Une étude du Céreq démontre, chiffres à l’appui, que l’accès à l’information pour suivre une formation varie en fonction du statut, du poste occupé, du sexe, du diplôme et même de la nationalité. Avec, à la clef, des gagnants et des perdants.
Voilà une enquête qui ne va pas laisser indifférente Muriel Pénicaud : alors que la ministre du travail donne la dernière touche à l’application dédiée au compte personnel de formation (CPF), prévue à l’automne, le Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Cereq) révèle, dans une étude de juin, que l’accès à l’information sur la formation crée des inégalités. Car selon la fonction exercée, le type de contrat, le niveau de diplôme, le sexe voire la nationalité, les salariés ne sont pas informés de la même manière. Ce qui induit des accès différents à la formation.
Pour le démontrer, le Céreq a mené l’enquête auprès de 4 500 entreprises du secteur privé et de 16 000 salariés. Le centre d’études a ensuite examiné les voies d’information des salariés pour accéder à des formations. Il a mis en exergue trois canaux d’information : un canal "vertical" lorsque les salariés sont informés par leur hiérarchie, un responsable formation (RF) ou les RH ; un canal "horizontal" lorsque les messages sont donnés par les collègues de travail ou des représentants du personnel et un canal autonome lorsque le salarié se débrouille seul. Résultats ? "La probabilité de suivre une formation demandée augmente ainsi de 12 points de pourcentage lorsque l’information provient du canal "vertical", de neuf points lorsque le salarié s’est informé par lui-même et de seulement trois points lorsque l’information provient des collègues ou des représentants du personnel", constatent les auteurs, Carole Brunet et Géraldine Rieucau, tous deux maîtres de conférence à Paris 8.
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
Dans le détail, l’information officielle ou verticale, diffusée par le N+1, le RH ou le RRH, atteint davantage les salariés les plus intégrés, indistinctement les hommes, les cadres, les professions intermédiaires, les salariés en CDI, ceux à temps plein ou ayant le plus d’ancienneté. Elle peut être donnée au cours de l’entretien professionnel, qui est une "source majeure d’information" ou lors de la mise en place du plan de formation, appelé désormais plan de développement des compétences. Cette information ne s’adresse pas, en revanche, aux salariés en CDD ou travaillant à temps partiel, selon l’étude. De même, les femmes sont moins informées par le canal "vertical" que les hommes. Les auteurs avancent ici plusieurs hypothèses. Aux premiers rangs desquels des caractéristiques propres à leur emploi : horaires de travail fragmentées et temps partiel avec peu d’heures hebdomadaires.
L’information provenant du canal "horizontal", transmise par les collègues ou les représentants du personnel, a, elle, une autre cible : elle touche principalement les ouvriers, les employés et les hommes, indépendamment de leur contrat de travail. Elle concerne davantage ceux présents depuis moins de deux ans que les plus anciens dans l’entreprise. "Les informations sont transmises ici sur un mode relationnel (voire amical) et dénué d’enjeu hiérarchique", notent les auteurs. Mais ce mode de diffusion a aussi son revers : il exclut davantage les femmes qui "connaissent relativement peu les représentants du personnel". D’autant qu’elles sont moins "moins nombreuses parmi ces derniers" et qu’elles passent "moins que les hommes par leurs réseaux professionnels pour s’informer".
Enfin, certains salariés mobilisent leurs propres ressources pour se tenir au courant. Mais tous ne sont pas égaux devant cette quête d’information. "Ainsi, avoir un poste de cadre ou de profession intermédiaire augmente respectivement de 6,7 et 3,5 points de pourcentage la probabilité de s’informer par soi-même", note l’étude. De même, les salariés titulaires d’un bac ou d’un diplôme du supérieur (par rapport aux non diplômés) s’informent davantage par eux-mêmes, ainsi que les salariés de nationalité française.
Ce constat prend, de fait, la forme d’un avertissement. "Les réformes de la formation attendent des actifs qu’ils soient autonomes dans leur recherche d’information. Or, ces résultats montrent que cette autonomie suppose des ressources particulières (éducatives liées au statut social, voire à la nationalité) qui font précisément défaut aux profils les plus fragiles".
Dans ce contexte, les auteurs préconisent trois pistes pour réduire les inégalités d’accès à la formation. La première consiste à inciter les "représentants" de la politique de l’entreprise (hiérarchie RH, RF) à "cibler davantage l’information qu’ils diffusent sur les salariés aux profils les plus fragiles". La seconde "à impliquer plus fortement dans la politique de formation de l’entreprise les représentants du personnel dont on a vu qu’ils informaient des catégories peu formées". Enfin, une attention particulière doit être accordée "aux salariés femmes, moins concernées par l’information diffusée par le canal vertical et par la canal horizontal".
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