Crise énergétique : quelles solutions pour les collectivités ?

19.04.2022

Environnement

Au même titre que les entreprises, les collectivités territoriales font face aux hausses des prix de l'énergie qui peuvent à terme affecter les services publics locaux.

Selon des enquêtes de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) et de l’Association des petites villes de France (APVF), les communes connaissent des hausses des tarifs de l’énergie s’échelonnant entre 30 % et 300 %, 90 % des petites villes sont concernées par ces augmentations. Elles ont pour conséquences d’augmenter les charges des collectivités territoriales et de se répercuter à terme sur la fiscalité locale.   
Pour y répondre, le gouvernement a mis en place un bouclier tarifaire (voir notre actualité du 1er octobre 2021 « Facture d'énergie : un bouclier tarifaire pour faire face à la flambée »). Dans quelle mesure ce dispositif s’applique-t-il aux collectivités ? Est-il suffisant ?
Effets du bouclier tarifaire sur les collectivités
Les communes peuvent bénéficier de la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) dans les mêmes conditions que les autres consommateurs : elles sont traitées comme les ménages pour leurs services non économiques (non soumis à la TVA) et comme les entreprises pour leurs activités économiques (soumises à la TVA).
Dans le cadre de la réforme de la TICFE au 1er janvier 2023, la taxe sur la consommation finale d'électricité pouvant aller jusqu'à 6,5 euros/MWh sera bien intégrée à la nouvelle accise au 1er janvier 2023. Les montant de 1 euro/MWh et de 0,5 euro/MWh seront ainsi majorés au 1er janvier 2023 d'environ 6,5 euros/MWh en compensation de la suppression des taxes communales. Les recettes des communes resteront donc légèrement croissantes, comme prévu.
Les petites collectivités qui bénéficient encore des tarifs réglementés de vente de l’électricité (c’est-à-dire celles qui emploient moins de 10 personnes, avec des recettes réelles de fonctionnement de moins de 2 millions d'euros) se verront appliquer la limitation de la hausse du prix de l'électricité à 4 %.
Pour les autres collectivités, la hausse des prix de l'électricité sera diminuée grâce à la hausse du volume d’ARENH (voir notre actualité du 15 mars 2022 « ARENH : un supplément de 20 TWh au 1er avril 2022 ») et à la baisse de la TICFE.
Enfin, les collectivités bénéficieront également, pour leurs flottes de véhicules, de la mesure d'aide exceptionnelle sur les carburants, qui conduit à une réduction de 15 centimes d'euros par litre hors taxe sur les carburants.
Marchés de fourniture d’énergie : comment aider les acheteurs face à la volatilité des prix ?
La très forte volatilité des prix du gaz, du pétrole et de l'électricité complique la passation des marchés de fournitures d'énergie pour les acheteurs. Les actuelles pratiques commerciales sont parfois difficilement compatibles avec les délais de remise et de validité des offres habituellement retenus dans les procédures classiques de passation des contrats de la commande publique. En effet, certaines propositions d'offres ont une validité d'à peine vingt-quatre heures, voire moins.
Pour surmonter ces difficultés, pour les procédures de passation à venir, les acheteurs peuvent privilégier les accords-cadres (C. commande publ., art. L. 2125-1) multi-attributaires à marchés subséquents (C. commande publ., art. R. 2162-2). Cette technique d'achat permet à l'acheteur de remettre périodiquement en concurrence les titulaires de cet accord-cadre pour l'attribution des marchés. Elle permet aux acheteurs de prévoir dans leur règlement de la consultation des délais plus courts de remise et de sélection des offres, permettant à ces marchés subséquents de s'adapter aux fluctuations rapides des marchés de l'énergie.
S'agissant des procédures de passation déjà engagées prévoyant des délais de remise des offres manifestement incompatibles avec cette inflation, celles-ci peuvent être déclarées sans suite pour être réengagées sur ces nouvelles bases.
Les acheteurs peuvent également décider de recourir aux services de l'Union des groupements d'achats publics (UGAP) ou d'autres centrales d'achat susceptibles de répondre à leurs besoins énergétiques.
Un accompagnement de l’Etat
Une circulaire du 13 avril 2022 de la Direction générale des finances publiques (DGFIP) précise les actions que l’Etat et ses opérateurs doivent appliquer pour réduire leur consommation de gaz (voir notre actualité du 15 avril 2022 « Consignes pour réduire la consommation de gaz naturel des bâtiments de l'Etat »). Les collectivités territoriales sont invitées à adopter des mesures similaires. Pour cela, les préfets doivent réunir les collectivités pour leur présenter les actions de maîtrise des coûts de l'énergie (bouclier tarifaire, consignes de chauffe, entretien des chauffages, sensibilisation…), les financements disponibles puis les accompagner dans leurs démarches.
L’Etat accompagne les collectivités territoriales sur plusieurs plans :
- réduction de la consommation énergétique des bâtiments dans le cadre du dispositif Eco Energie Tertiaire. Pour y parvenir, plusieurs leviers sont mobilisables : travaux sur l'enveloppe des bâtiments, installation d'équipements performants, optimisation de l'exploitation et du pilotage des équipements et incitation à un comportement sobre des occupants ;
- financement de l’ingénierie à travers le programme ACTEE, financé par les certificats d'économie d'énergie (CEE) et porté par la FNCCR. Il vise à accélérer massivement la rénovation énergétique du parc des collectivités locales en encourageant la mutualisation et la planification des actions de réduction des factures d'énergie à court et long terme ;
- soutien des investissements des collectivités par l'intermédiaire des dotations d'investissement, et notamment de la dotation rénovation énergétique (DSIL et DSID) ou via le « Coup de pouce chauffage des bâtiments tertiaires » pour le remplacement des équipements de chauffage ou de production d'eau chaude sanitaire utilisant des énergies fossiles afin de les remplacer par des dispositifs plus efficaces énergétiquement et utilisant des énergies renouvelables ;
- décarbonation du chauffage et développement des réseaux de chaleur urbains, à travers le fonds chaleur de l'ADEME. Pour les réseaux de chaleur exploités dans le cadre de concessions de service public, les collectivités peuvent également conclure des avenants aux concessions en cours pour accélérer leur décarbonation et leur verdissement. La réalisation par les concessionnaires en place de travaux doit être encouragée dans le respect des dispositions du code de la commande publique relatives à la modification des contrats de concession.
Des mesures complémentaires ?
Selon l’APVF et la FNCCR, ces mesures ne sont pas suffisantes. Elles proposent d’autres pistes :
- autoriser les collectivités à revenir aux tarifs règlementés de vente (TRV) ;
- aménager le code de commerce en matière d’encadrement des prix ;
- réviser la formule de calcul du TRV au-delà du relèvement du plafond de l’ARENH ;
- faire évoluer la réglementation en vue de faciliter le recours par les acheteurs publics aux nouvelles formes de commercialisation qui se développent dans un contexte de transition énergétique, en particulier l’achat direct d’énergie renouvelable auprès d’un producteur ou des mécanismes d’autoconsommations (PPA) ;
- créer une dotation énergie ;
- soutenir davantage la rénovation thermique des bâtiments et le développement de la production d’énergies renouvelables locales.

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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