"Aujourd'hui, les DRH forment les managers à la détection des signaux faibles pour prévenir les risques psychosociaux"

"Aujourd'hui, les DRH forment les managers à la détection des signaux faibles pour prévenir les risques psychosociaux"

04.03.2021

Gestion du personnel

Egalite professionnelle, plan seniors, maintien dans l’emploi, santé au travail… La présidente de l’ANDRH, Audrey Richard, entend porter la voix de la profession auprès des pouvoirs publics sur plusieurs sujets sociaux. Selon elle, le harcèlement ou la discrimination sont de plus en plus invoqués pour contourner le barème d'indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Comment vivez-vous cette période troublée alors que la crise sanitaire perdure ?

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Les DRH sont en première ligne depuis un an. Ils sont surchargés, se battent sur tous les fronts mais ils tiennent la route. La crise a élargi leurs responsabilités, non seulement sur la préservation de l’emploi mais en portant une attention particulière à la sécurité et la santé des salariés, au maintien du collectif de travail, à la vigilance par rapport aux personnes vulnérables. Nous gérons des problématiques collectives mais de plus en plus des situations individuelles ; les salariés se tournent vers nous pour trouver des solutions qui relèvent à la fois du plan professionnel et personnel.

Les entreprises de 50 salariés et plus avaient jusqu’au 1er mars pour calculer et publier leur Index de l’égalité professionnelle. Souhaitez-vous, à l’instar d’Elisabeth Borne, une évolution de cet outil ? Faut-il prendre en compte la part des femmes dans les cadres dirigeants, ou à l’inverse le poids des femmes dans les bas salaires, comme le suggère le think tank Terra Nova ?

 Cela implique côté RH une préparation en amont, par exemple, de faire respecter une stricte parité dans les plans de succession

En dix ans, la loi "Copé-Zimmermann" du 27 janvier 2011, relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance, a réussi son pari : le quota de 40 % de femmes instauré dans ces organes du pouvoir est dépassé. Je m’en réjouis et j’appelle à étendre cette obligation dans les comités exécutifs. De quelle manière ? L’enrichissement de l’Index me paraît une bonne piste. Mais cela implique côté RH une préparation en amont, par exemple, de faire respecter une stricte parité dans les plans de succession qui permettent de planifier le développement des compétences et le remplacement des postes-clés de l’entreprise. De même, il me semble pertinent d’analyser la prépondérance des femmes dans les bas salaires. Nous sommes favorables à cette réflexion.

Lors de votre dernière conférence de presse, vous avez appelé à la création d’un plan seniors. Est-ce à dire qu’un Index seniors, votre proposition de septembre dernier, n’est pas assez coercitif pour les entreprises ? 

Nous avons déjà un Index sur l’égalité professionnelle. Demain, peut-être un Index de la diversité. Ces outils sont importants mais il est essentiel d’aller plus loin pour favoriser le maintien dans l’emploi des seniors. Pour l’heure, cette catégorie de salariés est maltraitée en entreprise. Or, il faut continuer à investir sur eux, à les former, à les aider à changer de métier. L’ANDRH veut prendre toute sa part de cette réflexion et porter la voix de la profession auprès des pouvoirs publics. Il s’agit d’une responsabilité sociale et même éthique. Nous travaillons sur un plan seniors détaillé que nous présenterons, d’ici à quelques semaines, au ministère du travail.

Que pensez-vous des concertations menées actuellement par le ministère du travail auprès des organisations patronales et syndicales des branches professionnelles (banques, assurances, ingénierie-conseil) plus réfractaires au télétravail ? Constatez-vous également une "érosion" de la pratique ?

 Ce rappel à l’ordre était nécessaire

Ce rappel à l’ordre était nécessaire. Pourquoi certains secteurs peuvent-ils respecter les consignes et pas les autres ? Il y a eu quelques dérives en début d’année, notamment dans certains secteurs et également dans certaines entreprises en province. Mais aujourd’hui, la prudence est de retour. A l’heure actuelle, les DRH n’autorisent le retour au travail que des personnes qui en ont besoin, une journée par semaine, afin de pallier les situations de détresse.

Craignez-vous la montée de problèmes psychologiques ? Le télétravail imposé constitue-t-il un problème pour garder des équipes motivées ? Un récent sondage indiquait que les managers peinaient à maintenir la cohésion d’équipe, l’engagement au travail.

Cet accompagnement des managers constitue, d’ailleurs, une des priorités de 2021 de la profession

Cette période est complexe. Nous n’avons jamais été favorables à un télétravail cinq jours sur cinq. La communication, le lien social, la convivialité sont primordiaux pour maintenir les collectifs de travail. Dès le premier confinement, nous avons organisé des formations sur le management à distance pour favoriser la confiance, l’autonomie des salariés. De nouveaux modes de management, plus collaboratifs, plus transversaux, sont en train d’émerger. Aujourd’hui, nous sommes passés à autre chose : les DRH forment les managers à la détection des signaux faibles, des situations individuelles afin de prévenir les risques psychosociaux au sein des équipes de travail. Les risques d’isolement, de perte de repères et de motivation sont importants. Cet accompagnement des managers constitue, d’ailleurs, une des priorités de 2021 de la profession.

Les dispositifs à votre disposition, comme les ruptures conventionnelles collectives, l’activité partielle longue durée, les accords de performance collective, constituent-ils, selon vous, des outils suffisants pour éviter les PSE ?

Nous n’avons jamais été aussi bien lotis. Ce sont des amortisseurs sociaux importants. Selon notre sondage, réalisé en février, 40 % des DRH comptent utiliser ces dispositifs pour éviter de licencier. Combinés à un dialogue social de qualité, ils peuvent permettre de faire face à un problème conjoncturel, en fonction des besoins de l’entreprise, sans casse sociale. Les DRH continuent de se battre pour préserver les emplois. D’ailleurs, 78 % des décideurs interrogés n’envisagent pas de plan social. Et quand cette perspective est envisagée, en dernier recours, c’est en général avec une diminution de moins de 10 % des effectifs.

Les services de santé au travail peuvent, depuis le 25 février, vacciner certains salariés de 50 à 64 ans atteintes de comorbidités. Avez-vous des retours ?

Il existe des disparités entre les grandes entreprises et les petites

Il y a une adhésion totale des entreprises qui veulent prendre part à la stratégie vaccinale. Mais ces campagnes nécessitent de gros efforts de communication en interne pour mettre en avant la confidentialité des données, et pour qu’aucun salarié ne soit oublié. Il existe, toutefois, des disparités entre les grandes entreprises, aguerries aux campagnes antigrippes saisonnières, qui disposent de leur propre service de santé au travail et les plus petites qui n’ont aucun moyen. D’autant que nous faisons face à des pénuries de médecins du travail, ce qui va obliger certaines entreprises à réorienter les salariés vers les médecins de ville pour se faire vacciner.

Les organisations patronales et syndicales souhaitent lancer un nouvel agenda social portant sur de multiples sujets (formation professionnelle, prud'hommes, gestion des accidents de travail et maladies professionnelles, mobilité sociale et modernisation du paritarisme). Qu’en attendez-vous ?

Nous sommes favorables à un dialogue social au plus près du terrain. Ce niveau nous semble le plus approprié pour régler les questions sociales. Concernant la formation professionnelle, nous sommes prêts à mettre en œuvre les transitions collectives, décidées par les partenaires sociaux, pour accompagner les salariés qui occupent des emplois fragilisés. Il s’agit d’une préoccupation importante des DRH pour éviter des licenciements. Même si ce dispositif nécessitera là encore un accompagnement des petites entreprises.

Ces contentieux sont plus techniques, plus complexes et plus difficiles à traiter

S’agissant des prud’hommes, et plus particulièrement le barème Macron, nous sommes satisfaits du dispositif malgré son instabilité juridique ; plusieurs conseils de prud’hommes ou cours d’appel ayant refusé d’appliquer la mesure. Mais nous attirons l’attention sur un détournement de certains dossiers vers des cas de harcèlement moral et de discrimination ; seuls motifs de de licenciement abusif qui permettent, s'ils sont reconnus, de contourner le barème d'indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Or, ces contentieux sont plus techniques, plus complexes et plus difficiles à traiter, nécessitant des éléments tangibles : un salarié va contester son licenciement en invoquant un harcèlement ou une discrimination. Ils engendrent le versement d’indemnités beaucoup plus importantes, ce qui peut constituer une épée de Damoclès pour les petites structures.

Anne Bariet
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