Technicité, stratégie, management, gestion du risque… Autant de qualités recherchées aujourd’hui chez les directeurs juridiques qui sont en passe de devenir les « chefs d’orchestre » de l’entreprise. On fait le point avec Marie Hombrouck, CEO et fondatrice du cabinet de recrutement Atorus Executive et Nathalie Dubois, directrice juridique de Fnac-Darty.
Jusqu’à présent, les directeurs juridiques étaient principalement recrutés pour leur expertise. Si aujourd’hui encore, il s’agit de la première compétence recherchée « pour sécuriser l’entreprise d’un point de vue technique », estime Marie Hombrouck, elle ne suffit plus.
« Dans un univers de plus en plus complexe, maîtriser toutes les expertises est devenu impossible », estime Nathalie Dubois. Ainsi, selon elle, assurer la sécurité juridique de l’entreprise, c’est avant tout « apprendre à gérer le stress et l’inconfort ». Et pour illustrer son propos, Nathalie Dubois revient sur sa propre expérience. Recrutée en 2017 chez Fnac-Darty, la juriste n’avait ni l’expertise, ni les connaissances du secteur d’activité qu’elle intégrait, à savoir notamment le droit de la distribution. Mais pour Alexandre Bompard, à l’époque directeur général de l’enseigne, ce n’était pas un problème, bien au contraire. « Lors de mon recrutement, il m’a expliqué rechercher des personnes qui savent évoluer en dehors de leurs zones de confort », déclare Nathalie Dubois, « c’est une approche très visionnaire dès lors que nous sommes désormais dans un monde d’incertitudes ».
Mais n’est-ce pas une prise de risque pour l’entreprise de recruter un directeur juridique qui ne coche pas toutes les cases des expertises recherchées ? Pour Nathalie Dubois, le risque est surtout « de se sentir en zone de confort et de pécher par excès de confiance ». Selon elle, l’entreprise doit désormais attendre du juriste qu’il pratique « l’art de questionner les questions ». Un avis partagé par Marie Hombrouck qui reconnaît que le directeur juridique doit être dans « une dynamique de compétence continue. »
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Concrètement, comment faire ? Pour Nathalie Dubois, le directeur juridique devrait revenir aux « fondamentaux du droit » plutôt qu’à « l’expertise du droit », « comprendre l’essence et le sens de la règle ». S’en tenir à la matière juridique telle qu’elle est enseignée et pratiquée aujourd’hui serait une erreur. « Les anglo-saxons l’ont compris depuis longtemps : le droit est un outil stratégique. La directrice juridique juge nécessaire « d’investir le droit mou » et de « changer de mindset » pour « devenir créateur de normes et d’innovation juridique ». C’est une « nouvelle génération de directeurs juridiques » qui, selon elle, est sur le point d’émerger. Pour Marie Hombrouck, « la parfaite maîtrise du droit des obligations est essentielle pour un juriste ». « Aux étudiants en droit et aux jeunes juristes, je répète régulièrement qu’il est essentiel de soigner cette matière qui est un socle de compétences de base et que, par la suite, ils pourront faire pivoter leurs différentes compétences en droit », explique-t-elle.
Cultiver sa créativité serait donc une autre qualité à ne pas négliger. Pour cela, la chasseuse de tête recommande aux directeurs juridiques de regarder ce que font les autres et d’entretenir leurs réseaux internes et externes à l'entreprise. En outre, elle encourage les juristes à être curieux intellectuellement et à créer un lien de confiance avec les instances dirigeantes. « Des formations certifiantes, telles que celle dirigée par Christophe de Roquilly « Digital Ethics Officer » à l’EDHEC Augmented Law Institute, sont importantes pour continuer à se former », souligne Marie Hombrouck.
Et pour que l’équipe juridique assure au mieux sa mission principale de sécuriser l’entreprise, son directeur doit veiller à être un bon recruteur et un bon manager. En ce sens, l’humilité s’avère essentielle pour servir les intérêts de l’entreprise. « J’ai des collaborateurs qui ont des compétences plus élevées que les miennes dans leurs domaines d’expertises », explique Nathalie Dubois qui considère ses collaborateurs « comme des pairs ».
De plus, au cours de ses recrutements, Nathalie Dubois s’assure que le juriste est « la bonne personne pour le poste » et que « c’est le bon poste pour la personne ». Pour elle, comme ce fut le cas pour son intégration dans l'entreprise, il n'est pas nécessaire que « le collaborateur coche toutes les compétences » car « il doit avoir une capacité à progresser ». « Si la personne est parfaitement adaptée au poste, elle n’aura pas assez de challenge et, à terme, se verra régresser », estime la directrice juridique. Cette dernière mise donc sur le potentiel de progression et l’acquisition de nouvelles compétences « pour faire grandir » ses collaborateurs.
Même constat pour Marie Hombrouck qui conclut sur une note optimiste : « toutes les nouvelles compétences attendues aujourd’hui vont permettre de faire évoluer les missions des juristes en horizontal dans l’entreprise ».
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