Anticorruption : quel bilan, deux ans après la loi Sapin II ?

Anticorruption : quel bilan, deux ans après la loi Sapin II ?

21.01.2019

Gestion d'entreprise

De ses dires, il reste encore «beaucoup à apprendre» à l’Agence française anticorruption.

« Loi Sapin II, 2 ans après : bilan et perspectives ». Tel était le thème de la conférence d’ouverture du nouveau cycle de formation sur la prévention de la corruption organisée le 16 janvier à l’École de formation professionnelle des barreaux de la cour d’appel de Paris (EFB). Une formation « conçue à plusieurs mains » avec l’Agence française anticorruption (AFA), le Cercle Montesquieu, le barreau de Paris et l’EFB, a précisé son directeur, Pierre Berlioz.

Destinée aux juristes d’entreprise et aux avocats, elle s’appuie « sur une grande diversité des intervenants pour avoir des points de vue complémentaires », a-t-il ajouté. Objectif : faire monter en compétences tout le monde, juristes et avocats.

« Le contrôle est aussi du conseil, il est pédagogique »

En l’espace de 2 ans, « nous avons beaucoup appris mais il nous reste encore beaucoup à apprendre », a déclaré Gérald Bégranger, directeur adjoint de l’AFA. Hormis « les grands groupes [qui] n’ont pas attendu l’AFA pour mettre en place des programmes anticorruption, la plupart des entreprises ne sont pas au niveau de conformité des standards internationaux » et « le sens profond de l’action de l’Agence est d’aider les entreprises à se mettre à niveau », a-t-il souligné.

« S’agissant des administrations publiques, la situation est différente » : « nous n’avons pu que constater qu’il manque une culture de la conformité anticorruption » et « la mission de l’AFA est d’insuffler cette culture ».

Et en matière de contrôle, « il n’y a pas eu de saisine de la Commission des sanctions [de l’AFA] parce que nous avons été gentils (…) et parce que les entreprises ont amélioré leurs dispositifs à l’issue du contrôle (...). Le contrôle est aussi du conseil, il est pédagogique », a-t-il pointé.

« Une révolution préventive »

« Je n’ai pas encore eu la chance d’être contrôlé », a plaisanté Nicolas Guérin, président du Cercle Montesquieu et directeur juridique groupe d’Orange, avant de confirmer que « le contrôle est très pédagogique, c’est effectivement ce que nous disent les entreprises contrôlées ».

« Pour nous [directeurs juridiques], c’est une révolution, une révolution préventive », et « nous partageons beaucoup nos expériences, notamment avec ceux qui ont été contrôlés ».

Reste que sur le terrain de la conformité (RGPD, anticorruption…), « l’année a été très dure pour les petites entreprises », a-t-il souligné, avant d’en appeler à la bienveillance de l’Agence à l’égard de ces dernières.

Des questions encore en suspens autour de « la loi de l’AFA »

« L’AFA dit que ses textes ne sont pas des textes de loi, mais c’est la loi de l’AFA, avec des lignes directrices assez précises », a observé l’avocate Dominique Dedieu, avant de relever un certain nombre de points qui, selon elle, méritent d’être soulignés, voire éclaircis.

A commencer par « l’excellente coopération de l’AFA avec d’autres autorités, telles que l’Autorité de la concurrence, la CNIL ou Tracfin ». Elle vise à favoriser « les échanges d’informations entre autorités », et il est important que « les entreprises le sachent », a-t-elle déclaré.

Se pose également la question « des nombreux entretiens menés pendant ou en dehors des contrôles » en l’absence d’une tierce personne et sans établir de procès-verbal. Un sujet sur lequel « il serait bien que l’AFA établisse une politique et une pratique commune ».

L’Agence devrait aussi communiquer davantage « sur ses actions à l’égard des personnes publiques parce que les entreprises se sentent très visées » alors que la lutte contre la corruption concerne tout le monde… Ou encore, s’agissant de la mise en œuvre de la loi de blocage de 68 - une « mission impossible », selon l’avocate -, « il faudrait que l’AFA nous aide ».

« Une problématique d’appropriation »

En 2018, « l’AFA a mené 43 contrôles auprès de 28 acteurs économiques - dont 11 filiales de groupes étrangers - et 15 acteurs publics ». Et elle a produit sept guides pratiques, dont certains, « en cours de validation, seront publiés dans les prochaines semaines », a précisé Renaud Jaune, sous-directeur du conseil, de l’analyse stratégique et des affaires internationales de l’AFA.

Ce dernier a également souligné « la grande maturité technique » acquise par les équipes de l’Agence, laquelle a commencé « à construire un réseau des agences anticorruption, non pas pour travailler sur des dossiers - cela relève de l’entraide pénale - mais sur un certain nombre de thématiques, telles que les paiements de facilitation ».

L’anticorruption « est avant tout une problématique d’appropriation, (…) et il n’y a pas de modèle unique d’appropriation », a-t-il poursuivi. Tout en notant que « le monde des acheteurs et celui des juristes se sont beaucoup mobilisés ».

« La loi nous oblige à adapter nos standards aux particularités des acteurs », a-t-il rappelé.

Or, « il y a clairement un seuil en dessous duquel le standard universel ne fonctionne pas ». « L’adaptation à la taille des entreprises est indispensable » et l’Agence y travaille, a-t-il assuré. Avant de rappeler qu’il s’agit avant tout de « mettre en place une politique de management des risques dont l’objectif est de dédouaner l’entreprise », si son programme de prévention est effectif.

 

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La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Miren Lartigue
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