Application de la liquidation judiciaire simplifiée, mesure d’administration judiciaire

21.06.2021

Gestion d'entreprise

Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire simplifiée ou la décision du président, qui l’applique à une liquidation déjà ouverte ou prononcée, est une mesure d’administration judiciaire.

Parmi les conditions d’application de la liquidation judiciaire simplifiée, figure l’absence de bien immobilier (C. com., art. L. 641-2, al. 1er). Or, en l’espèce, un entrepreneur individuel faisait grief à un arrêt d’appel d’avoir prononcé à son égard une liquidation judiciaire simplifiée alors qu’il était propriétaire d’un bien immobilier. À s’en tenir à la lettre du texte, cette procédure simplifiée n’aurait pas dû être appliquée, toutefois, la Cour de cassation rejette le pourvoi.

La liquidation simplifiée peut être ouverte par le tribunal directement, ou prononcée suite à une conversion de procédure ; le président du tribunal peut également appliquer les règles de la liquidation judiciaire simplifiée à une liquidation judiciaire déjà ouverte ou prononcée. Or, comme prend soin de le préciser la Cour de cassation, ces décisions peuvent être modifiées, à tout moment, dans les conditions prévues par l’article L. 644-6, c’est-à-dire par un jugement spécialement motivé. Mais surtout, aux termes de l’article R. 644-1, selon la Cour de cassation, ce jugement ou cette décision constituent des mesures d’administration judiciaire non susceptibles de recours (Cass. com., 2 juin 2021, n° 19-25.556, n° 540 FS-P). Partant, le moyen reprochant à l’arrêt d’appel d’avoir décidé que la liquidation judiciaire serait ouverte selon les modalités de la liquidation judiciaire simplifiée est irrecevable.

La décision ne surprend pas, tout d’abord parce que la Cour de cassation avait déjà rendu une décision dans le même sens (Cass. com., 4 mars 2008, n° 07-10.033). Ensuite, parce qu’il peut être soutenu qu’il n’y a aucune raison de faire sur ce point, une distinction entre la décision d’appliquer la liquidation judiciaire simplifiée par le président et celle rendue dans le jugement ouvrant ou prononçant la liquidation comme semble le suggérer l’article R. 644-1.

Certes, il peut également être soutenu qu’au moment où le tribunal ouvre la liquidation judiciaire, il ne dispose pas nécessairement de tous les éléments d’information et en particulier, l’absence de bien immobilier, au moins lorsqu’il s’agit d’une liquidation judiciaire directe. Mais aussi bien, le tribunal peut, à tout moment, modifier ces décisions pour revenir à la liquidation « de droit commun » comme le rappelle la Cour de cassation, et ce sera le cas, précisément lorsque la procédure simplifiée ne peut pas être clôturée dans les délais légaux, en raison notamment de la difficulté de réaliser un bien immobilier rapidement.

Mais encore faut-il que ce bien immobilier entre dans le périmètre de la procédure collective. Or, même si nous n’avons aucune indication en l’espèce, la condition d’absence de bien immobilier a perdu de sa pertinence au moins lorsqu’il s’agit de la résidence principale d’un entrepreneur individuel ; en effet, le législateur avait énoncé cette condition car la réalisation d’un immeuble peut prendre du temps. La résidence principale de l’entrepreneur individuel ne pouvant être réalisée par le liquidateur, sa présence ne retarde pas le déroulement de la procédure et sans doute serait-il pertinent aujourd’hui de supprimer la condition d’absence de bien immobilier à tout le moins lorsqu’il s’agit de la résidence principale du débiteur personne physique.

Philippe Roussel Galle, Conseiller scientifique

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