Affaire du siècle : l'Etat sommé de prendre toutes les mesures utiles pour réparer le préjudice

13.10.2021

Environnement

La réparation devra être effective au 31 décembre 2022 et l'injonction n'est pas assortie d'astreinte.

Le 14 mars 2019, l'association Notre Affaire à Tous a déposé en partenariat avec Greenpeace, Oxfam et la Fondation pour la Nature et l'Homme une requête devant le tribunal administratif de Paris pour carence fautive de l’État dans son action climatique, afin d’obtenir sa condamnation à réparer leur préjudice moral mais aussi le préjudice écologique, et de mettre un terme aux manquements de l’Etat  (v. notre actualité du 18/03/19 "L'Affaire du siècle portée devant le tribunal administratif").
Dans une décision du 3 février dernier, se basant sur les travaux du GIEC et de l'ONERC, le tribunal a reconnu l'existence d'un préjudice écologique lié au changement climatique. Afin de déterminer les mesures devant être ordonnées à l’Etat pour réparer le préjudice causé ou prévenir son aggravation, les juges ont prononcé un supplément d’instruction, assorti d’un délai de deux mois (v. notre actualité du 3/02/21 "L'affaire du siècle, une nouvelle décision historique en matière climatique").
Par un jugement du 14 octobre 2021, le tribunal enjoint à l'État de réparer les conséquences de sa carence en matière de lutte contre le changement climatique. Il ordonne ainsi que le dépassement du plafond des émissions de gaz à effet de serre (GES) fixé par premier budget carbone (2015-2018) soit compensé au 31 décembre 2022, au plus tard.
Dépassement du premier budget carbone
D'abord, le tribunal considère qu'il ne lui appartient pas, saisi d’un tel litige tendant à la réparation du préjudice écologique et à la prévention ou la cessation des dommages constatés, de se prononcer sur le caractère suffisant de l’ensemble des mesures susceptibles de permettre d’atteindre une réduction de 40 % des GES d’ici 2030 (sur ce sujet, v. notre actualité sur l'affaire de Grande-Synthe du 01/07/21 "Climat : le Gouvernement contraint d'agir sous neuf mois").
Il lui appartient par contre de vérifier, à la date de son jugement :
- si ce préjudice perdure, et
- s’il a déjà fait l’objet de mesures de réparation.
En l'occurrence, pour le tribunal, s’il y a lieu de prendre en compte une diminution des émissions de GES de 47 Mt CO2eq en tant qu’elle permet, pour partie, de réparer en nature ce préjudice écologique -quand bien même elle serait liée de façon prépondérante aux effets de la crise sanitaire- , il y a également lieu de constater que ce préjudice perdure à la date du jugement à hauteur de 15 Mt CO2eq.
Toutes les mesures sectorielles utiles
Ainsi, le tribunal ordonne au Premier ministre et aux ministres compétents de prendre toutes les mesures sectorielles utiles de nature à réparer le préjudice à hauteur de la part non compensée d’émissions de GES au titre du premier budget carbone, soit 15 Mt CO2eq, sous réserve d’un ajustement au regard des données estimées du CITEPA connues au 31 janvier 2022.
Une grande latitude est laissée en la matière, puisque le tribunal énonce que les mesures concrètes de nature à permettre la réparation du préjudice "peuvent revêtir diverses formes et expriment, par suite, des choix relevant de la libre appréciation du Gouvernement".
Délai suffisemment bref

S’agissant de l’effet cumulatif du préjudice lié à la persistance des GES dans l’atmosphère et des dommages susceptibles d’en résulter, en l’absence d’éléments permettant de quantifier un tel préjudice, et alors que la demande de versement d’un euro symbolique en réparation du préjudice écologique a déjà été regardée comme dépourvue de lien avec l’importance de celui-ci, le tribunal décide d’édicter de telles mesures dans un délai suffisamment bref pour prévenir l’aggravation de ces dommages.

Au regard du quantum du préjudice constaté, il lui apparaît raisonnable que cette réparation soit effective au 31 décembre 2022, au plus tard.
Le tirbunal n’assortit pas cette injonction d’une quelconque astreinte.

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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