Même si l'employeur utilise le chômage partiel pour obtenir un soutien de l'Etat, les juristes ont du pain sur la planche.
« Il y a plus de travail mais nous sommes mieux organisés ». C’est l’état d’esprit positif qui caractérise Kevin Appointaire, le directeur juridique et de la communication du groupe Delfingen - un sous-traitant « de rang 2 » du secteur automobile, qui produit notamment des tubes de protection des câbles électriques pour l'automobile. Ses équipes sont au chômage partiel 3 jours par semaine. Tout comme d’autres qui nous expliquent comment ils poursuivent leur activité à un rythme soutenu.
Avec un tiers de ses sites en Asie - dont une usine à Wuhan -, un tiers en Amérique du Nord et au Brésil et le dernier en Europe et en Afrique du Nord, Delfingen a ressenti la vague du coronavirus déferler sur son business. Pour ses effectifs en France, ceux dédiés à la production sont au chômage partiel à 100 %, car le groupe ne reçoit pas de commande de ses clients pour l’instant. Les juristes, eux, télétravaillent 2 jours sur 5. Une annonce soutenue par les salariés français, selon Kevin Appointaire :
« Ils sont conscients que nous devons tous aider le groupe à passer la crise. Ils bénéficient de 84 % de leur salaire net à l’aide du dispositif mis en place en France. Il n’y a pas cela dans tous les pays. Je n’ai reçu aucune plainte ».
Julie Demia, juriste chez Euro Media Group, a elle aussi bien pris la nouvelle. Elle est au chômage partiel à 40 % et a préféré opter pour des demi-journées de travail. « C’est contribuer à l’effort collectif », estime-t-elle. Quatre jours par semaine, elle n’est théoriquement joignable que le matin. Chaque manager, en fonction de la charge de travail de ses équipes, a proposé l’organisation de son activité partielle. Et chacun remplit, tous les jours, un tableau Excel avec ses heures travaillées afin de pouvoir les reporter à l’Ursaff. Le groupe Euro Media est aussi fortement touché par la crise. Il filme des évènements sportifs pour de grandes chaînes de télévisions. Euro 2020, Jeux Olympiques au Japon… la société a dû faire face à des « annulations en cascade ». Mais le groupe a reçu une bonne nouvelle : le Tour de France débutera fin août, ce qui devrait relancer son activité.
Chez Bolloré Transports & Logistics, la direction juridique n’est pas - pour l’instant - au chômage partiel. Mais certains sites opérationnels de l’acteur majeur du transport et de la logistique - important gestionnaire portuaire et ferroviaire en Afrique mais aussi très présent en Asie - bénéficient de la mesure de soutien du gouvernement français. En télétravail, les juristes ont cependant été invités à poser leurs congés payés et l’ensemble de leurs RTT d’ici le 31 mai. Éric Amar, le directeur juridique du groupe, laisse de la souplesse à ses équipes. Alors que l’activité n’est pas ralentie, bien au contraire, chacun s’organise : « certains saupoudrent leurs congés, d’autres ont préféré prendre plusieurs jours d'affilée ». Et il n’est pas du genre à « fliquer » ses équipes.
« Peu m’importe que mes collaborateurs travaillent de 9h à 18h, tant qu’ils produisent… ».
Le travail des directions juridiques est réorganisé durant cette période particulière. La priorité est « de gérer la crise et d’éviter les licenciements économiques », rappelle Kevin Appointaire. Pour cela, son équipe est renforcée sur la gestion des contrats. « Il faut négocier les contrats et les faire signer pour apporter du business à la sortie du confinement », explique-t-il.
« Un juriste essaie toujours d’évaluer le risque ». Dont la pandémie, que Kevin Appointaire distingue désormais de l’épidémie. Son équipe a donc vérifié les clauses de force majeure contenues dans les conditions générales de Delfingen afin de les mettre à jour ou de les préciser.
La force majeure et l’imprévision occupent aussi la direction juridique de Bolloré Transport & Logistics.
« La force majeure doit être notifiée à nos clients et documentée dans les faits. Il faut expliquer pourquoi elle intervient et ce qu’elle modifie en terme d’exécution contractuelle. Dans les cas où les conditions de la force majeure ne sont pas explicitées le co-contractant contestera la notion », souligne Éric Amar.
« Et la notification doit être valide sur le plan du droit des contrats. La notification doit être exprimée attentivement, et étayée - ou pouvant être facilement étayée plus tard - par des faits montrant l’impossibilité à exécuter aux mêmes conditions contractuelles, par exemple ». Une doctrine a donc été rédigée par ses équipes à destination des opérationnels et des chefs de projets. La société étudie désormais les retours de ses clients à ses notifications.
« Une fois la notification effectuée, les co-contractants réagissent, et un dialogue s’instaure, pour d’abord confirmer l’éligibilité du Covid-19 en tant qu’évènement de force majeure, puis, et surtout, déterminer les conditions, selon les cas, de suspension du contrat, ou de son aménagement ».
« Autre chantier prioritaire des directions juridiques : la tenue des conseils et Assemblées d’arrêté et d’approbation des comptes annuels », souligne Eric Amar. « En cette période de confinement, ceux-ci se tiennent majoritairement par visio conférence, lorsque les statuts prévoient ce cas, et lorsque ceux-ci ne le prévoient pas nous nous appuyons sur les ordonnances gouvernementales qui ont assoupli les conditions et délais de tenue de ces réunions ». La direction juridique de Bolloré Transport & Logistics gère près de 500 sociétés non cotées dont les assemblées générales se tiendront entre mai et juin.
« Dès le début de la crise nous avons fermé les écoutilles. Les bonus des collaborateurs sont repoussés et aucun dividende ne sera versé. Nous n’avons pas attendu les annonces du gouvernement », lance Kevin Appointaire. Le groupe coté en bourse est détenu à plus de 60 % (capital et droits de vote) par la famille Streit. Chez Bolloré Transport & Logistics, les dividendes de l’ensemble des sociétés seront versés. « Rien n’est changé. Nous raisonnons exercice par exercice », précise de son côté Éric Amar.
« Nous avons dû répondre à de nombreux sujets liés au coronavirus », indique Julie Demia. Et il y a eu « plusieurs communications avec nos assurances ». « Les assets du groupe (matériels vidéo, par exemple, ndlr) et les bâtiments vidés de leurs employés doivent être sécurisés contre le vol », précise-t-elle. Quant aux opérations de croissance externe, plusieurs sont à l’arrêt.
« Nous avions pas mal de négociations sur de potentielles cibles. Certains projets sont suspendus. D'autres ont repris malgré la crise ».
La lumière au bout du tunnel ? En France, le déconfinement est annoncé par le gouvernement à partir du 11 mai. Chez Delfingen « on espère que le chiffre d’affaires va repartir rapidement », lance Kevin Appointaire. Il faudra attendre « un retour à la consommation des Français pour que les clients du groupe relancent leurs commandes et pour pouvoir mettre fin au chômage partiel… ».
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