Audit légal des comptes : Bruno Le Maire a-t-il dépassé les bornes ?

Audit légal des comptes : Bruno Le Maire a-t-il dépassé les bornes ?

06.03.2018

Gestion d'entreprise

Plusieurs représentants de la profession comptable affirment que le ministre de l'économie et des finances a déclaré vouloir supprimer la présence du commissaire aux comptes dans les petites entreprises. Le service de presse de Bruno Le Maire essaie de noyer le poisson.

"Je crois profondément dans l’avenir des experts-comptables et des commissaires aux comptes". En septembre 2017, Bruno Le Maire affichait son optimisme pour la profession comptable. Quelques mois plus tard, les auditeurs légaux des comptes sont plongés dans l’inquiétude. Lors d’un déplacement le 22 février à Colmar, le ministre de l’économie et des finances a semble-t-il déclaré vouloir supprimer leur présence dans les petites entreprises. C'est en tous cas les propos que lui prêtent plusieurs représentants de la profession comptable dont la CRCC (Compagnie régionale des commissaires aux comptes) de Colmar, la CNCC (Compagnie nationale des commissaires aux comptes) ou encore ECF (experts-comptables et commissaires aux comptes de France). Depuis cette date, alors que de nombreux tweets de commissaires aux comptes ont directement interpellé Bruno Le Maire, aucun démenti officiel n'est sorti. Contacté hier par la rédaction, le service de presse du ministre nous apporte une réponse ambiguë. "Je ne peux pas vous confirmer ce qu’a dit le ministre. La seule chose que je peux vous confirmer c’est qu’on travaille en ce moment sur la loi Pacte [plan d’actions pour la croissance et la transformation des entreprises]. Dans la loi Pacte il y aura différentes mesures en faveur des entreprises et effectivement on regarde le cas des commissaires aux comptes notamment parce qu’il y a eu une surtransposition de directive européenne en 2013. Ce qu’on fera exactement sera dévoilé autour du 18 avril".

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

Découvrir tous les contenus liés
Le Pacte de Le Maire

Sur le fond, comment comprendre cette probable déclaration de Bruno Le Maire alors que le rapport de l’IGF (inspection générale des finances) sur les seuils d’audit légal n'avait pas été rendu, en tous cas officiellement, le 22 février ? D’un côté, on peut se dire qu’il s’agit d’une bourde du ministre. Il donne l’impression d'écarter ce corps intermédiaire qui travaille pourtant pour son propre ministère et pour celui du budget. La question se pose aussi de la place que le ministre de l’économie et des finances accorde à celui de la justice sur ce dossier. Car même si l’éventuelle évolution des seuils d’audit légal devrait être intégrée au Pacte, via un projet de loi porté par Bercy, il n’en reste pas moins que les commissaires aux comptes relèvent de la tutelle du ministère de la justice. En théorie. Déjà, lors de son intervention au congrès 2017 de l’Ordre des experts-comptables, Bruno Le Maire n’avait pas hésité à marcher sur les plates-bandes de Nicole Belloubet. Il avait évoqué une possible inclusion des commissaires aux comptes dans les sociétés pluriprofessionelles d’exercice, justement via ce Pacte.

"Demander aux chefs d’entreprise s’ils souhaitent un commissaire aux comptes c’est un peu comme demander aux automobilistes s’ils veulent des radars !! On n’est pas là pour leur faire plaisir mais pour être utile à la collectivité, non ?", compare le professionnel Philippe Barré sur Twitter. Mais on peut se poser la question suivante : Bruno Le Maire ne vient-il pas, peut-être inconsciemment, de faire un cadeau non pas aux entrepreneurs mais aux auditeurs légaux des comptes ? Car sur ce dossier, il a probablement perdu beaucoup de crédibilité.

 

Ludovic Arbelet
Vous aimerez aussi