La crise du covid-19 remet à plat de nombreuses certitudes et invite les économies à changer de paradigme. À l’échelle de l’entreprise, opérer une transition et s’interroger sur son modèle de développement pour coller aux enjeux sociaux et environnementaux du XXIe siècle semble devenir une évidence… D’autant que les politiques publiques de relance pourraient encourager les bons élèves.
La crise sanitaire due à l'épidémie de covid-19 est loin d’être terminée. Mais nombreux sont ceux qui pensent déjà au coup d’après. En particulier dans les entreprises qui ont vu leur activité s’effondrer en quelques jours. Le président de la République et les membres du gouvernement n’ont cessé de le répéter. Pas question de les laisser fermer leurs portes l’une après l’autre.
Alors que le covid-19 met en évidence les limites d’un modèle économique peu soucieux de l’origine ou de la disponibilité de produits fondamentaux, alors que d’autres crises environnementales et climatiques se profilent, quelques voix commencent toutefois à se faire entendre pour conditionner les dispositifs d’aides.
"Est-il utile de sauver toutes les compagnies aériennes, notamment les low cost ? Va-t-on sauver les compagnies pétrolières ? C'est une occasion unique d'opérer une véritable transition", estime par exemple le spécialiste des questions de géopolitique de l’environnement François Gemenne dans Le Point.
Au-delà de ces quelques activités emblématiques, tous les acteurs économiques pourraient avoir intérêt à profiter de cette épreuve pour opérer quelques virages à 180 degrés. Et c’est maintenant qu’il faut penser la sortie de crise.
Samedi 4 avril, une soixantaine de parlementaires – notamment LREM, mais pas uniquement – a lancé un appel pour engager "un grand plan de transformation de notre société et de notre économie" et préparer "le jour et le monde d'après". Une plateforme a été mise en ligne pour recueillir les propositions, jusqu'au 3 mai. Le projet est coordonné par les élus Matthieu Orphelin, Paula Forteza et Aurélien Taché, mais figurent également des députés PS, centristes ainsi que l'eurodéputé Pascal Durand (EELV) et le sénateur Ronan Dantec (EELV). Leur idée est de lancer un plan de transformation plutôt qu’un traditionnel plan de relance.
Certains avaient déjà défendu cette position lors des débats sur le projet de loi d'urgence sanitaire. Ils défendaient alors par exemple une réglementation qui permette que le mieux-disant environnemental et social soit favorisé. Cela n'avait pas été retenu, car l'urgence était ailleurs. Mais depuis, de nombreuses voix s’élèvent pour défendre cette idée. Y compris dans les milieux économiques les plus libéraux.
Environnement
La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)
"La vulnérabilité de nos sociétés interconnectées", selon l’expression du directeur général de l’Iddri, Sébastien Treyer, pourrait d’abord jouer en faveur d’une relocalisation de certaines activités. "Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché", a d’ailleurs déclaré le président de la République le 12 mars 2020. Une opportunité dans certains secteurs qui souffraient jusqu’alors d’une concurrence effrénée, en particulier si le Pacte vert européen encourage les investissements qui font réellement sens.
Mais c’est aussi au sein même de chaque entreprise que la nécessité de sécuriser son approvisionnement devient une évidence. D’un strict point de vue économique, sourcer l’origine de ses matières premières et faire en sorte de ne pas dépendre de ce qui se passe à l’autre bout du monde deviennent deux critères d’achat fondamentaux pour assurer la continuité de son activité. Même si ce n’est pas de la meilleure manière, peut-être va-t-on enfin réconcilier économie et écologie grâce à l’impératif de résilience.
La fin de la crise sera un bon test pour voir quelles sont les entreprises capables de retrouver plus rapidement leur rythme de leur croisière. Dans le secteur textile, l’atelier Tuffery ou le Slip français qui produisent des vêtements à partir de matières locales devraient en toute logique être moins impactés par la crise que ceux qui se fournissent en Asie.
On commence aussi à concéder dans l’industrie automobile que des ruptures d’approvisionnement auraient sans doute perturbé le fonctionnement de certains sites, même si la crise sanitaire n’avait pas gagné l’Hexagone. Reste à savoir si ces prises de conscience seront durables.
Interrogé par nos confrères de la Tribune, Arnaud Florentin, économètre du cabinet Utopies, estime que promouvoir la relocalisation aura des effets limités si l’on se contente d’en appeler à une forme de patriotisme économique. Pour lui, c’est à l’ensemble de leur écosystème que les entreprises ont intérêt à réfléchir, notamment en privilégiant ce qu’il nomme un "réenracinement", avec de "petites solutions industrielles, qui favorisent l'émergence de boucles locales moins productrices de pollution et de déchets et génératrices de nouvelles synergies".
Nos engagements
La meilleure actualisation du marché.
Un accompagnement gratuit de qualité.
Un éditeur de référence depuis 1947.
Des moyens de paiement adaptés et sécurisés.