Muriel de Szilbereky, déléguée générale de l’ANSA, nous décrit les solutions envisagées par le gouvernement pour permettre aux sociétés de tenir leurs assemblées générales malgré le confinement.
Le covid-19 et l’interdiction de se rassembler portent un coup d’arrêt à l’organisation des assemblées générales des entreprises, alors que celles-ci se tiennent traditionnellement au cours du printemps. Huis clos, report, quelles sont les solutions envisagées et celles possibles à ce jour ? Les réponses évoluent rapidement, Muriel de Szilbereky, déléguée générale de l’ANSA (Association nationale des sociétés par actions) fait le point sur la situation actuelle.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Quelles mesures sont envisagées par le gouvernement pour palier à l’interdiction de se rassembler, qui prohibe donc la tenue des assemblées générales ?
L’organisation des AG est une préoccupation partagée partout en Europe. L’Espagne et l’Italie ont adopté deux lois d’urgence pour faciliter leur tenue, l’Allemagne envisage de faire de même. En France, une loi d’habilitation a été adoptée le week-end dernier par le Parlement. Elle permettrait de prendre des mesures par ordonnance, afin de faciliter la continuité de l’activité économique. La solution envisagée, d’après le projet que nous avons pu consulter, serait d’autoriser par ordonnance la tenue des AG à huis clos. Nous avons interpellé Bruno Le Maire sur ce sujet il y a 15 jours et il s’y est montré sensible.
Ne serait-il pas plus simple de reporter les AG ?
Le report devrait être possible, de même qu’un délai va notamment être accordé pour l’approbation des comptes. La date du 31 juillet est aujourd’hui évoquée, nous pouvons cependant nous attendre à une prolongation jusqu’en novembre, sur le modèle espagnol.
Le report des AG est une décision lourde et qui n’est pas sans risque. Il est capital pour les entreprises d’assurer autant que possible la continuité de leur activité. Cela passe par la tenue d’une AG qui, entre autres, valide les grandes orientations stratégiques, entérine les opérations extraordinaires sur le capital. Sans AG, pas non plus de versement de dividendes. Or le montant des dividendes implique également de décider de l’allocation des rémunérations internes, indispensables à la vie de l’entreprise.
Enfin, ne pas tenir d’AG revient à ne pas respecter le droit des actionnaires. Autant de raisons qui expliquent l’importance d’une solution alternative au report.
Cette solution serait donc le huis clos : comment l’organiser pour ne pas risquer d’irrégularité ?
Le huis clos soulève de nombreux défis. Il est important de préserver la capacité des actionnaires à voter et à poser des questions. Toutefois, la participation e tous les actionnaires à une AG en direct est difficilement envisageable techniquement. D’une part, car il n’est pas possible de contrôler l’identité des personnes qui se connectent. D’autre part, car cela suppose un équipement et des moyens techniques qui ne sont pas disponibles, car la tenue d’AG dématérialisées n’est permise que pour les sociétés non cotées qui ont intégré cette possibilité dans leurs statuts. Les actionnaires devront donc pouvoir voter et poser leurs questions avant la tenue de l’AG.
L’autre grand défi est celui de la convocation des actionnaires au nominatif. Toute convocation électronique doit faire l’objet d’une approbation préalable par écrit. Or il est impossible aujourd’hui aux imprimeurs et aux routeurs d’assurer la distribution des convocations et autorisations. Il convient donc de modifier un article du code de Commerce, pour instaurer la possibilité d’une convocation électronique.
Enfin, de nombreuses questions pratiques nous sont posées par les entreprises : « faudra-t-il un bureau ? Un scrutateur ? Qui pourra assurer ces fonctions ? », en sont quelques exemples.
Est-il sécurisé d’organiser dès aujourd’hui son AG à huis clos ?
Il est dit que l’ordonnance autorisant ce système pourrait avoir un effet rétroactif. Toutefois, rappelons qu’organiser aujourd’hui son AG sur ce mode est prendre un risque, car l’ordonnance concernant la tenue des AG n’est pas encore parue.
D’après vous, sur quoi faudra-t-il particulièrement veiller pour assurer la bonne tenue de ces AG à huis clos ?
Ces AG vont représenter un triple défi. Il faudra gérer ce qu’implique un huis clos : veiller au respect du droit des actionnaires, surmonter les contraintes organisationnelles. Et à ce défi de taille se conjuguent deux nouveautés, indépendantes du coronavirus. D’une part, pour la première fois, les abstentions ne seront plus comptabilisées comme des votes « contre », comme c’était le cas jusqu’ici. Abstention et refus seront deux votes distincts, une évolution sur laquelle, heureusement, les opérateurs de titres ont déjà beaucoup communiqué. D’autre part, il s’agit de la première application de la nouvelle réglementation sur la rémunération des dirigeants.
Ce sont donc des AG très lourdes qui sont attendues.
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