Différends liés aux opérations de fusions-acquisitions : les bonnes pratiques à adopter pour réussir sa médiation

Différends liés aux opérations de fusions-acquisitions : les bonnes pratiques à adopter pour réussir sa médiation

25.02.2024

Gestion d'entreprise

Vérification du contrat, choix du médiateur, négociation… Dans cette chronique, Catherine Peulvé, avocat CPLAW Paris et médiateur judiciaire et inter-entreprises, propose une liste de bonnes pratiques en vue d’aider les entreprises, confrontées à un différend lié aux opérations de fusions-acquisitions, à réussir leur médiation.

La médiation dans les dossiers liés aux opérations de fusions-acquisitions revêt quelques caractéristiques intéressantes qui lui sont propres, à explorer notamment à la lumière de l’aversion des parties pour le contentieux dans cette matière. Nos quelques conseils ont pour objectif d’aider l’entreprise qui fait face à une difficulté liée à l’opération de fusion-acquisition, notamment pour déterminer si un processus de médiation serait adapté, et lorsqu’une médiation s’engage, pour en optimiser son déroulement.

Les bons choix en amont pour favoriser une résolution de son différend de M&A par voie de médiation

Nos conseils aux directeurs juridiques s’axent essentiellement autour des 5 pivots suivants : le contrat, le processus, le médiateur, l’équipe, l’avocat.

Vérifiez le contrat de fusion et d'acquisition !

Y a-t-il une clause de médiation ? Cette clause, si elle existe, prévoit-elle une médiation obligatoire ? Est-elle combinée à une clause d'arbitrage ? Quelle stratégie précontentieuse ? Qu’est-ce qui a été fait en matière d'approche amiable ?

Informez-vous sur le processus de médiation 

Tant que vous n'avez pas assisté à une médiation, il est difficile de se faire une idée de son déroulement.

Faites-vous expliquer le processus par votre conseil ou par un médiateur qui vous aidera à décider si la médiation est adaptée au litige. Ont été répertoriées les bonnes raisons d’aller en médiation, mais également les bonnes raisons de choisir un autre mode de résolution.

Obtenez des informations sur ce qui va être mis en place, la mission, les compétences et les responsabilités du médiateur, le rôle des parties, des intervenants, les étapes et les objectifs.

Décidez si vous souhaitez que le processus se déroule selon les règles de médiation d'un centre ou sans centre (médiation ad hoc).

Choisissez bien votre médiateur

Décidez si vous voulez un expert dans le domaine juridique ou non. Cela rassure souvent les entreprises mais n'améliore pas nécessairement le processus de médiation ou les chances d’obtenir un accord. Au contraire, être trop expert dans le domaine peut conduire à avoir des biais qui pourront nuire à la solution des parties.

Il est également utile de savoir comment le médiateur sera désigné : par un centre ou un juge ? choisi directement par les parties ?

Préparez le choix de votre (vos) représentant(s) en médiation

Il(s)/elle(s) doi(ven)t avoir :

  • une bonne connaissance des faits,
  • le pouvoir d'envisager des solutions,
  • le pouvoir de construire et finalement s’engager dans un accord ou une transaction au nom et pour le compte de l'entreprise.

Il n'y a pas de combinaison unique. Et pas de représentant unique. La présence de plusieurs interlocuteurs peut être utile. Réfléchissez-y au préalable.

Faites-vous accompagner par le « bon » avocat

Vous pouvez garder votre avocat spécialisé dans les litiges, mais il sera plus efficace dans cette phase amiable s'il a été formé à la médiation.

N’hésitez pas à faire participer ensemble l'avocat spécialisé en contentieux et l'avocat de l'entreprise au moment de l'opération de fusion et d'acquisition.

Travaillez en étroite collaboration avec votre avocat sur la préparation, mais gardez à l'esprit que dans un processus de médiation, l'avocat vous assiste mais ne vous représente pas. Votre rôle et celui de la direction de l’entreprise sont donc considérables.

Pour autant, ne vous passez pas d’avocat ! Votre avocat a un rôle déterminant dans toutes les phases du processus, en amont pour vérifier son adaptabilité à la difficulté rencontrée, mais également pendant, pour vous assister, vous permettre d’évoluer rapidement vers votre intérêt, vous conseiller, consolider vos échanges avec le médiateur, vérifier que les solutions « sur la table de médiation » sont adaptées à votre société et juridiquement envisageables (reality check).

Comment réussir au mieux « sa » médiation ?

Préparez, préparez, préparez ! Préparez les discussions autour de la médiation. Préparez votre négociation.

Travaillez sur les faits du dossier. Les parties n'ont pas nécessairement la même perception des faits. Il est donc important de revoir la chronologie des événements depuis la première rencontre jusqu'à la situation actuelle. Bref, les faits, rien que les faits, mais tous les faits...

Réfléchissez à vos intérêts/motivations, mais aussi à ceux de l'autre. En effet, essayer de voir ce qui est important pour vous et ce qui le serait pour l'autre vous aide à abandonner les postures belliqueuses, les réactions spontanées et, surtout, la « pensée unique ».

Coordonnez les rôles de chacun des membres de votre équipe et de vos conseils extérieurs.

Préparer et adapter la négociation

Déterminez les limites (temps/montants, etc.) au-delà duquel la négociation avec l’autre ne présente plus d’intérêt pour vous. Connaître les outils utilisés en négociation facilite cet exercice.

Décidez de la meilleure stratégie pour l’entreprise. Chaque partie doit réfléchir à ce qu'elle veut dire à l'autre partie en médiation, à ce qu'elle veut réserver au seul médiateur en réunion séparée ou, au contraire, à ce qu'elle ne veut pas ou ne peut pas dire à l’autre partie. Vous pouvez également établir une liste de questions à poser ou faire poser à l'autre partie. Adaptez votre stratégie de négociation.

Vérifier les termes de confidentialité applicable

La préparation vous donne également l'occasion de réfléchir aux informations et documents à mettre sur la « table de médiation » et de décider de leur mode de communication (confidentiel ou non) ; veillez à vérifier les termes de confidentialité applicable. C’est un véritable enjeu, en particulier dans les médiations internationales.

Et n’hésitez pas, une fois ce travail fait, à informer le médiateur par une brève note sur le conflit mais aussi (et surtout) sur la manière dont vous pensez que vos intérêts seront le mieux servis dans le processus de médiation.

La médiation dans les dossiers liés aux opérations de fusions-acquisitions, dont les composantes sont à la fois financières, patrimoniales et humaines, est non seulement adaptée et efficace mais également une chance à saisir et exploiter, tant pour le vendeur que pour l’acheteur.

 

Catherine Peulvé

Nos engagements