Ces juristes qui changent de parcours

Ces juristes qui changent de parcours

22.12.2020

Gestion d'entreprise

Ils ont occupé des fonctions de direction juridique et les ont quittées pour réorienter leur carrière. Quatre juristes témoignent de ce choix et nous livrent leurs raisons comme leurs nouveaux challenges.

Elles/ils ont en commun, chevillée au corps, la volonté de sortir de leur zone de confort. Ex-responsable juridique chez Powernext Gas Exchange (2014 à 2017), Marie L’Hermite a prêté serment puis créé son cabinet d’avocat (MLH Avocat) en février 2019. Aujourd’hui, elle se définit « un peu comme une consultante, mais en droit ». Après douze ans en entreprise, elle souhaitait « changer de clientèle, être confrontée à une plus grande diversité de dossiers ». Objectif atteint ! « Je ne m’attendais pas à la liberté que l’indépendance procure et j’ai trouvé la diversité que je recherchais, je travaille dans des domaines que je ne connaissais pas auparavant, j’accompagne par exemple un projet de drone et d’IA, je me suis formée à la blockchain grâce à un partenaire », glisse-t-elle, non sans une certaine fierté.

Créer une entreprise

Adeline Bodin-Burgy (42 ans) a quitté ses fonctions de directrice juridique France et Benelux et compliance officer France d’Henkel et le statut de salarié pour créer une legaltech. Un pari risqué. Deux raisons ont guidé son choix : « l’envie très personnelle d’entreprendre et l’évolution de la fonction de juriste d’entreprise, qui nous place comme business partner au centre de nombreuses sollicitations, mais qui entraîne également un certain nombre de tâches sans valeur ajoutée, chronophages et ne nécessitant pas d’analyse juridique » confie-t-elle. Et d’ajouter : « j’avais envie de fonder une entreprise et de piloter son développement ». L’IA lui a offert cette opportunité. Associée à une avocate, Adeline Bodin-Burgy a créé la legaltech Just Lab, plateforme d’information juridique automatisée. « Nous pensons que l’automatisation de l’information juridique fait gagner du temps aux juristes qui peuvent alors se recentrer sur leurs activités à valeur ajoutée » argumente-t-elle. Pour « vendre » l’offre digitale de Just Lab, Adeline Bodin-Burgy a dû apprendre sur le tas le marketing, la communication, la fonction commerciale… « C’est terriblement excitant mais aussi très difficile et challengeant au quotidien » reconnaît-elle.

Rejoindre la PME familiale

Bastien Collard de Billy vient d’être nommé secrétaire général et export manager de la maison de champagne Pol Roger. Il est le premier membre de la sixième génération à intégrer l’entreprise familiale. A 35 ans, et après avoir exercé la profession d’avocat d’affaires, il a passé trois ans chez Pernod Ricard pour se « rapprocher du business des vins et spiritueux ». Une exigence de Pol Roger qui favorise avant tout les compétences, et tant mieux si celles-ci sont familiales. « L’intérêt de l’entreprise prime l’intérêt des personnes. L’expérience accumulée à l’extérieur de la maison permet de gagner en légitimité, en crédibilité, et invite à faire preuve d’humilité. J’ai commencé ma carrière en tant qu’avocat d’affaires car j’ai pensé que c’était la meilleure école » commente-t-il. Rejoindre la PME appartenant à la famille de sa mère était inscrit dans son ADN. Aujourd’hui, il occupe un poste dimensionné à sa mesure et se donne pour mission de « définir le grand chantier qui fera entrer Pol Roger dans une nouvelle phase de son développement ». Et de pouvoir faire le pont entre les générations. En attendant, il se dit très heureux d’occuper un poste à la fois tourné vers l’organisation interne de l’entreprise et vers la gestion des relations avec les marchés à l’export.

Capitaliser sur son expérience

Juriste chez Kiloutou pendant vingt ans, Christophe Dhiver y a occupé plusieurs postes, dont celui de directeur des affaires juridiques. Il a lui aussi décidé de changer de voie à 48 ans. « Après avoir participé à trois LBO successifs, je me suis posé de nombreuses questions sur mon quotidien et mon avenir professionnel. Les sujets ne manquaient pas, mais j’avais l’impression d’être installé dans une certaine routine, qui pouvait parfois user. J’ai eu envie de donner un autre tour à ma carrière » témoigne-t-il. Rejoindre une autre entreprise en tant que directeur juridique ? Non, « trop évident, je ne m’y retrouverai sans doute pas » lâche Christophe Dhiver. Un process d’outplacement et un bilan de compétence l’aident à prendre sa décision. « Ce que j’ai apprécié lorsque j’étais en poste, en plus de l’apprentissage et des sujets techniques, c’était de construire, de structurer et de faire évoluer la fonction juridique en interne pour accompagner le développement de l’entreprise. C’est pourquoi j’ai décidé, à travers mon activité de consultant, d’accompagner les juristes dans la transformation de leur fonction » précise-t-il. Ses missions ? Aider les juristes à s’organiser, à prendre de la hauteur, à démontrer leur valeur ajoutée, à obtenir des moyens… et partager son expérience.

Véronique Méot

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