A quelles conditions un salarié placé en activité partielle peut-il travailler chez un autre employeur ?

A quelles conditions un salarié placé en activité partielle peut-il travailler chez un autre employeur ?

14.04.2020

Gestion du personnel

Alors qu'un très grand nombre de salariés ont été placé en activité partielle par leur entreprise, des secteurs manquent de main-d'oeuvre. A quelles conditions, les salariés au chômage partiel peuvent-ils pourvoir ces postes ? Rappel des règles applicables.

Le gouvernement incite les salariés placés en activité partielle à occuper des postes dans des secteurs où les besoins se font sentir, comme dans l'agriculture. Le ministère du travail a même lancé une plateforme qui s'adresse aux demandeurs d'emploi et aux salariés placés en activité partielle qui souhaitent pourvoir des postes vacants. Ces salariés peuvent ainsi cumuler allocation de chômage et rémunération chez un autre employeur que leur employeur habituel. 

Comment ce cumul d'activité est-il encadré par le droit du travail. Nous récapitulons les textes applicables.

Possibilité de cumul 

La circulaire du 12 juillet 2013 sur l'activité partielle reste, pour une majeure partie de ses dispositions, applicable. Celles relatives au cumul activité partielle et emploi demeurent pleinement applicables, comme nous l'a confirmé le ministère du travail. 

Ainsi, rien n'empêche un salarié placé en activité partielle d'occuper un autre emploi pendant toute cette période, sous réserve que son contrat de travail ne contienne pas une clause d’exclusivité. "Sans mention expresse d’une telle clause dans son contrat de travail, il ne pourra être opposé au salarié un impératif d’exclusivité vis-à-vis de son employeur", précise ainsi la circulaire. 

Le salarié se doit toutefois de respecter son obligation de loyauté et de non concurrence. "Ceci implique que le salarié ne doit pas travailler pour le compte d’un autre employeur concurrent ou pour son propre compte de manière concurrente à son employeur", souligne la circulaire.

Cumul de l'indemnité et de la rémunération

Le salarié doit bien veiller à informer son employeur de sa décision d’exercer une activité professionnelle chez un autre employeur pendant la suspension de son contrat de travail en précisant le nom de l’employeur et la durée prévisionnelle de travail.

Le salarié perçoit alors de manière concomitante l’indemnité due au titre de l’activité partielle et la rémunération due au titre de l'emploi occupé temporairement.

Rupture d'un des deux contrats de travail

A l’issue de la période d’activité partielle, le salarié peut décider :

  • de reprendre le travail chez son employeur principal ; il doit alors rompre alors le contrat de travail qu’il a contracté chez un autre employeur ;
  • de démissionner de son emploi initial.  

 Si le questions-réponses du ministère du travail sur l'activité partielle en période de coronavirus n'apporte pas de précisions supplémentaires, une note interne que nous avons pu consulter, apporte de nouvelles informations relativement à la rupture du contrat de travail dans une telle situation.   

"Afin de sécuriser les deux parties, notamment au moment de la reprise d'activité auprès du premier employeur (employeur A), l'employeur A mettant un salarié en activité partielle devrait fixer une durée probable de l'activité partielle afin que le salarié puisse conclure un autre CDD (idéalement, un CDD à échéance fixe) avec un autre employeur d'une durée égale ou inférieure à celle de l'activité partielle (par exemple, si la durée probable de l'activité partielle est de quatre semaines, le salarié ne devrait pas être encouragé à conclure un CDD saisonnier de trois mois) ; l'employeur A et le salarié devraient en outre convenir d'un délai de prévenance pour la reprise de l'activité", précise ainsi le ministère du travail dans ce document. 

Le ministère attire l'attention de l'administration sur certains points. "Dans l'hypothèse où le CDD dans l’entreprise B est en cours, au moment de la reprise de l'activité de l'entreprise A, le salarié devra rompre le CDD conclus avec l’entreprise B de manière anticipée s'il privilégie son activité dans l'entreprise A. Pour rompre le contrat dans l'entreprise B, le salarié devra en tout état de cause respecter les conditions contractuelles de préavis et la rupture anticipée ne peut intervenir qu'à compter de la reprise du  contrat, c'est à dire après la période d'activité partielle. La reprise de l'activité de l'entreprise A ne constitue pas en tant que tel un motif de rupture du CDD conclus avec l’entreprise B. Ni la démission du salarié en CDD, ni une clause libératoire permettant la rupture par l’une ou l’autre des parties, au terme d’un an d’exécution du contrat, ne sont autorisés en droit. Seul le motif de rupture anticipée « par accord des parties » (L.1243-1) trouverait pleinement à s'appliquer afin que le salarié ne s'expose pas au risque de devoir verser des dommages et intérêts".

Prêt de main-d'oeuvre

En cette période particulière, de nombreux salariés connaissent une baisse importante de leur activité alors même que beaucoup d'entreprises se trouvent confrontées à un manque de personnel. Pour limiter le recours à l'activité partielle, le ministère du travail souhaite faciliter le prêt de main d'oeuvre temporaire entre entreprises, sous réserve de l'accord préalable du salarié et des entreprises concernés. Leurs CSE respectifs, s'ils existent, doivent également être consultés.
Il s'agit d'un prêt de main d'oeuvre non lucratif : le salarié conserve son contrat de travail chez son employeur d'origine, qui continue à lui verser 100 % de son salaire habituel, et se fait ensuite rembourser les sommes correspondantes (salaire et charges sociales afférentes) par l'entreprise d'accueil, étant entendu que l'entreprise d'origine ne doit tirer aucun bénéfice de cette opération. Le salarié reste soumis aux conventions et accords en vigueur dans son entreprise d'origine.
Selon le ministère, " cela doit permettre à des entreprises exerçant une activité essentielle à la vie de la nation de pouvoir être maintenues sans interruption afin de permettre aux Françaises et aux Français de s'approvisionner et de protéger leur santé".
Concrètement, ce prêt est possible entre entreprises appartenant à un même groupe mais également entre des entreprises sans lien l'une avec l'autre.
La mise à disposition doit être formalisée par une convention signée entre les deux entreprises intéressées, le salarié devant ensuite signer avec son employeur un avenant à son contrat de travail précisant les modalités du détachement (durée, poste occupé, lieu et horaires de travail, période probatoire éventuelle ...).

Des modèles d'avenant au contrat de travail et de convention de mise à disposition sont disponibles sur le site du ministère.

A l'issue de la période de mise à disposition, le salarié doit retrouver son poste d'origine ou équivalent, aux conditions antérieures. Son évolution de carrière et sa rémunération ne doivent pas être affectées par la période de prêt.

 
Quid des intérimaires ? 

Enfin, la question se pose pour les salariés intérimaires. "En cas d'activité partielle, le contrat de travail liant le salarié temporaire à son employeur, ou à l’entreprise de travail temporaire, est suspendu. Le salarié en mission d’intérim qui perçoit l’indemnité d’activité partielle peut par conséquent exercer une activité salariée pour un autre employeur qui est, obligatoirement, une autre entreprise", précise la circulaire de 2013.

"Il est en impossible pour le salarié de souscrire un autre contrat de mission chez le même employeur (entreprise de travail temporaire) pendant les périodes d’activité partielle. L’entreprise de travail temporaire ne peut prétendre simultanément au cumul d’un nouveau contrat de mission et à l’activité partielle pour un même salarié".

En conséquence, conclut la circulaire, "au terme de la période d’activité partielle, le salarié devra choisir entre ses deux contrats « en cours » et rompre (de manière claire et non équivoque) celui qu’il ne pourra honorer jusqu’à son terme".

 

Le cumul activité partiel / emploi en Europe

Andrea Garnero et Emanuele Ciani de l'OCDE ont fait un travail de comparaison avec ce qui se passe dans certains pays européens en matière de cumul d'activité partielle et d'emploi (*). 

" En Italie, il est possible de travailler mais alors le salarié le revenu lié à l'activité partielle. Il n'y a donc aucune incitation à cumuler activité partielle et emploi. Certains économistes proposent de changer cela et d'autoriser le cumul car certains secteurs (notamment le secteur agricole) auront besoin de main d’œuvre. Au Royaume Uni, il est possible de cumuler le nouveau régime d’activité partielle qui vient d’être introduit (le Coronavirus Job Retention Scheme) avec un autre emploi.

En Allemagne il n'était jusqu'à présent pas possible de cumuler le Kurzarbeit avec un autre emploi, mais pour cette crise des exceptions ont été introduites pour des secteurs « essentiels » (services médicaux au sens large et prestataires,  logistique, vente au détail d'aliments - par exemple, vente ou remplissage d'étagères, production alimentaire y compris l'agriculture)". 

(*) Article en italien accessible sur ce site. 

 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

Découvrir tous les contenus liés
Florence Mehrez avec Marie Excoffier
Vous aimerez aussi