Pour certains collaborateurs juniors d'EY, c'est la surchauffe

Pour certains collaborateurs juniors d'EY, c'est la surchauffe

22.05.2022

Gestion d'entreprise

Selon une étude de l'intersyndicale EY & Associés, les jeunes salariés du Big Four constatent une dégradation de leurs conditions de travail et sont plus nombreux à déclarer des impacts négatifs sur leur santé. De plus, les rémunérations sont jugées insatisfaisantes au regard de la charge de travail. La direction du cabinet indique être très vigilante sur ces sujets.

La surcharge de travail, fléau des cabinets comptables ? C'est en tout cas l'un des constats du dernier baromètre réalisé par l'intersyndicale d'EY & Associés auprès de 220 personnes sur les conditions de travail au sein du Big four (dont 85% de salariés d'EY & Associés) (*). Ce sondage ne représente qu'une petite partie des effectifs du Big Four puisque 6,5% des collaborateurs d’EY & Associés y ont répondu, "soit 187 personnes sur plus de 2800 et si nous prenons en compte l’intégralité des effectifs d’EY France, cela représente 3,4% des collaborateurs", souligne la direction du cabinet que nous avons contactée. 

Quoi qu'il en soit, les résultats de ce baromètre révèlent une dégradation du ressenti des collaborateurs répondants. La part de salariés d'EY déclarant avoir eu une altération de leur état de santé en lien avec le travail de l'année écoulée a augmenté par rapport au précédent baromètre. En ce printemps 2022, 61% constatent des conséquences néfastes de leur charge de travail sur leur santé (contre 56% à l'automne 2021).

Effet de saisonnalité

Et ce sont les collaborateurs juniors qui semblent le plus en souffrir : 63% d'entre eux ont vu leur santé impactée par leur travail, contre 50% auparavant. Les profils seniors et managers/seniors managers ont un ressenti similaire mais la proportion de personnes touchées est déjà assez élevée (60% et 57% respectivement). 

Cette situation dégradée - des juniors en particulier - peut être due à un "effet de saisonnalité" puisque le baromètre a été réalisé du 28 mars au 10 mai 2022. Soit après la saison d'audit et en pleine période fiscale, moments toujours très intensifs dans les cabinets. A noter que 73% des répondants de l'étude sont des commissaires aux comptes.

De plus, ces résultats doivent être analysés avec précaution car l'échantillon des deux baromètres (automne 2021 - printemps 2022) n'est sans doute pas totalement identique. 

Près d'un tiers des collaborateurs répondants dépasse les 48 heures de travail hebdomadaires plus de 20 semaines par an

En terme de temps de travail, une majorité de salariés répondants dépassent régulièrement 48 heures de travail hebdomadaires (l'accord collectif d'entreprise les y autorise) :

  • pour 8% de collaborateurs, c'est moins de 5 semaines par an ;
  • pour 17% de salariés, c'est entre 5 et 10 semaines par an ;
  • pour 22%, c'est entre 10 et 15 semaines par an ;
  • pour 21% de répondants, c'est entre 15 et 20 semaines par an ;
  • Et le chiffre le plus inquiétant : pour 31%, c'est au-delà de 20 semaines par an.

Ces horaires sont quasi similaires à la vague précédente. Pour rappel, l'Inserm (institut national de la santé et de la recherche médicale) considère que travailler plus de 50 heures par semaine au-delà de 10 semaines par an a un fort impact négatif sur la santé.

"La nature de notre activité implique effectivement des périodes d’intensité plus forte, justifie la direction d'EY & Associés. Et c’est précisément pour répondre à toutes les préoccupations que cette réalité d’entreprise peut engendrer pour nos collaborateurs que nous avons signé un accord l’année dernière prévoyant un suivi renforcé de la charge de travail de nos collaborateurs avec un dispositif de veille et d’alerte". Par exemple, "de manière récurrente tout au long de l’année, le dépassement de seuils entraîne l’intervention de notre équipe RH ou d’un associé".

"Avec l’ensemble des autres dispositions contenues dans l’accord, nous disposons d’un dispositif d’ensemble reposant sur des outils développés spécifiquement pour suivre cette charge", assure le cabinet. Le texte, entré en vigueur en juillet 2021, prévoit également des contreparties (1 à 2 jours de repos complémentaires offerts lors du dépassement de seuils définis pour compenser une intensité annuelle inhabituelle, valorisation de congés payés, etc.). 

Des conditions de travail notées en baisse

Globalement, 58% des collaborateurs du sondage de l'intersyndicale jugent que leurs conditions de travail se sont dégradées. Et ce sont encore les juniors qui semblent plus touchés en ce printemps. Ils jugent moins bonnes leurs conditions de travail au sein du Big Four. La note moyenne donnée par cette population passe de 5,26 (sur 10) à 4,90. Cette baisse indique "que les juniors ont fortement été mis à contribution pendant la saison", note l'étude.

Du côté des profils plus expérimentés, la note - plus basse - augmente légèrement : de 4,62 à 4,94 sur 10 pour les seniors, et de 4,86 à 4,96 sur 10 pour les managers.

La direction d'EY déclare que "le cabinet est très vigilant sur les conditions de travail de ses collaborateurs et sur la qualité du climat social". Le big Four "mène des études trimestrielles permettant de recenser de manière confidentielle auprès de l'ensemble des équipes leur avis sur les conditions de travail, dont les résultats sont analysés, discutés avec les instances représentatives, présentés aux collaborateurs et donnent lieu à des plans d'actions", nous indique-t-elle.

Des rémunérations jugées insatisfaisantes au regard de la charge de travail

Autre source d'insatisfaction des collaborateurs de l'échantillon : la rémunération au regard de la charge de travail. 94% estiment leur salaire insatisfaisant. La progression salariale déçoit également. Surtout les jeunes recrues. Plus de 80% des collaborateurs juniors pensent que leur progression salariale ne correspond pas à leurs attentes en rentrant chez EY. Cette proportion tombe à 65% chez les seniors et à 56% chez les managers.

Plus globalement, une plus grande transparence est demandée dans la détermination des rémunérations et les jeunes collaborateurs sont les plus favorables à l'instauration d'un "écart maximal de prime au sein d'une même population d'un facteur 3" (le facteur 3 correspond à l'écart entre le maximum et le minimum des primes).

 

(*) enquête menée du 28 mars au 10 mai 2022 sur le réseau social Linkedin.

Céline Chapuis

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