Cession d'entreprise : le projet de loi Travail autorise des licenciements préalables dans le cadre du PSE

Cession d'entreprise : le projet de loi Travail autorise des licenciements préalables dans le cadre du PSE

26.02.2016

Gestion du personnel

L'avant projet de loi Travail modifie les règles applicables aux licenciements en cas de transfert d'un établissement. La jurisprudence est actuellement très stricte sur les licenciements qui interviennent en amont car ils ne doivent pas viser à contourner la règle de transfert des contrats de travail au repreneur. Le texte assouplit ces possibilités.

L'avant-projet de loi Travail qui sera présenté en Conseil des ministres le 9 mars prochain contient un certain nombre de mesures dont certaines ont, pour l'heure, été peu évoquées. C'est le cas de l'article 41 qui modifie les règles de licenciement et de transfert des contrats de travail en cas de transfert d'entreprise (article L.1224-1 du code du travail).

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Des licenciements en amont strictement surveillés par la jurisprudence

L'article L.1224-1 du code du travail prévoit qu'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur (succession, vente, fusion, transformation du fonds...) tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise". Le transfert des contrats de travail n'interdit pas pour autant des licenciements antérieurs. "Le droit français et le droit de l’Union européenne autorisent des licenciements pour motif économique prononcés avant transfert, dès lors qu’ils ne sont pas motivés par le transfert lui-même, rappelle l'exposé des motifs de l'avant projet de loi. Toutefois, dès lors que des licenciements sont prononcés avant transfert, la jurisprudence française considère qu’ils sont présumés motivés par le transfert à moins que l’employeur ne puisse justifier du motif économique du licenciement". Et c'est là que le bât blesse pour le gouvernement.

"Du fait de cette jurisprudence, complète le gouvernement dans l'exposé des motifs, dès lors qu’une entreprise entame un plan de sauvegarde de l’emploi, si un repreneur se manifeste dans le cadre d’un processus de recherche de repreneur lancé parallèlement, le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) est interrompu puisqu’il appartient alors, compte tenu des règles prévues par le droit interne et par la directive transfert 2001/23/CE du 12 mars 2001, au repreneur d'engager les licenciements nécessaires une fois la reprise réalisée. Cette situation pénalise l'efficacité de la recherche de repreneur et donc la préservation d’emploi".

Déborah David, avocate associée au sein du cabinet Jeantet, confirme cette analyse. "Les licenciements avant le transfert sont théoriquement possibles mais la Cour de cassation a tendance à invalider systématiquement les licenciements intervenant avant le transfert des contrats de travail au cessionnaire. Le cédant doit démontrer que les licenciements n'ont aucun rapport avec le transfert, même plusieurs mois après la liquidation judiciaire".

Une jurisprudence contrée par l'avant projet de loi

Pour contrer cette jurisprudence, le texte prévoit que "lorsqu’un PSE comporte une reprise de site, les règles du transfert n’empêchent pas le cédant de procéder au licenciement des salariés non repris". Ainsi, "lorsque le plan de sauvegarde de l’emploi comporte, en vue d’éviter la fermeture d’un ou de plusieurs établissements, le transfert d’une ou plusieurs entités économiques, nécessaire à la sauvegarde d’une partie des emplois, l’article L. 1224-1 ne s’applique que dans la limite du nombre des emplois qui n’ont pas été supprimés par suite des licenciements à la date d’effet du transfert".

Déborah David se félicite de cette réforme qui "favorisera les reprises de site". De son côté, David van der Vlist, également avocat en droit du travail et membre du Syndicat des avocats de France (SAF), s'inquiète de cette disposition qui permet "des ruptures en amont du contrat de travail, avec des moyens moindres dans le cadre du PSE élaboré par l'entreprise cédante".

L'avant-projet de loi aménage en conséquence d'autres dispositions du code du travail. Ainsi, l'accord collectif portant sur le PSE devra préciser les conditions dans lesquelles cette procédure peut être aménagée en cas de projet de transfert d'une ou plusieurs entités économiques nécessaire pour limiter le nombre de disparitions d’emplois. L'employeur devra également consulter le CE, lorsque la procédure est aménagée pour favoriser un projet de transfert d’une ou plusieurs entités économiques, sur l’offre de reprise dans le délai fixé par l’accord collectif portant sur le PSE. Enfin, le PSE devra prévoir des mesures qui favorisent la reprise de tout ou partie des activités en vue d’éviter la fermeture d’un ou de plusieurs établissements.

Florence Mehrez
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