Débat sur les seuils de désignation du commissaire aux comptes, préparation de la facturation électronique, suppression éventuelle des formulaires DAS 2 et 2067, audit du numérique à imposer aux entreprises... Vendredi dernier, les présidents du Cnoec et de la CNCC ont livré leur analyse des dossiers en cours dans le contexte politique nouveau tant en France que dans l'Union européenne.
"On a gagné une bataille mais pas la guerre. Les politiques vont changer mais les permanents et les hauts fonctionnaires sont toujours là. Ils ont toujours cette idée de faire que le relèvement des seuils des commissaires aux comptes est une disposition de simplification facile qui ne coûte rien et qui leur permet d'annoncer des fausses informations, des économies énormes qui n'en sont pas en fait". Yannick Ollivier, président de la CNCC, est vigilant face à l'éventualité d'une nouvelle tentative de relèvement des seuils d'audit légal des comptes après celle avortée au début du printemps. "Il ne faut pas faire de triomphalisme. Donc on bosse toujours parce qu'on pense qu'effectivement ça peut revenir", résume-t-il vendredi dernier lors de son déplacement à Deauville pour le congrès de l'Ifec, c'est-à-dire deux jours avant le second tour des élections législatives.
Tout en affichant son soutien à Yannick Ollivier sur ce sujet, Cécile de Saint Michel, présidente du Cnoec, s'interroge sur les futures mesures de simplification qui impacteraient les experts-comptables. "Je ne sais pas ce que la loi de simplification va devenir", pointe-t-elle lors de ce même congrès. En effet, rien ne dit que la nouvelle Assemblée nationale va se pencher sur ce texte que le Sénat n'a pas terminé d'examiner en 1ère lecture. L'une des mesures qui intéresse le Cnoec porte sur la facturation électronique. Une mesure portée via un amendement que la chambre haute a rejeté.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
"La DGFip tarde un peu sur l'annuaire dont on a besoin tout de suite. Avec Boris Sauvage [c'est le vice-président du Cnoec en charge des études numériques], on a eu l'idée de dire qu'on va prendre l'annuaire européen qui s'appelle Peppol et d'en décliner la branche française qui n'existe pas. Et que c'est le Conseil national qui s'en occupe, qui l'administre s'il le faut parce que personne ne voulait le faire. Comme ça, on va accélérer la mise en place de la facture électronique avec tous les avantages pour les cabinets et les entreprises. Quand c'est passé au Sénat, [les sénateurs] n'ont pas compris. Ils ont cru qu'on voulait faire un annuaire concurrent de celui de la DGFip. On ne s'est certainement pas très bien expliqué avec eux. On s'est dit qu'on allait mieux le présenter à l'Assemblée nationale. Malheureusement, entre-temps, notre président de la République a décidé de dissoudre l'Assemblée nationale", rappelle-t-elle.
Cécile de Saint Michel regrette aussi le sort réservé à deux propositions faites par le Cnoec. Il s'agit des formulaires DAS 2 (état des honoraires, vacations, commissions, etc.) et 2067 (relevé des frais généraux). "J’avais un très fort espoir sur la suppression de ces deux déclarations puisque Bruno Le Maire
voulait supprimer tous les Cerfa d’ici 2030", relève-t-elle. La DGFip a fait un blocage. Je me demande s'il n'est pas psychologique. J'ai continué à oeuvrer auprès d'elle pour les supprimer en expliquant que pour la 2067, l'information était reportée tous les mois avec la DSN. On m'a expliqué que c'est compliqué car la DSN arrive dans un service et la 2067 dans un autre et que ces deux services ne communiquent pas [entre eux]. On m'a dit alors qu'ils vont essayer de voir s'il est possible de récupérer les infos pour ensuite supprimer la 2067". Rappelons que le plan de simplification présenté en avril par Bruno Le Maire prévoit de relever les seuils de la déclaration de frais généraux.
La suppression de la DAS 2 est également en suspens. "J'ai dit [à la DGFip] ok vous voulez la garder parce que c'est un moyen de contrôler les auto-entrepreneurs qui dépassent les seuils. Mais dans ce cas, est-ce qu'on pourrait changer le système déclaratif en passant sur du hors-taxe au lieu du TTC et sur des dépenses engagées au lieu de celles payées. Cela permettrait à nos éditeurs de logiciels d'automatiser la DAS 2, ce qui serait beaucoup plus simple pour nous. À ce moment-là, [la DGFip] a dit qu'elle allait réfléchir et le faire. Mais depuis, je n'ai plus de nouvelles puisque entre-temps, malheureusement, nous avons eu la dissolution", regrette-t-elle. Rappelons que le plan de simplification présenté par Bruno Le Maire prévoit de relever les seuils de la DAS 2 de 1 200 € à 2 400 € par an et par bénéficiaire.
Les élections européennes interrogent aussi sur certains dossiers. "Il y aura des pressions politiques importantes pour qu'au niveau européen on aille vers un allègement du Green Deal et des contraintes. Est-ce que ça veut dire qu'on va revenir sur la [directive] CSRD ? Je ne crois pas mais en tout cas peut-être dans les modalités de mise en œuvre, dans les durées de mise en œuvre, dans les seuils d'imposition, etc.", anticipe Yannick Ollivier.
Autre dossier européen, le digital. "Il y a un sujet autour de la façon de construire l’encadrement de la chaîne de confiance dans le domaine du numérique. On a des échanges avec la Commission européenne via la DG Fisma [direction générale de la stabilité financière, des services financiers et de l'union des marchés des capitaux) et la DG Connect [direction générale des réseaux de communication, du contenu et des technologies], livre Yannick Ollivier. Il y a deux points qui les inquiètent énormément, ce sont le cyber et l’intelligence artificielle. D'un côté, les entreprises ne sont pas assez mobilisées sur le risque cyber. Et là on a un rôle énorme à jouer, expert-comptable comme commissaire aux comptes, pour accompagner à la prise de conscience et à l’action. Et de l’autre côté, sur l'IA, elles y voient toutes, à juste titre, une opportunité énorme. Si on n’y met pas un minimum d'encadrement on va partir dans du grand n’importe quoi, prévient le président de la CNCC. La pérennité de la valeur d’une entreprise passe par le fait qu’elle soit capable d’avoir de la data de qualité, sécurisée et dont les traitements sont fiables. Il y a une place à prendre, comme pour la durabilité", résume-t-il. Est-ce à dire que le reporting des entreprises serait doté d'un troisième pilier, celui du numérique qui s'ajouterait ainsi à ceux de l'information comptable et de l'information de durabilité ? Un troisième pilier où les commissaires aux comptes et les experts-comptables auraient une place à prendre ? En 2018, déjà, le sujet était sur la table des discussions.
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