"Un rachat à la barre du tribunal de commerce est très normé", indique la directrice juridique du Figaro

"Un rachat à la barre du tribunal de commerce est très normé", indique la directrice juridique du Figaro

19.01.2017

Gestion d'entreprise

Bénédicte Wautelet, directrice juridique du groupe Figaro, revient sur les particularités d’une telle opération et révèle ce qui, selon elle, a fait le succès de l’offre du Figaro sur Viadeo.

Figaro Classifieds, filiale du Groupe Figaro, a racheté Viadeo, le réseau social professionnel, pour 1,5 million d’euros. Le groupe est un habitué des opérations de croissance externe et mène, depuis plusieurs années, une politique de diversification. Ce rachat occupe toutefois une place à part, car il est le résultat d’une reprise à la barre.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Quel est le degré d’implication de votre direction juridique dans les opérations d’acquisition du Groupe Figaro ?

Nous menons seuls, en interne, la plupart des rachats. Le Groupe dispose d’un collaborateur dédié à la recherche de cibles. Les dossiers sont présentés devant un comité d’investissement, dont je fais partie puis, sauf rachat de très grande taille ou aux spécificités fortes, notre service juridique prend en charge l’opération. Notre direction comptait 5 juristes et 3 assistantes para légales avant le rachat de Viadeo. La juriste de ce dernier vient de nous rejoindre. Nous avons un profil spécialisé dans le droit des sociétés et des rachats et d’autres plus orientés vers le droit commercial, des contrats, d’internet ou la propriété intellectuelle. Les clauses liées à internet et à la propriété intellectuelle sont de plus en plus complexes à gérer lors d’acquisitions.

Vous avez racheté Viadeo auprès du tribunal de commerce de Paris : en quoi est-ce différent d’une acquisition classique ? 

Je n’avais jamais mené de rachat à la barre pour le compte du Groupe Figaro, qui pratique habituellement des opérations en direct. Les implications sont nombreuses. En amont, les contraintes administratives sont lourdes et complexes. Le travail post-acquisition est également très différent par rapport à un cadre classique, puisqu’il s’agit d’un rachat d’actifs et non d’actions. Les actifs rachetés doivent donc s’intégrer dans notre société opérationnelle. Une fois la décision du tribunal révélée, il faut procéder de manière extrêmement rapide. Nous devons notamment intégrer 78 personnes, ainsi que 20 stagiaires, tout en rassurant chacun. Nous travaillons, pour cela, en étroite collaboration avec la Direction des ressources humaines ainsi qu’avec les équipes techniques et commerciales. Même si les équipes sont intégrées, il est essentiel pour nous de conserver la marque et le site Viadeo.

Vous avez choisi de faire appel à un conseil extérieur ?

Un rachat à la barre du tribunal de commerce est très normé et demande une bonne connaissance du secteur du retournement. Nous avons donc fait appel à un cabinet spécialisé dans ce domaine,  le cabinet d’avocats Altana. Le travail juridique à fournir pour présenter un dossier de reprise est colossal, car il implique notamment de lister tous les actifs sur lesquels porte l’offre : contrats, fournisseurs, salariés, etc. Il faut également considérer que l’on est en concurrence avec d’autres groupes, proposer un prix de rachat et un projet solide. En revanche, nous n’avons pas fait appel à une banque conseil et avons déterminé seuls le prix d’achat proposé devant le Tribunal.

A quoi tient le succès de votre offre ?

Nous avions un projet cohérent, assurant une pérennité de l’activité. De plus, être un acteur important sur le secteur des annonces en ligne a joué en notre faveur. Nous avons su convaincre à la fois le comité d’entreprise de la société et le juge, auprès duquel nous avons passé une audience de plus de 5 heures. Nous avons tenté de faire preuve d’une grande réactivité, à la fois pendant la constitution de notre dossier, puis au cours cette audience, apportant des réponses et solutions concrètes aux questions posées. Le fait que nous gérions habituellement nos acquisitions en interne nous a servi, nous fonctionnons avec des processus de prise de décision courts. Notre direction juridique est transverse, au niveau du groupe. Notre expertise nous permet de connaître les besoins et le fonctionnement de chaque filiale.

Quels conseils donneriez-vous pour réussir une reprise à la barre ?

Cette procédure est complexe, je recommanderais donc de faire appel à un conseil de niche, qui dispose d’une réelle expertise sur ces opérations. Il est nécessaire d’avoir une grande écoute des administrateurs judiciaires. Un tel projet est un travail d’équipe, qui implique juristes, financiers, opérationnels, et demande que tous soient très réactifs.

propos recueillis par Ingrid Labuzan
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