipe. Ils déplorent également le manque de perspectives d’évolution pour les personnes qu'ils gèrent; la montée en compétences bute de fait sur ce type d’obstacles. Ils dénoncent également le manque de temps à consacrer à leur équipe. Leur quotidien étant accaparé par des tâches de court terme ; gérer les plannings, les indicateurs de productivité, les recrutements... La priorité est le plus souvent donnée à l’atteinte des objectifs à court-terme de la société. Mais cela peut se faire au détriment d’un dialogue continu avec les membres du groupe. Si ce n’est pour résoudre des tensions, voire gérer des personnalités difficiles.
Sont-ils soutenus par leur hiérarchie ?
Ils pourraient l’être davantage. Car on se préoccupe pas encore assez du manager de proximité. Il est souvent le parent pauvre des politiques managériales voire des politiques RH. 44 % critiquent l’appui des directions des ressources humaines et 36 % des directions d’entreprise. Leur manager est, toutefois, la personne référente, avec 77 % d’avis favorables.
Comment les managers de proximité vivent-ils l'arrivée des nouvelles technologies et leur impact sur la fonction managériale?

C’est un sujet clef mais peu d'entreprises s’y sont encore vraiment attelées. Si toutes sont conscientes de la nécessité de passer d’une culture du contrôle à une culture de la responsabilisation, peu ont franchi le pas. De fait, en sus de notre enquête quantitative, nous avons conduit une enquête qualitative. Mais parmi plus de 100 sociétés contactées, seule une dizaine d’entre elles nous ont répondu ; les autres nous indiquant qu'elles ne s'étaient pas vraiment emparées du sujet. Aujourd'hui, l’information est partout, les attentes des collaborateurs évoluent… Il y a une vraie envie d’aller vers des pratiques plus collaboratives et plus responsables. Quelques pionnières ont toutefois pris le sujet à bras-le-corps. C’est le cas, par exemple, de Covea, un assureur mutualiste, qui a investi dans le co-développement, les échanges de pratiques, le coaching à distance… D’autres ont opté pour des espaces de discussion digitaux, via des plateformes de dialogue, pour accueillir et recevoir les feedback des équipes… Les RH ont un vrai rôle à jouer dans la co-construction et la coordination de ces programmes. Les managers de proximité les attendent sur ce terrain.
* Egalement partner KPMG, co-fondateur de l’entreprise de conseil Carewan by KPMG
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