Compétence du tribunal de commerce en matière de marchandise transportée par route

11.04.2022

Gestion d'entreprise

Les litiges en matière de marchandise transportée par route relèvent de la compétence du tribunal de commerce. De plus, la loi Badinter n'a pas pour objet de régir l'indemnisation des propriétaires de marchandises endommagées à la suite d'un accident de circulation.

Par une lettre de voiture, Airbus confie à une société le transport d’un ensemble propulsif. Au cours du trajet, cette marchandise transportée est endommagée après avoir heurté un pont. Airbus assigne le transporteur et son assureur devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, sur le fondement de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, dite loi Badinter. La cour d’appel confirme l’incompétence de ce tribunal au profit du tribunal de commerce et le pourvoi du transporteur et de son assureur est ensuite rejeté.

La Cour de cassation rappelle d’abord que l’article 1er de cette loi, tel qu’interprété par la jurisprudence, « instaure un régime autonome et d’ordre public d’indemnisation, excluant l’application du droit commun de la responsabilité, qu’elle soit contractuelle ou délictuelle ». Toutefois, selon l’arrêt, cette loi « n’a pas pour objet de régir l’indemnisation des propriétaires de marchandises endommagées à la suite d’un tel accident, survenu au cours de leur transport par le professionnel auquel elles ont été remises à cette fin, en exécution d’un contrat de transport ».

Pour justifier la compétence du tribunal de commerce, la Cour de cassation précise que « Les conditions et modalités de la réparation de tels préjudices, d’ordre exclusivement économique, sont déterminées par ce contrat et les dispositions du code de commerce qui lui sont applicables ». Or, la loi répute acte de commerce toute entreprise de transport par terre ou par eau (C. com., art. L. 110-1, 5°). Par ailleurs, la lettre de voiture forme un contrat entre l’expéditeur, le voiturier et le destinataire (C. com., art. L. 132-8) et les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux engagements entre commerçants (C. com., art. L. 721-3, 1°).

Remarque : la Cour de cassation a également retenu la compétence du tribunal de commerce, dans une précédente affaire où, pourtant, la « marchandise transportée » était une grue-pelle, répondant à la définition de véhicule terrestre à moteur. Celle-ci, en mouvement et conduite par le chauffeur du transporteur, a chuté alors qu’elle roulait sur la rampe de déchargement d’une remorque. Pour justifier sa position, la Cour de cassation a énoncé que le dommage occasionné à cet engin est intervenu lors d’une opération de déchargement effectué en exécution du contrat de transport liant les parties (Cass. 2e civ., 31 mars 2022, n° 20-15.448, n° 339 B).

Remarque : Il résulte de ces décisions que la loi du 5 juillet 1985 ne peut plus être invoquée dans une telle situation par la partie lésée, seule la mauvaise exécution du contrat de transport pouvant servir de fondement à la demande de réparation du propriétaire de la marchandise transportée. Par ailleurs, force est de constater qu’un même accident peut désormais relever de la compétence de deux ordres de juridiction distincts. Dans la première affaire par exemple, si les dommages occasionnés à la marchandise transportée relèvent du tribunal de commerce, les dommages causés au propriétaire du pont par le transporteur relèvent du tribunal judiciaire.

James Landel, Conseiller scientifique du Dictionnaire Permanent Assurances

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