Construction : réforme de la norme marchés privés AFNOR NF P 03-001

30.10.2017

Gestion d'entreprise

A la suite d'une longue concertation entre les différents professionnels de la construction, la norme NF P 03-001 relative au cahier des clauses administratives générales est modifiée et intègre les dernières évolutions légales.

La nouvelle version de la norme NF P 03-001 qui constitue le cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés privés de travaux de bâtiment est refondue et remplace celle de décembre 2010. Rappelons que cette norme est applicable aux marchés privés qui s’y réfèrent (Cass. 3e civ., 4 déc. 1991, n° 90-13.335, n° 1817 P).
Les modifications relatives à l’assurance de l’entrepreneur prennent en compte les dernières évolutions légales notamment celles relatives à la mise en place d’un contrat collectif de responsabilité décennale (CCRD).
De plus, les dispositions relatives à l’assurance sont beaucoup plus élaborées ; elles sont indiquées à l’article 23 divisé en 4 sous-articles qui porte sur : l’assurance de responsabilité civile (art. 23.1), l’assurance de responsabilité décennale obligatoire (art. 23.2), l’assurance de dommages-ouvrage (art. 23.3) et l’assurance tous risques chantier (art. 23.4).
Assurance de responsabilité civile de l’entrepreneur (art. 23.1)
L’article 23.1 précise que l’entrepreneur doit être assuré contre les risques de dommages aux tiers y compris le maître de l’ouvrage à la suite de dommages corporels, matériels et immatériels survenant pendant et après les travaux. Le titulaire du marché doit fournir au donneur d’ordre, si ce dernier le demande, la preuve qu'il est assuré contre ce risque.
Cette disposition est classique ; elle impose au titulaire du marché la souscription d’une assurance de responsabilité civile professionnelle au titre de son activité sur le chantier. Cette assurance couvre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de l’entrepreneur, en raison de dommages corporels, matériels ou immatériels causés aux tiers y compris le maître de l’ouvrage, du fait de ses activités professionnelles.
Il est précisé que l’entreprise principale doit aussi vérifier que son sous-traitant dispose d’une assurance de responsabilité civile s’appliquant dans les mêmes conditions que celles énoncées ci-dessus.
Assurance de responsabilité décennale obligatoire (art. 23.2)
La clause relative à l’obligation d’assurance est davantage détaillée dans la nouvelle version de la norme NF P 03-001 d’octobre 2017.
L'entrepreneur doit ainsi souscrire l’assurance de responsabilité décennale obligatoire pour les travaux de construction d’ouvrages qui y sont soumis. Il doit pouvoir en justifier par la production d’une attestation d’assurance conforme au modèle type (C. assur., art. A. 243-3).
De plus, l’attestation doit être valable à la date de l’ouverture du chantier et pour l’ensemble des activités ou missions exercées par le titulaire du marché (C. assur., art. R. 243-2 et A. 243-3).
Remarque : l’activité déclarée conditionne l’application de la garantie d’assurance. Ainsi, l’assureur peut opposer une non-assurance lorsque son assuré ne lui a pas déclaré une activité (Cass. 3e civ., 30 juin 2016, n° 15-18.206, n° 787 P + B). Dès lors, il apparaît important que l’attestation d’assurance mentionne précisément les activités déclarées et que celles-ci correspondent aux travaux exécutés par le constructeur au titre de son marché. En décembre 2007, les assureurs ont établi une nomenclature d’activité qui est la référence commune aux assureurs pour la définition des activités garanties telles qu’elles doivent figurer sur les attestations d’assurance.

Le montant de la garantie, pour les ouvrages d’habitation, doit être égal au coût des travaux de réparation des dommages matériels de nature décennale causés à l’ouvrage. Pour les ouvrages autres que d’habitation, il doit être égal au coût total de la construction déclaré par le maître de l’ouvrage, hormis l'hypothèse où ce coût est supérieur au montant prévu à l'article R. 243-3, I du code des assurances, qui est actuellement de 150 millions d’euros.

L’article 23.2 tient compte également de l’instauration du contrat collectif de responsabilité décennale (CCRD) visé à l’article R. 243-1 du code des assurances.

Remarque : les personnes mentionnées aux articles L. 241-1 et L. 241-2 peuvent satisfaire à l'obligation d'assurance leur incombant en vertu de ces articles en recourant à un contrat d'assurance collectif, en complément d'un ou plusieurs contrats d'assurance garantissant individuellement leur responsabilité dans la limite des plafonds fixés dans ce ou ces contrats. Ce contrat d'assurance collectif peut être souscrit pour le compte de plusieurs personnes mentionnées à ces articles (C. assur., art. R. 243-1).
Afin de pouvoir déterminer de la nécessité de mettre en place un CCRD, la clause prévoit que « le maître de l’ouvrage, ou son mandataire, déclare préalablement à l’entrepreneur le coût total de la construction de l’ouvrage, honoraires compris ».
Remarque : selon les recommandations professionnelles, le CCRD est préconisé lorsque le coût total prévisionnel de travaux et honoraires est supérieur à 15 000 000 € HT (Préconisation FFA du 8 déc. 2008).
Il apparaissait ainsi indispensable que les constructeurs soient informés de ce coût prévisionnel pour s’orienter vers la mise en place d’un CCRD.
Pour la parfaite information des intervenants, le maître de l’ouvrage doit indiquer s’il souscrit un CCRD pour le compte des entrepreneurs assujettis à l’obligation d’assurance de responsabilité décennale. Dans ce cas, il informe l’entrepreneur du montant de chantier au-delà duquel le CCRD est mis en place et lui communique le montant de la franchise absolue qui lui est applicable et qui constituera le montant de garantie de son contrat individuel.
Il est également imposé que les sous-traitants de l’entrepreneur, quel que soit leur rang, aient la qualité d’assuré au titre du CCRD ou qu’ils bénéficient, ainsi que leur assureur, d’une clause de renonciation à recours au-delà du montant de la franchise absolue applicable.
Remarque : la franchise absolue est le montant au-delà duquel le CCRD intervient. Selon les recommandations professionnelles, elle est fixée à 10 000 000 € pour les entrepreneurs titulaires des lots gros œuvre ou structure et 6 000 000 € pour les autres entrepreneurs traitants directs.
Assurance de dommages-ouvrage (art. 23.3)
Cette clause rappelle que le maître de l’ouvrage doit aussi souscrire l’obligation d’assurance de dommages-ouvrage lorsqu’elle s’impose.
Assurance tous risques chantier (art. 23.4)

Une assurance « tous risques chantiers » (TRC) peut être souscrite par le maître de l’ouvrage pour les risques de dommages (à l’ouvrage et aux tiers) en cours de travaux.

Selon la police, les garanties peuvent être étendues aux intervenants. L’assureur peut ainsi prévoir qu’il exercera ou pas un recours contre ces intervenants et/ou contre leurs assureurs.

Aussi, dans l’hypothèse où le maître de l’ouvrage aurait souscrit une TRC, il est prévu qu’il en informe les entrepreneurs ; il devra également préciser les modalités et l’étendue des garanties souscrites.

En conclusion, la nouvelle « clause assurance » de la norme NF P 03-001 d’octobre 2017, est plus complète bien qu’elle ne vise plus les dommages à l’ouvrage du constructeur en cours de travaux. Elle tient compte des dernières évolutions en matière d’obligation d’assurance, notamment au recours à un CCRD.

Cette nouvelle clause renforce le dialogue entre donneur d’ordre et titulaire du marché afin d’optimiser l’assurance globale du chantier.

Le dispositif veille à rappeler au constructeur l’importance des risques et la nécessité de souscrire des garanties adaptées et pertinentes, plus particulièrement au titre de l’activité exercée. Il est engagé à vérifier les conditions d’assurance de ses sous-traitants.

François-Xavier Ajaccio, Spécialiste en assurance-construction

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